Les employés d’International logistic solution (ILS), entreprise chargée de construire les gradins et la clôture de ce stade annexe, réclament deux mois de salaires impayés et se plaignent des heures supplémentaires non rémunérées. Pour manifester leur ras-le bol, ils ont engagé un nouveau mouvement d’humeur ce matin.
« Nous voulons nos salaires… deux mois de salaires c’est trop ! ; « Deux mois sans salaires, on vit comment ? », « Comment vivre sans son salaire ?», « Deux mois sans salaire ; nous parents, élèves, on fait comment ?», « Comment organiser une Can sans stade ?» Les messages floqués sur les pancartes érigées sur le site du stade annexe n°2 ce mardi matin, trahissent le courroux de ces hommes et femmes chargés de la construction des gradins ainsi que de la clôture de cette infrastructure retenue comme stade d’entraînement lors de la prochaine Can féminine que le Cameroun abrite du 19 novembre au 03 novembre. Problème ? Les ouvriers se plaignent des promesses non tenues de leur patron qui n’est autre que le directeur de la société ILS qu’ils présentent comme le la cause de leur malheur en ces temps de rentrée scolaire.
Contrat de travail
En effet, depuis deux mois, « Nos enfants ne sont mêmes pas encore inscrits à cause du non paiement de nos arriérés de salaire dont nous sommes victimes. Nous avons essuyé plusieurs renvois, la semaine dernière. Le directeur nous a promis nos salaires pour vendredi passé. Puis, il a renvoyé pour lundi, aujourd’hui il veut encore renvoyer pour une date ultérieure. Trop c’est trop », argue Anicet Ebassa, le porte parole des grévistes. Plus grave, renchérit son collègue, René Balthazar Ondoa, « personne ici n’a le contrat de travail, mais ce n’est pas un problème puisque nous étions d’accord sur les conditions de travail. Nous qui travaillons la nuit par exemple, devons aller de 17h à 2h, mais il arrive souvent qu’on prolonge à 6h, mais là ce sont des heures supplémentaires qui sont payées. Nous avons des gangs, des bottes, des casques, bref la ténue de travail requise. Même comme on s’occupe nous-mêmes des blessures que nous contractons ».
« Ce pays tue les jeunes »
Interrogé sur les démarches entreprises auprès des dirigeants de ce chantier, Anicet Ebassa confie qu’il a rencontré en personne, le directeur de l’Agence des normes et de qualité (Anor) à trois reprises afin que ce dernier fasse de l’arbitrage. Peine perdue ! « Il m’a rassuré les deux premières fois, et la troisième il m’a dit, mon fils je ne peux rien faire pour vous, il faut grever, nous avons donc lancé notre mot de grève ». Vêtus en casques et chasubles, visibles derrière la clôture de fortune du chantier, les grévistes qui font des va-et-vient ou se montrent disponibles pour répondre aux questions de la presse, reprennent en chœur le refrain de la chanson à succès du rappeur camerounais Valséro : « ce pays tue les jeunes ». Contrairement aux interprétations plus ou moins pompeuses que certains tentent de coller à cette manifestation, ils rassurent ne pas vouloir faire obstacle aux travaux de la Can 2016. Tout ce qu’ils veulent, c’est leurs salaires et rien d’autre.,
Le Sed et la Dgsn annoncés
Alors que le directeur de l’ILS est porté disparu, Jacques Philippe Obama, le délégué régional des sports pour le Centre, commissionné dare-dare par le secrétaire général du ministère des Sports et de l’éducation physique (Minsep), a dû user de diplomatie et de subterfuge pour contenir les ardeurs des ouvriers en colère. « Notre pays a décidé d’offrir une Can de qualité à l’Afrique et nous sommes pris par les délais. Continuons à être responsables. Posez vos problèmes sans faire des bruits et des casses », a conseillé l’ancien directeur du stade Ahmadou Ahidjo. « Nous allons continuer à œuvrer afin que ce problème trouve solution. Nous sommes tous Camerounais ; personne n’a intérêt à ce que notre pays manque ce rendez-vous », a-t-il conclu. Dans la foulée, ce dernier va rassurer les ouvriers sur la visite imminente de certaines autorités sportives et sécuritaires sur le site : « Ne vous en faites pas, le Délégué général de la sureté nationale, le secrétaire d’Etat à la défense et le ministre des Sports et de l’éducation physique seront ici jeudi. Il va falloir tout leur dire, mais nous ne voulons pas de vandalisme sur le chantier, pas de casse ».
60% de taux de réalisation
Le plus grave c’est que ce mouvement d’humeur est juste un épisode du long et interminable feuilleton des couacs ayant émaille la sérénité dans les rangs des techniciens commis sur ce chantier. « C’est la deuxième fois que nous entrons en grève en moins 5 mois. Au lieu de nous payer comme convenu après chaque quinzaine, le directeur veut le faire tous les trois mois. Ce qui est inconcevable pour les chefs de famille que nous sommes ». Rappelons que le chantier qui est à 60% du taux de réalisation, à moins de deux mois du coup d’envoi de la Coupe d’Afrique féminine, accuse déjà un grand retard sur la date butoir de livraison. Avec cette nouvelle grève, nul doute que l’infrastructure ne sera pas livrée selon les délais. Chaud devant !
Christou DOUBENA