Face à l’Etat démissionnaire de ses missions régaliennes, un bienfaiteur vient de décider de faire de la ville de Mbouda un carrefour des sports. Il a fait sortir du sol un gymnase olympique qui a coûté près de 150 millions de francs Cfa. Le souci de Jean Paul Foundjio, l’initiateur de ce projet, est d’assurer l’intégration sociale des jeunes désœuvrés et d’offrir aux sportifs camerounais un cadre répondant aux normes internationales pour la pratique de certains sports, notamment ceux de combat.
Construit sur une superficie de près de 1000 m2, le gymnase olympique de Mbouda est un grand complexe bâti sur deux niveaux, où plusieurs sports seront pratiqués au quotidien. On y retrouve entre autre, un ring aux dimensions olympiques, soit 8m par 8 et entre corde 7m par 7. Jean Paul Foundjio a pour priorité, après l’inauguration du complexe (avant la fin de l’année), l’organisation chaque samedi d’un gala de boxe qui sera diffusé sur les antennes d’une chaîne de télévision privée basée au Cameroun. Ceci de façon à mettre au pas les athlètes qui seront formés, pour la plus part gratuitement, pour des compétitions olympiques. La salle de combat a une capacité de 800 places assises. «Les chaises, modernes, sont déjà là et vous pouvez les voir», se félicite Jean Paul F. , maître d’arts martiaux et DG de “Smart” (ligne de vêtement sportif) basé à Paris.
En plus du ring, le plus moderne du pays (celui de la salle de l’Unité de Yaoundé datant de 1976, un don canadien après les JO de Montréal 76), il y a un dojo olympique, encore appelé le tatami, de 400m2, pour la pratique du judo. Ici, est également envisagée la formation des équipes de lutte, de judo, de boxe, du taekwondo, du karaté et de la gymnastique afin de multiplier les chances du Cameroun de remporter plus de médailles et de lauriers dans les compétitions internationales et notamment lors des différents jeux olympiques.
A côté, on a un atelier pour le cardio training, composé des appareils pour le renfort musculaire, des vélos, des rameurs, un atelier de gymnastique où le « sep » sera pratiqué sous la conduite d’un professeur d’éducation physique et sportive. Le tout est couronné par des vestiaires modernes et des toilettes pour hommes et femmes. Tout le matériel en provenance d’Europe a été acheminé dans la ville de Mbouda et le complexe est en train d’être habillé à travers les travaux de finition : peinture, revêtement du sol, carreaux, lumière, etc.
En dehors de l’aspect purement sportif, Jean Paul Foundjio, le promoteur du complexe, a pensé mettre sur pied des structures qui peuvent faire rêver les populations de la ville de Mbouda, cité carrefour se trouvant à cheval entre les capitales du Nord-Ouest (Bamenda) et de l’Ouest (Bafoussam). C’est dans ce sillage qu’on compte parmi les compartiments du complexe une salle prévue pour abriter un cybercafé, un office du tourisme, un magasin Smart où les sportifs pourront trouver de quoi s’habiller.
Un bar-restaurant olympique pour visiteurs et sportifs n’est pas en reste. «A Mbouda il n’y a pas de restaurant digne de ce nom. Quelquefois, quand des amis arrivent ici, on est obligé de les amener à Bafoussam pour les faire manger alors que Mbouda est paradoxalement le grenier du Cameroun. Ce restaurant qui est en plein air peut faire 160 couverts. Ceux qui veulent s’oxygéner peuvent venir prendre leur repas sur une terrasse bien aérée», conte Mr. Foundjio, ancien boxeur aujourd’hui l’habilleur officiel des clubs de D1. Ce restaurant bar sera davantage élargi, en capacité d’accueil, dans la mesure où des pavés ont été posés dans la grande cour en vue d’une buvette.
Le côté hébergement n’a pas été oublié. A l’arrière plan du complexe, il a été construit des chambres pouvant accueillir des compétiteurs et leurs encadreurs. Le promoteur dit avoir l’intention de très souvent organiser des compétitions internationales pour lesquelles il pourrait amener ses amis de la France et d’ailleurs. «J’ai souhaité les loger sur le site même. Cet hébergement a une capacité de 30 lits. Les équipes de football aussi qui viennent jouer à l’Ouest peuvent également loger en toute sécurité dans le complexe, manger diététique dans notre restaurant, faire du renfort musculaire dans notre salle de gymnastique», a pensé Jean Paul qui doit faciliter le transport des compétiteurs ou des personnes qui logent dans le complexe par l’acquisition d’un mini-bus. De quoi faire encore plus rêver la population locale, déjà très fier de la construction du stade de Mbouda (en finition), co-financé par MTN et la Fecafoot.
Blaise Nwafo à Mbouda
Hors-jeu
Un gymnase, un nom : Gymnase olympique Woumbé Sop Fofou
Le promoteur du complexe a bien voulu inscrire le nom de son père, feu Woumbé Sop Fofou, un martyr passé inaperçu, dans la mémoire collective.
C’est avec un petit pincement au cœur que Jean Paul Foundjio, directeur de la société Smart et promoteur du gymnase de Mbouda se prononce sur le nom qu’il a bien voulu donner à son complexe. Pour lui, «c’est pour réparer une injustice dont ma famille a été victime. C’est une histoire triste. Woumbé Sop Fofou c’est un homme qui devait être très connu au Cameroun parce qu’il est un martyr. C’est l’homme qui a par exemple introduit la culture du café au Cameroun, la culture du tabac et des arachides venus de Ngaoundéré dans les Bamboutos.»
En remontant l’histoire de cet homme, il ressort qu’en 1959, quand le président de la république, feu Ahidjo, a entendu parler de Woumbé Sop Fofou, il a fait le déplacement de Mbouda, pour la toute première fois, en date du date du 14 juillet. Lors de cette visite, Woumbé Sop Fofou a été décoré par le président de la république.
«Le soir même du 14 juillet 1959, ceux qu’on appelait à l’époque des rebelles ont organisé une expédition punitive au domicile de Woumbé Sop Fofou et l’ont assassiné. Ils estimaient qu’il était un traître pour avoir reçu une médaille des mains de Ahidjo. Non seulement ils l’ont assassiné mais aussi ils l’ont décapité», raconte Mr. Foundjio.
L’histoire relate que ce jour là, quand les rebelles ont rencontré Woumbé Sop Fofou, il était couché dans son lit avec un bébé qui avait à peine un an. Et ce bébé là c’était Jean Paul Foundjio. A un moment donné, ils ont aussi voulu assassiner le bébé avant de se raviser. Car raconte t-on, quand ils sont arrivés, ils ont pris le bébé et l’ont jeté. Et c’est quand Woumbé s’est levé pour porter secours à son bébé que ses assaillants lui ont assené des coups de couteau et l’ont décapité. En partant, ils ont même mis le feu à ses vêtements dans le but de l’effacer définitivement, son histoire y compris.
De sources concordantes, quand le président Ahidjo à l’époque a appris que le monsieur qu’il venait de décorer avait été assassiné, il n’a pas du tout réagi. Et aucune autorité ne s’est non plus jamais posée la question de savoir ce qu’était devenue la famille. D’où le désarroi de son fils: «C’est un homme qui est mort pour le Cameroun et pour rien. Généralement quand on parle des martyrs de la république, on ne parle que des hommes politiques qui étaient au pouvoir et ceux qui cherchaient à prendre leur place, c’est tout. On oublie qu’il y a eu des vrais gens qui ne faisaient pas de politique mais qui oeuvraient positivement pour la république.»
Sur le pourquoi de ce nom à mon complexe, Jean Paul Foundjio croit savoir que «c’est que chaque fois je me pose la question de savoir si je n’avais pas été là pour empêcher sa fuite, peut- être il aurait pu se sauver et sauver sa vie. Je me culpabilise un peu et je me dis tiens j’ai dû gêner sa fuite et il est mort pour me protéger. C’est pour lui témoigner mon affection et ma gratitude. J’ai pris sur moi de donner son nom à ce grand complexe sportif pour en ma manière inscrire son nom dans la mémoire collective.» Une manière aussi de rappeler aux populations des Bamboutos qu’a vécu sur leur terre un martyr laissé dans les oubliettes qui a beaucoup œuvré pour leur développement. Surtout dans le sens du dynamisme pour lequel on les connaît le plus.
Francis Kamga à Mbouda