Sur demande du nouvel avocat de Abdouraman Hamadou, Président de Étoile Filante de Garoua, le Secrétaire Général du TAS, Matthieu REEB, a fait une entrée remarquée dans la procédure qui oppose le club du septentrion à sa fédération de tutelle. Les termes utilisés sont simplement forts: « vide juridique et situation de vacance à la présidence de la FÉCAFOOT »?
Ce constat vient contredire le précédent échange de courrier où Fabien Cagneux, Conseiller auprès du TAS, avait accepté de faire de Tombi A Roko, le président de la FÉCAFOOT suite à une correspondance avec la FIFA qui reconnait le pouvoir en place.
Abdouraman conteste la FIFA, le TAS calme ses ardeurs
Mais que s’est-il passé entre temps?
Abdouraman Hamadou a réussi à convaincre un avocat redoutable, redouté par les instances internationales puisque les procès gagnés, il les accumule. Il a d’ailleurs été le premier à gagner un procès contre le TAS en 2007. Et Me Aguet a pris les choses en main, et a envoyé une demande musclée non pas adressée à Fabien Cagneux qui avait reconnu de facto Tombi comme interlocuteur de la FECAFOOT:
« Monsieur le Secrétaire général du TAS, cher Confrère, Agissant par ces lignes au nom et pour le compte du club de football camerounais Etoile Filante de Garoua, je sollicite votre intervention aux fins de corriger le tir dans la procédure qui oppose cette dernière la Fédération Camerounaise de Football, dont votre collaborateur M. Fabien Cagneux a actuellement la charge. Par courrier séparé dont copie ci-jointe sans ses annexes, je sollicite également l’intervention du CIAS, autorité chargée de superviser les activités du greffe du TAS (art. S6 S 7 du Code). «
Comme entrée en matière, c’en est toute une. Flairant une possibilité de coup fourré, Me Aguet veut s’assurer que cette procédure va être traitée selon les normes les plus transparentes. Il s’est aussi assuré que la procédure sera mise sous observation du bureau chargé de vérifier les activités du greffier.
Et il prendra le temps d’expliquer l’objet du litige, pour faire court, de manière à ce que le Secrétaire Général soit rapidement au fait.
Dans cet exposé, le CNO camerounais est aussi pris à partie à partir du moment où elle a annulé l’élection, mais a refusé de se prononcer sur la réquisition faite par Étoile Filante afin que l’ancien comité exécutif « réintègre ses fonctions jusqu’à ce que des nouvelles élections soient organisées et qu’elles aboutissent « .
« Bien qu’il ait reçu la sentence NO 014/SA/CCA/15, définitive sur la nullité de l’élection de M. Tombi A. Roko, M. Cagneux a cru utile de solliciter l’avis de la FIFA pour savoir qui des deux Messieurs susmentionnés avait le pouvoir de représenter la fédération intimée.
Le 2 mars 2016, la FIFA a indiqué qu’elle considérait que M. Tombi A. Roko était le président de la Fédération Camerounaise de Football (annexe 9).
Depuis le 3 mars 2016, sur la base de cet avis sorti d’un chapeau, M. Cagneux reconnait à un pseudo-président de fédération «élu» par des élections nulles la qualité de représentant légitime de la fédération intimée la procédure TAS
Hier 22 mars 2016, M. Cagneux a sollicité que l’appelante se détermine sur la désignation de Me Francois Klein en qualité d’arbitre (annexe Il).
Ma mandante s’oppose évidemment à ce qu’un arbitre désigné par M. Tombi A. Roko siège dans le cadre de cette procédure, parce que cette désignation est le fait d’un falsus procurator, de sorte que si l’arbitrage se tient dans pareilles conditions, la formatlon ne seralt pas valablement constituée (ce qui viole l’art. 190 al. 2 let. a et/ou b LDIP, arrét n.p. du 17 janvier 2013, consid. 4.3.3).
Vous admettrez qu’un conseiller du TAS ne saurait reconnaître à quiconque la qualité de représenter une partie à un arbitrage d’appel (la preuve des pouvoirs de représentation d’une fédération doit étre apportée par une pièce, par exemple un extrait du registre du commerce, un extrait des statuts ou une décision de l’association concernée, voire encore par un jugement du juge du siege et certainement pas par un témoignage écrit de la FIFA contredisant une sentence arbitrale interne entrée en force).
Vous admettrez aussi qu’en l’espèce, le pseudo-représentant de la fédération intimée n’a aucun pouvoir (annexe l).
Plus grave encore, la « décision » de M. Cagneux prive d’objet l’appel de ma mandante : si le greffe du TAS admet qu’un falsus procurator ait le pouvoir de représenter la fédération intimée, on voit mal pour quelle raison ce Monsieur ne pourrait pas persister à usurper le titre de président jusqu’à la fin des prochaines élections ».
Pour s’assurer de retenir l’attention du SG du TAS, Me Aguet, redoutable spécimen, va y glisser un ultimatum diplomatique pour s’assurer que le haut fonctionnaire va placer sa demande au haut de sa liste de priorité:
« Ma mandante sollicite de votre part que vous imposiez à votre conseiller qu’il respecte la sentence du CNO du Cameroun du 12 novembre 2015, sans quoi ma mandante n’aura d’autre choix que de saisir le Tribunal fédéral pour faire en sorte que la procédure arbitrale ne soit pas viciée. Dans la mesure où c’est par courrier du 3 mars 2015 que M. Cagneux a «reconnu» les pseudo-pouvoirs de M. Tombi A. Roko et que le délai de recours au Tribunal fédéral est de 30 jours, une prise de position très rapide m’obligerait ».
Dans sa réponse quelques jours plus tard, le SG du TAS a tenté de réorienter la procédure, pour éviter que toute décision qui y sortira ne sera pas contestée:
« Etant souvent en déplacement l’étranger ces derniers temps, je n’ai pas eu l’occasion d ‘examiner tous les détails de cette procédure mais, sur la base du contenu de votre lettre, je peux déjà y répondre comme suit.
La question de l’identité du Président de la FECAFOOT est manifestement au cœur de ce litige, ce qui a évidemment une influence sur la représentation de la FECAFOOT dans cet arbitrage. Sur la base de vos informations, je comprends que la Chambre d’ Arbitrage du CNO camerounais a annulé l’élection du Président de la FECAFOOT du 12 novembre 2015 mais n’a pas statué sur la question de la présidence par intérim, créant apparemment un vide juridique et une situation de Vacance à la présidence de la FECAFOOT.
Il est absolument essentiel pour le TAS de pouvoir identifier avec exactitude l’identité des représentants de la Fédération intimée afin que la sentence arbitrale ne puisse pas être attaquée ou qu’elle ne soit pas tout simplement inopérante. C’était l’unique préoccupation de mon collaborateur Me Fabien Cagneux qui a fait quelques consultations afin de tenter de débloquer la situation sur un plan pratique. Bien évidemment, il n’a pas eu l’intention de « prendre position » dans cette affaire.
Il est évident que la question de la légitimité passive dans cette procédure arbitrale est une question qui devra, en fin de compte, être examinée par la Formation arbitrale. Mais il faut pour cela qu’une Formation arbitrale puisse effectivement être constituée sans que le ou les arbitres nommés ne puissent être contesté dès le départ ».
Cette affaire semble relancée. Et promet encore des développements intéressants.
Muna Belinga