Il y a 32 ans le Cameroun devenait la première nation africaine à atteindre les quarts de finale d’une Coupe du monde. Entre préparation controversée, interventions présidentielles et affaire de primes, les Lions ont marqué l’histoire en Italie 1990.
Un sélectionneur russe qui ne parle pas un seul mot français, un attaquant de 38 ans sorti de sa retraite, un bataillon de joueurs prêts à laisser leur sang dans les stades, trois gardiens de classe qui cachent mal leurs rivalités… C’est avec ce cocktail pour le moins « explosif » que le Cameroun s’est pointé en Italie, à l’occasion de la Coupe du monde de football 1990. Equipe présumée la plus faible sur le papier, la nation vert-rouge-jaune a créé la surprise en hissant l’Afrique pour la première fois en quarts de finale d’un Mondial. Et pourtant, ce ne fut pas si simple.
8 juin 90 : les Lions jonglent avec leur destin
L’histoire remonte au printemps 1990. Les fans camerounais ne croient plus vraiment en leurs Lions devenus « domptables ». La Coupe d’Afrique des Nations, disputée en janvier en Algérie s’est arrêtée au premier tour pour les champions en titre. De retour d’un stage rongé par les faits divers en Yougoslavie, Valeri Nepomniachi et ses hommes se rendent en Italie, pour disputer le deuxième Mondial de leur histoire. Le tirage au sort, effectué le 9 décembre 1989 n’a pas été clément envers eux. Stephen Tataw et ses coéquipiers vont évoluer dans le même groupe que l’Argentine, championne du monde en titre, l’URSS, finaliste de l’Euro 1988 et la Roumanie. Les commentateurs sportifs sont unanimes : le Cameroun ne fera pas plus d’une semaine en terre italienne.
L’aventure commence donc officiellement le 8 juin. Les Camerounais ont rendez-vous avec l’Argentine en ouverture du tournoi. La légende raconte que tous les pronostics donnaient Diego Maradona et sa redoutable équipe, vainqueurs. Même les Camerounais avaient du mal à croire que le destin pourrait en être autrement. Enfin, tous le pensaient, excepté un seul : le Chef de l’Etat. Envahi par une sorte d’assurance inébranlable, le Président Paul Biya apparait rassuré, optimiste, au stade San Siro où il a décidé de vivre la rencontre en direct.
L’heure du coup d’envoi approche. Sur la pelouse, la super star Maradona amuse la galerie avec quelques jonglages. Mais ce qu’il ignore, c’est que la présence du premier sportif camerounais dans les tribunes va suffire pour booster les Lions. « Quand on a lancé nos cris de guerre, on a senti une certaine peur chez eux. À ce moment-là, on se dit qu’il y a quelque chose à faire. On a gagné la bataille psychologique », a souvent raconté le milieu camerounais Armel Kana-Biyik.
La rencontre a démarré. Les champions du monde en titre déchantent face à des Camerounais très affûtés physiquement. Et alors qu’on joue la 67e minute, François Omam Biyik s’envole dans les airs pour reprendre un ballon de la tête. La balle file droit dans les buts à la vitesse d’une fusée (1-0). Il n’en faudra pas plus aux Lions pour s’imposer. A cet instant, le monde du football s’est pris une claque : le Cameroun, petit poucet du Groupe, venait de renverser le tenant du titre.
23 juin 90 : Milla entre dans la légende
Dans la tanière, cette victoire donne des ailes. Les Lions Indomptables comprendre à réaliser qu’ils peuvent réellement déjouer les pronostics. Seulement, leur deuxième sortie est un supplice : ils tombent devant l’Union Soviétique qui l’emporte 4 buts contre 0. Mais les ambassadeurs africains ne baissent pas pour autant les bras. Les crocs toujours acérés, les griffes bien en évidence, les Lions repartent à la chasse et l’un d’entre eux se met en évidence : Roger Milla. L’avant-centre de 38 ans qualifie son pays pour les huitièmes de finale en inscrivant un doublé face à la Roumanie (2-1).
Le joueur le plus âgé de la compétition récidive face à la Colombie le 23 juin, en signant notamment un but d’anthologie, au nez et à la barbe d’un José René Higuita dégoûté par les pas de danse de son bourreau. Cela fait 32 ans aujourd’hui que le monde se remémore cette victoire historique. L’aventure camerounaise prend fin aux portes du dernier carré. Mais le souvenir de ces Lions, premiers quarts-de-finalistes africains de l’histoire, est appelé à ne jamais mourir.
Les 23 Lions Indomptables du Mondial 1990
Gardiens de but : Thomas Nkono, Joseph Antoine Bell, Jacques Songo’o
Défenseurs : Jules Dénis Onana, Benjamin Massing, Bertin Ebwellé, Emmanuel Kunde, Stephen Tataw, Alphonse Youmbi, Ndip Akem
Milieux de terrain : André Kana-Biyik, Emile Mbouh, Jean-Claude Pagal, Thomas Libiih, Roger Feutmba, Cyrile Makanaky, Emmanuel Maboang Kessack
Attaquants : François Omam Biyik, Roger Milla, Louis Paul Mfédé, Eugène Ekeke, Bonaventure Ndjonkep
Entraîneur : Valeri Nepomniachi