Les Lionnes Indomptables du Cameroun ont été la sélection nationale à avoir hissé haut le drapeau national tout au long de l’année 2019. Et c’est la raison pour laquelle l’équipe au complet, une de ses joueuses et son entraîneur se retrouvent nominés aux CAF Awards qui recompensent les meilleurs de l’année. Cameroon-Tribune a rencontré le porte-flambeau, Nchout Njoya Ajara, qui a été instrumentale tout au long de l’année passée et qui pourra d’ailleurs leur offrir une qualification pour les Jeux olympiques 2020 à Tokyo au Japon. Entretien…
Nous sommes à quelques jours des CAF Awards. Cette année pourrait être la bonne pour vous …
Oui, je l’espère, mais également pour le Cameroun tout entier, car notre pays est encore en course pour le prix de la meilleure sélection féminine avec les Lionnes indomptables, de la meilleure footballeuse et celui du meilleur entraîneur féminin avec le coach Alain Djeumfa. J’ose espérer que le Cameroun pourra faire le triplé. Ce serait une grande première et une grande reconnaissance pour le football camerounais en général et le football féminin local en particulier. Depuis le Ballon d’Or de ma soeur Gaëlle Enganamouit, le Cameroun attend avec impatience un autre titre aux distinctions CAF Awards. J’espère que cette année sera la bonne.
Qu’est-ce qui pourrait faire pencher la balance en votre faveur ?
Sans être un des votants, je dirai peutêtre la régularité dont j’ai fait preuve durant toute l’année 2019, les 35 buts que j’ai marqués grâce à mes coéquipières et mes encadreurs en club et en sélection. Je citerai également quelques grandes premières comme la place du 2e plus beau but à la coupe du monde France 2019, une première pour une footballeuse africaine à ce stade si je ne me trompe. De même que ma place dans le prix Puskas du Top 10 des plus beaux buts de l’année au FIFA THE BEST, au milieu des géants comme Ibrahimovic, Messi, Ronaldo et bien d’autres. Et là, je peux le dire sans risquer de me tromper, c’est une première également pour une footballeuse africaine. Sans oublier le rang de première footballeuse africaine et 15e mondiale de l’IFFHS (l’International Football Federation of History and Statistics). Mais les autres candidates qui font partie du Top 3 ont également des arguments à faire valoir pour la conquête de ce prix. Elles méritent le prix autant que moi au vu de leurs performances.
Depuis la dernière coupe du monde, vous êtes considérée comme la star des Lionnes indomptables.Ce nouveau statut est-il difficile à assumer ?
Ce statut que les médias et le public m’attribuent n’est pas du tout difficile à porter, car je ne me considère pas comme la star des Lionnes indomptables. Pour la simple raison qu’une sélection comme les Lionnes indomptables n’a pas de star. Ce sont les Lionnes indomptables qui sont la star. Je ne suis qu’une modeste footballeuse heureuse de faire briller son pays et faire flotter partout dans le monde le vert, rouge et jaune. Et je trouve cela largement suffisant à mon bonheur. Quand vous arrivez au sein des Lionnes indomptables, il y a une histoire qui a été écrite depuis les performances des hommes jusqu’à celles des dames. Ce maillot, cet emblème du lion et ces couleurs vert, rouge et jaune ont une histoire et un palmarès. On est tout simplement heureuse de l’honorer, on ne pense même pas à être star. Au sein de nos clubs, on peut être star, mais pas au sein des Lions ou Lionnes indomptables. Penser à être la star des Lionnes indomptables serait une erreur qui ne passera pas par moi.
Si vous pouviez refaire le film de votre participation au dernier Mondial en France, quelles scènes modifieriez-vous ? L’histoire est déjà écrite. A quoi bon chercher à la changer ?
Je pense qu’il faut juste tirer les leçons de ce qui est arrivé en bien ou en mal, pour enrichir nos prochains parcours en compétition. Sinon, si vous insistez, si j’avais une baguette magique susceptible de changer quoi que ce soit durant la coupe du monde France 2019, ce serait celle d’une meilleure appréciation par l’arbitre du geste de la capitaine Gabrielle Aboudi qui me permet de marquer le but qui aurait pu changer le cours du match et nous permettre d’aller chercher une place en quarts de finale pour le bonheur des Camerounais et des Africains.
Pensez-vous que vous vivez en ce moment votre âge d’or tant en sélection qu’en club ?
Ceux qui ne suivent pas du tout ma carrière ou ceux qui ne la suivent que depuis peu penseront que 2019 a été ma meilleure année. J’ai eu à connaître des années bien meilleures que 2019. En 2018 par exemple, j’avais marqué 15 buts en club, alors qu’en 2019, je n’en ai marqué que 11 en championnat. Le meilleur de moi est toujours pour l’année d’après. J’ai 26 ans, et encore quelques belles années de carrière si je suis épargnée par les blessures. J’espère faire vivre d’autres belles années et de belles émotions aux peuples camerounais et africains.
Vous êtes très impliquée dans des actions caritatives.Quelle est votre principale motivation ?
Quand Dieu le créateur vous donne du talent, ce talent ne vous appartient pas. Ce talent vous est donné afin que vous puissiez le mettre à contribution pour améliorer l’humanité. Si vous avez de grands talents, vous devez avoir de grandes responsabilités. Je ne suis pas née avec une cuillère en or dans la bouche. Je vendais des beignets afin de me payer des godasses et poursuivre mon rêve de devenir footballeuse et faire briller le drapeau de mon pays. Je sais que plusieurs Camerounais ou Africains vivent ce que j’ai vécu dans mon enfance. C’est tout à fait naturel de venir en aide à mon prochain afin de lui donner ce sourire que j’aurais aimé recevoir plus jeune. Je ne le fais pas pour obtenir une reconnaissance ou pour faire une différence quelconque à un moment donné. Je le fais car Dieu passe par moi pour aider mon prochain, comme il est passé par d’autres pour m’aider plus jeune et même aujourd’hui.