En d’autres temps, le Sénégal, malgré sa bonne tenue dans cette Coupe d’Afrique des Nations, devait faire des cauchemars à l’idée de trouver le Cameroun sur son chemin. L’exemple le plus vivace est celui de la finale de la CAN 2002 au Mali ou la planète entière avait manqué du respect aux Lions Indomptables, en donnant gagnant, avant le début de la rencontre, le Sénégal.
La génération Mboma – Eto’o – Foé – Gérémi, avait d’abord tenu en respect l’équipe alors portée par le sélectionneur actuel du Sénégal, avant de remporter la séance des pénaltys suite à un tir de Aliou Cissé stoppé par le gardien camerounais Alioum Boukar.
Le Cameroun sera t-il en mesure de rééditer cet exploit? Certains dirigeants expliquent que les Lions ont déjà atteint leur objectif et que toute autre chose ne serait qu’un bonus. Balivernes. On ne va pas en guerre dans le but de perdre. Le Cameroun en a t-il les moyens ?
Le groupe dispose de ressources techniques, tactiques et d’expériences capable de rivaliser avec n’importe quelle autre équipe. Mais la mauvaise gestion du groupe peut jouer contre les Lions Indomptables qui ont choisi de fragiliser leur meilleur duo offensif, Clinton Njié et Aboubakar Vincent.
La position d’attaquant en est une qui demande d’avoir des hommes en pleine confiance. Et un joueur en confiance, même en petite condition rend généralement des services insoupçonnés au groupe. Avant de les choisir, Hugo Broos s’était certainement rendu compte que ces deux joueurs ne passaient pas les meilleurs moments de leur carrière. Clinton Njié, a connu une année 2016 horrible à cause des blessures. Son début d’année n’a non pas été épargné puisqu’il n’aura pas suivi de phase de préparation complète. Son activité sur le flanc, sa vitesse de percussion, auraient dus être des armes redoutables pour cette équipe.
Pour ce qui est de Aboubakar Vincent, il faut reconnaître qu’il a été fragilisé dans son club, après le changement d’entraîneur l’année dernière. Puis il a été mis sur la liste des départs, et a été expédié en prêt en Turquie. Il faut reconnaître qu’il dispose d’un volume de jeu incroyable et est le seul vrai attaquant de pointe dont dispose le groupe. Avant l’unique occasion de but qu’il rate face au Burkina Faso, une occasion lumineuse, à moins d’être un analyste du dimanche, son match était un modèle pour tous les avant-centres. Sa présence devant la surface de réparation mobilise à elle seule au moins deux défenseurs, sans compter un des milieux récupérateurs qui ne s’éloigne pas. Cette force d’attraction, ne serait-ce de par son nom, permet ainsi aux autres attaquants et milieux de terrain d’avoir de l’espace pour se mouvoir, pour créer. Les vrais tacticiens comprennent que la chose la plus difficile, dans le football moderne, est de se créer des occasions de but. Quand il joue, Aboubakar Vincent se met dans les dispositions pour recevoir les balles. On voit donc des occasions de but, des occasions claires. Peut-être ne les met-il pas dedans, mais les occasions existent.
Sans nier les qualités intrinsèques des joueurs utilisés à cette position par Hugo Broos, c’est quand même surprenant qu’en pratiquement 2 matchs pleins, qu’ils ne se soient pas mis dans les dispositions pour attirer des occasions de but. Zéro. Nada. Ils ont plutôt d’autres qualités, qui leur permettent plutôt d’appuyer l’avant-centre principal.
Mis à part le but sur coup franc de Benjamin Moukandjo, c’est la barraca de nos milieux de terrain qui a permis au Cameroun de marquer ses deux seuls autres buts de la compétition. Contre le Sénégal, ils auront plein les bras avec la brigade offensive sénégalaise et méritent d’avoir de vrais attaquants et un bon plan de match pour aider à garder occupé l’arrière-garde adverse.
Hugo Broos est quand même un type surprenant quand on sait qu’il a été joueur, et entraîneur en Europe. Le football certes, est en constante évolution et un bon entraîneur des années 90, ou 2000, s’il ne se met pas à niveau en permanence, n’aura plus de compétence suffisante pour aider un groupe. On insiste désormais sur les qualités de motivateur, de psychologue reliées au métier de coach. Et c’est encore vrai dans le quotidien d’une compétition comme celle de la Coupe d’Afrique des Nations. Claude LeRoy n’avait-il pas fait croire à Omam-Biyik en 1988 qu’il serait dans cinq ans le meilleur attaquant du monde devant Rudi Voeller, Ruud Gullit et Marco Van Basten ? Et cela a presque marché. À Hugo Broos de trouver sa formule.
Et pourquoi pas appeler le coach Christian Gourcuff qui a été instrumental dans la carrière de Vincent Aboubakar pour savoir comment mieux le « gérer » le temps de cette compétition? On ne gère pas Ndip També comme on gère Samuel Eto’o, ni Mboma comme on gère Aboubakar. Il faut trouver le meilleur moyen de mettre ses joueurs d’impact dans de bonnes conditions de réussite.
Quand un coach sort un joueur clé pour le punir pour une occasion de but raté, c’est qu’il est clairement en situation de panique ou en manque de compréhension. Pierre Emerick-Aubameyang a raté une situation très évidente dans le dernier match du Gabon sans que son sélectionneur ne perde confiance en sa capacité à faire la différence. Hugo Broos a erré dans cette situation. Il a désormais quatre jours pour convaincre et pour montrer aux yeux du monde qu’il est de la trempe des grands sélectionneurs.