La mission proposée aux hommes de Jean-Paul Akono ce dimanche était simple, marquer au moins deux buts sans en prendre un seul, face à une équipe qui allait jouer regroupée derrière, et déployer ses contres.
La mise en application a été laborieuse, l’équipe camerounaise ne trouvant pas réellement la clé durant une heure avant de trouver dans l’énergie du désespoir des raisons d’espérer. Disposition de départ L’équipe annoncée était disposée dans un 4-4-2 très offensif, avec une vigie devant la défense (Song), un relayeur (Makoun); Emana et Idrissou ayant la charge des couloirs. Devant Eto’o tournait autour d’un Webo, en pointe. En défense, un axe jeune et puissant, composé de Nkoulou et Kana-Biyik et des latéraux expérimentés (Angbwa à droite et Womé à gauche). Animation offensive : Un déficit technique criard Dans un match où le Cap Vert venait préserver son avantage très vite porté à trois buts sur un coup franc de Perreira (12ème), les Lions devaient contourner un bloc campé devant son but. Donc, placer un bloc haut, qui aurait permis de faire courir le ballon, de manière à profiter des sautes de concentration que pouvaient avoir les Requins Bleus pour planter leurs griffes. Or, à la place, l’équipe d’Akono s’est étirée avec des défenseurs centraux jouant très bas, avec Alexandre Song, quasiment collé à eux comme un troisième défenseur central. Une équipe coupée donc en deux, obligé de jouer de longs ballons aériens, à destination de Webo et Idrissou, espérant profiter des seconds ballons. Dans une défense très regroupée, ils ont du mal à exister, et donc faciliter le jeu de la défense adverse. Pourtant, des passes courtes, redoublées, avec des permutations ont fait mouche à chaque fois que les Lions ont procédé ainsi. Le but d’Emana provient d’un échange de passe conclu d’un une-deux de l’ancien toulousain avec Webo. Et quelques minutes plus tard, un décrochage d’Eto’o suivi d’un échange avec Makoun offre un coup franc aux 20 mètres que Wome ne transformera pas. Mais ce genre d’échange a trop peu existé pour que ça puisse marcher. Il faut dire que les appels des attaquants ne les aidaient pas. Avec trois attaquants qui ont des profils axiaux (Eto’o, Idrissou, Webo), les permutations ont été rares et tous les appels se faisaient dans l’axe, ce qui a entraîné un abus de ballons longs avec des attaquants dos au but. Seul Emana a essayé de varier, en apportant de la percussion pour suprendre l’adversaire, mais avec toujours ses excès dans le dribble et de longues portées de ballon, là où la vivacité aurait été plus utile. Le manque de joueur au profil de relayeur capable de transperser la première ligne adverse, avant de donner un ballon s’est fait plus évident dans une rencontre où les Lions devaient faire le jeu. Animation défensive : Le corollaire des espaces entre les lignes était la facilité avec laquelle les Requins Bleus ressortaient en contre à la récupération du ballon. Au moins, une fois en première mi-temps, ils aurait pu faire mouche, n’eût été un contrôle trop long qui a permis à Kameni de se saisir du ballon. Et même s’ils n’ont pas toujours su faire le dernier ou l’vant-dernier geste, les Cap-verdiens ont eu des possibilités. Animation des couloirs : Inexistante Dans le 4-4-2, elle est essentielle, mais a été inexistante cet après-midi. Aucune combinaison entre les défenseurs latéraux et les milieux placés devant eux et peu d’incursion réelle des arrières latéraux dans l’attaque. Côté gauche, les années de Womé se sont fait sentir dès la 30ème minute, le Canonier tombant dans sa mauvaise habitude de ne pas attaquer les ballons. A droite, Angbwa n’est pas connu pour ses qualités de contre-attaquant : en assurant, il a évolué assez loin de la ligne de réparation adverse et les centres côté camerounais sont arrivés dans la zone de confort de Vieira le gardien capverdien : à hauteur de main, dans ses 6 mètres. Autant dire qu’il s’est régalé. Les coups de pied arrêtés : Une nouvelle fois, pas à la hauteur Les corners et les coups francs excentrés tirés par Emana, puis Olinga à sa sortie. Les coups francs direct en force par Womé. Dans l’ensemble, mal tirés, trop près du gardien, sans mise en danger. Sur le plan défensif, la lacune de l’équipe depuis deux ans, la série continue avec ce but encaissé sur coup franc. S’il est difficile de faire un reproche à Kameni sur son positionnement, on peut tout de même s’interroger sur la facilité avec laquelle le mur a été franchi quand plusieurs camerounais culminent à plus d’1.85m. Les remplacements : tardifs et sans imagination Du poste pour poste, sans qu’on y décèle une volonté de changement tactique. Emana, qui déclinait physiquement cède sa place à Aboubakar, peu en vue. Idrissou est remplacé par Olinga, qui a apporté de la vivacité, de l’allant, de la provocation. Récompensé par un but. Le dernier changement est incompréhensible : l’entrée de Matip à la place d’Alexandre Song, autant dire pour un poste à peu d’impact alors que le match était joué. On peut se poser la question de savoir pourquoi Akono a gardé une défense à 4, alors qu’il n’y avait pas d’attaquants en face. D’autre part, avec Nkoulou et Kana Biyik, on a des joueurs qui sont puissants et véloces, donc peuvent aller au duel en vitesse sur contre. Donc, on aurait pu imaginer sortir un ou deux latéraux pour des joueurs un plus offensifs. Par exemple, Gaetan Bong, qui a déjà joué milieu gauche (voire Olinga) à la place de Womé. De la vécité, du tonus et un bon pied gauche. De même, à droite, Aboubakar aurait pu être une alternative dès la mi-temps à Angbwa qui n’avait pas d’adversaire. Avec la présence de Song, en utilisant les mêmes joueurs, on aurait pu se retrouver avec un 3-4-3, capable de muter en phase défensive. Les joueurs : Eto’o n’est pas Milla Dans une rencontre comme celle-là, difficile de ressortir des performances individuelles; l’équipe camerounaise n’ayant jamais mis la folie dans le jeu qu’aurait nécessité cette rencontre. Mais, la défense centrale Nkoulou – Kana a veillé au grain, coupant les trajectoires de contre et ne perdant aucun duel. On peut juste leur reprocher de ne pas avoir tenté de s’intercaler dans la ligne du milieu avec le ballon en première mi-temps. Au milieu, Makoun a joué juste, essayant d’accélerer le jeu, avec un jeu à une touche, Emana a beaucoup tenté, mais a porté souvent le ballon. Achille Webo a joué 90 minutes, enfin il parait, parce qu’on se demande encore s’il était là. Idrissou a été dépassé et quand il a eu le ballon, a fait les mauvais choix. Olinga a fait une bonne entrée, faisant en vingt minutes plus d’appels que les trois attaquants réunis durant la rencontre. Samuel Eto’o a été celui qu’on n’aime pas voir quand il joue avec les Lions. Il a souvent décroché, a joué arrêté, et n’a été que rarement dangereux. Son seul geste à la hauteur de son talent n’a pas eu le sort qu’il méritait, le poteau suppléant au gardien adverse. Mais, son match confirme une nouvelle fois qu’il n’est pas aussi décisif en équipe nationale qu’avec ses clubs respectifs. Comme en 2005 contre l’Egypte, 2010 contre la RD Congo à Garoua, 2011 contre le Sénégal, il n’a pas apporté l’exploit qui aurait permis de débloquer la situation. Et comme lors de toutes ses rencontres à enjeu, il a disparu au fil de la rencontre. Roger Milla, Patrick Mboma répondaient toujours en sélection le jour J, même s’ils étaient moins bien en club. Sans remettre en cause son talent, le capitaine Eto’o n’a pas réussi à mener sa barque. Une nouvelle fois. Le coach A l’image de sa communication depuis un mois, le coach a été mauvais. Sa composition d’équipe a fait la part belle à l’expérience, tout en concentrant les mêmes problèmes que sa dévancière : trop de joueurs d’axe, pas assez de profil technique. Résultat, un jeu statique et le sentiment de ne pas avoir compris les enjeux du match. Avec une équipe bâtie pour attendre, là où il fallait du liant. Aucune approche tactique, des changements tardifs et sans réelle modification de jeu, et au final, même aucune hargne sur le banc de touche. Aucun caractère, ce qui est censé être sa force. Au final, un match mal engagé, avec une mise en place défaillante, en tout cas inadaptée à l’objectif de la mission, c’est-à-dire de remporter le match par un gros écart. Des faillites individuelles, peu de caractère avec une génération en bout de route. Un match à oublier…. Joseph Djomo