Le président de la fédération camerounaise de football a fait une sortie dans le média public Cameroon-Tribune pour expliquer les décisions que l’instance qu’il dirige a prise par rapport à la décision du Tribunal Arbitral des Sports sur l’affaire qui l’opposait contre la Ligue de Football Professionnel du Cameroun. Si la décision antérieure de suspendre la Ligue il y a un an, a été renversée, Mbombo Njoya saute sur les collatéraux de la mise au rencart de la LFPC pour justifier la quasi-tutelle qu’il est en train d’imposer à cet organe.
Sans attendre la fin du mandat du Général Semengué qui a depassé la limite d’âge (75 ans), limitation qui a d’ailleurs été décidée alors qu’il était déjà en poste, la Fécafoot estime que ne pas exiger sa démission est une faveur en direction de l’ancien chef de l’armée.
Avec une année sans activité, plusieurs membres du Conseil d’Administration n’aurait plus qualité pour siéger. Ce Conseil aurait dû être réamenagé si la Ligue avait fonctionné normalement et c’est la décision de la Fécafoot de la suspendre qui est à l’origine de cette situation. Mais Mbombo Njoya n’a pas la même lecture et justifie des décisions qui vont à l’encontre de ses propres statuts, telles que la décision de nommer un Secrétaire Général sans attendre la proposition de la Ligue.
Voici l’intégralité de l’interview qu’il a accordé à Cameroon-Tribune
La Fecafoot a pris certaines décisions quant à l’avenir de la Ligue lors de sa dernière assemblée générale. Peut-on penser qu’elle applique la sentence du TAS à sa manière, tout en gardant la main mise sur cette structure placée sous sa tutelle ?
La Fecafoot a accepté d’appliquer la sentence du TAS. Il n’y a pas d’ambiguïté à entretenir à ce sujet. C’est le sens des résolutions du Comité exécutif et de l’assemblée générale des 24 et 25 septembre 2020. En revanche, les suites de l’application de cette sentence ouvrent le chapitre du fonctionnement de la LFPC qui apparaît donc paralysée, incapable de mobiliser ses organes pour arrêter les modalités de démarrage de la saison 2020/2021. Le mandat du président est échu, de même que celui du conseil d’administration. La majorité des membres de ce conseil d’administration, organe exécutif, n’ont plus qualité pour siéger, ce qui fait courir le risque que toute décision prise par cette instance en l’état soit attaquable. Je parle là du règlement des compétitions et d’autres décisions indispensables au fonctionnement de la LFPC et à l’organisation de ses compétitions. En tant qu’institution faîtière, créatrice de la LFPC, la FECAFOOT a le devoir de s’assurer qu’une gouvernance minimale acceptable prévaut à la LFPC pour lui permettre de jouir du mandat d’organisation et de gestion du football professionnel.
Le président Pierre Semengue a rejeté ces décisions de l’AG concernant la Ligue, et même celle concernant la nomination d’un SG par la Fecafoot. Que se passe-t-il maintenant ?
Ces résolutions ont été prises en Comité exécutif de la Fecafoot dont le président de la LFPC est membre de droit et le procès-verbal des travaux indiquent qu’il a été signé par tous les membres présents, y compris le Général Pierre Semengue. Ces résolutions ont été présentées à l’A.G. de la Fecafoot où siègent dix représentants de la LFPC, et elle les a adoptées. Cette adhésion quasi-générale des acteurs se justifie par la pertinence et la justesse de l’Accord trouvé pour repartir sur des bases saines et solides à la LFPC. Nous allons donc le mettre en œuvre.
La nomination du SG de la LFPC par le président de la Fecafoot est issue du compromis du 25 septembre 2020 avec la LFPC. Et dans un compromis, on ne gagne pas sur toute la ligne. L’assemblée générale de la FECAFOOT a introduit une dérogation sur le critère d’âge qui aurait écarté le Général Semengue, en acceptant qu’il préside la LFPC alors qu’il a plus de 75 ans, ce qui n’est contesté par personne. Mais aussi, dans cet accord validé, il est indiqué que la nomination du SG de la LFPC est faite directement par le président de la Fecafoot par « souci d’économie des procédures ». Dans un accord, on ne doit pas uniquement conserver ce qui nous arrange.
On semble clairement courir vers une situation de blocage qui pénalisera la reprise des différents championnats…
Le redémarrage des championnats professionnels est notre objectif. Toutes les résolutions prises ne concourent qu’à cet objectif. Je dois d’ailleurs rappeler que jusqu’à ce que la sentence du TAS intervienne, nous avions déjà quasiment bouclé les préparatifs de la nouvelle saison. Nous sommes conscients que le CHAN est devant nous et chaque jour nous en rapproche. Je reste persuadé que l’accord qui a été accepté par les deux parties et adopté par l’AG, organe suprême et souverain, sera respecté.
Que faut-il faire pour que la saison écoulée ne tombe pas à l’eau et que les représentants du Cameroun en Coupes africaines ne soient pas contestés par leurs adversaires ?
Les deux représentants du Cameroun aux compétitions interclubs de la CAF (PWD de Bamenda pour la Champions League et Coton Sport pour la coupe de la Confédération) ont été désignés par le Comité exécutif de la FECAFOOT et acceptés par la CAF. De notre point de vue, il n’y a plus de souci à se faire car nous avons respecté les directives CAF publiées en août 2020 à ce sujet. Vous comprendrez que pour nous, la saison écoulée compte. C’est le sens de la continuité prônée par tous les acteurs y compris le ministère des Sports et de l’Education physique.
La paix des braves est-elle vraiment impossible entre la Fecafoot et la LFPC ?
Nous avons fait la démarche qu’il fallait et nous sommes parvenus à un consensus le 25 septembre avec la LFPC. Notre bonne foi est évidente et patente. Il n’est pas uniquement question, pour la Fecafoot, d’une paix des braves, mais de poser les jalons d’un fonctionnement optimal et durable de notre football professionnel. La confiance doit revenir dans cette Ligue sur laquelle le milieu du football a fondé de nombreux espoirs à sa création par la Fecafoot en mai 2011. Pendant l’année du Comité technique transitoire (CTT), nous avons vu l’engouement des spectateurs et des sponsors autour du football professionnel, ce qui nous a conforté dans la conviction qu’un minimum de bonne organisation nous propulserait parmi les meilleurs en Afrique.
L’intérêt supérieur du football camerounais déjà assez malmené n’impose-t-il pas aujourd’hui des compromis supplémentaires pour sortir de cette autre crise ?
Les compromis fonctionnent quand les parties sont de bonne foi. Nous avons montré la bonne foi de la Fecafoot : nous avons appliqué la sentence alors que nous pouvions nous pourvoir auprès du tribunal fédéral suisse, nous avons dérogé à nos textes en permettant au Général Pierre Semengue de demeurer à la tête de la LFPC au-delà de 75 ans. La Fecafoot est prête à mettre à la disposition de la LFPC tout le dispositif préparatoire de la nouvelle saison. Nous attendons une preuve similaire de bonne foi de la part du président de la LFPC. Je peux vous assurer que la judiciarisation du sport et du football en particulier est un crève-cœur pour moi. C’est un très sérieux frein au développement et à la promotion du football qui cause d’importants dommages à la jeunesse sportive. Près d’un milliard (930 millions exactement) perdu en frais de procédures juridiques depuis 2015, qui aurait pu être investi au bénéfice des acteurs du football.