« Je compte beaucoup sur le prochain entraîneur pour qu’il restaure la discipline au sein de l’équipe. Ce qui se fera bien évidemment avec notre concours. L’entraîneur est la pièce maîtresse d’une équipe. Et dès que le prochain sera nommé, il devra essayer d’aller à travers le Cameroun, l’Europe, voir l’Asie où nous avons désormais des joueurs, afin de choisir ceux qu’il estime pouvoir faire partie de l’équipe nationale. »
Qu’est-ce qui va se passer après la résiliation, il y a une semaine, du contrat de Winfried Schäfer, l’ex entraîneur de l’équipe nationale de football ?
Ce qui va se passer est très simple : tout le monde sait que quand vous résiliez un contrat comme celui-là, il faut rapidement trouver un remplaçant à celui qui est parti. Parce qu’on conçoit mal qu’une équipe nationale soit sans entraîneur. Nous allons donc pouvoir, nous l’espérons, trouver un entraîneur dans les jours ou les semaines à venir.
Quel est le profil de l’entraîneur recherché ?
Ce devrait être quelqu’un qui connaît son métier, qui est qualifié pour être entraîneur de football de haut niveau. Mais quelqu’un également qui a une expérience avérée en la matière, c’est-à-dire qui a quand même eu à entraîner des équipes de football professionnelles, de préférence. En plus, il faudrait qu’il connaisse l’Afrique et son environnement. Mais ceci n’est pas une contrainte, encore moins une exigence particulière. Ce qui est important, c’est que ce soit quelqu’un qui a une bonne formation d’entraîneur, qui possède une expérience, qui a déjà eu à diriger une équipe de première ou de deuxième division. Il faudrait également que ce soit un rassembleur d’hommes, quelqu’un qui a une certaine autorité, qui peut apporter la cohésion et la discipline dans cette sélection, car l’entraîneur est la personne qui est, au premier chef, responsable de la discipline dans une équipe.
A vous entendre, nous avons l’impression que les recherches sont orientées vers des entraîneurs expatriés…
Pas forcément. Notre équipe nationale a déjà été dirigée par des entraîneurs locaux (Jules Nyonga, Jean-Paul Akono, etc). Je n’ai pas de préjugés là-dessus.
Vous parlez de restaurer la discipline au sein de l’équipe nationale. Après avoir limogé l’entraîneur, est-ce qu’il y a des mesures qui seront prises dans ce sens ?
Dans notre situation, il fallait commencer par l’entraîneur et c’est ce que nous avons fait. Je compte beaucoup sur le prochain entraîneur pour qu’il restaure la discipline au sein de l’équipe. Ce qui se fera bien évidemment avec notre concours. L’entraîneur est la pièce maîtresse d’une équipe. Et dès que le prochain sera nommé, il devra essayer d’aller à travers le Cameroun, l’Europe, voir l’Asie où nous avons désormais des joueurs, afin de choisir ceux qu’il estime pouvoir faire partie de l’équipe nationale. Et à partir de là, il va bâtir une véritable équipe. Ce qui ne peut être possible que dans la discipline. Je crois que tout cela relève du travail d’un technicien. Nous ne sommes là que pour lui apporter des moyens de travail, mettre à sa disposition des informations nécessaires à la formation d’une bonne équipe, s’il nous les demande. Mais comme je vous l’ai dit plus haut, c’est lui qui est le responsable n°1 de la discipline dans l’équipe. A côté de l’entraîneur, il y a également d’autres encadreurs : un personnel médical et administratif. Il faudra maintenant les choisir en fonction de cet objectif principal, qui est la restauration de la discipline au sein de l’équipe nationale.
Quels seront les autres objectifs sportifs précis qui seront assignés au prochain entraîneur des Lions indomptables, au-delà de ceux techniques que vous avez fixés?
Le premier objectif sera de restaurer la discipline au sein de l’équipe nationale. Puis de faire qualifier, bien évidemment, notre équipe nationale, aussi bien pour la Can que la Coupe du monde 2006. S’il atteint ces trois objectifs, ce ne serait déjà pas mal. A partir de ce moment, nous pourrions envisager un avenir à long terme.
A propos d’avenir, quels sont les délais que vous vous êtes fixés pour dénicher ce nouveau patron des Lions indomptables ?
Je ne peux pas dire que ce sera fait demain ou après demain. Je ne me suis pas fixé un délai précis. Tout est fonction du degré d’avancement des contacts que j’ai. Je crois que cela ne saurait tarder. Il y a une urgence : il faut très rapidement trouver un entraîneur pour que ce dernier puisse faire de la prospection, trouver des joueurs, les regrouper, discuter avec eux, faire des matches amicaux avant la reprise des matches retour des éliminatoires jumelées Can/Mondial 2006 [en mars 2005, Ndlr]. Nous n’avons que trois mois pour tout cela. Ce qui ne représente rien. C’est pourquoi il est urgent de trouver rapidement un entraîneur. Mais il faut aussi reconnaître que ce n’est pas chose facile. Quand je parle de difficulté, il ne s’agit pas d’un problème financier. La difficulté à trouver un entraîneur se situe davantage au niveau de la personne. Ce n’est pas évident de trouver le bon cheval. Il y a plusieurs entraîneurs qui frappent à notre porte, notamment depuis que nous avons pris cette décision là [de limoger Schäfer, Ndlr]. Des contacts sont pris et nous espérons que Dieu va nous aider à avoir la main heureuse.
Qui sont ces entraîneurs qui frappent à votre porte ?
Je ne crois pas que ce soit important de savoir qui frappe à la porte. Ce qui est important, c’est de savoir que Monsieur tel s’est mis d’accord avec les autorités camerounaises pour entamer le boulot.
Il y a un peu plus de deux ans, votre prédécesseur avait résilié le contrat de l’organisateur officiel des matches amicaux des Lions indomptables, M. Ribeiro. Depuis lors, notre sélection nationale dispute des matches amicaux au petit bonheur la chance. Envisagez-vous des actions dans ce sens ?
Il faudrait effectivement envisager un certain nombre de rencontres amicales avant la reprise des matches retour, car c’est très important. D’abord parce que nous devons être prêts pour le jour-j, ensuite parce que nous ne connaissons pas les joueurs que le nouvel entraîneur va sélectionner. Ceux-ci pourront être des anciens ou bien des nouveaux. Rien n’est sûr. Toujours est-il qu’il faudrait qu’ils se retrouvent. D’où la nécessite d’avoir des matches amicaux qui s’imposent à nous et au nouvel entraîneur.
L’organisation de ces matches incombera-t-elle à l’entraîneur, à la direction administrative ou à un partenaire comme cela avait été le cas par le passé ?
Toutes les solutions sont envisageables. Nous pourrions les négocier, si nous avons des moyens. Nous pourrions faire appel à des particuliers, tout comme l’organisation des matches amicaux peut être une initiative ou une proposition de la fédération ou alors de l’entraîneur sélectionneur. Je suis ouvert à toutes les propositions. L’essentiel étant que les Lions indomptables puissent livrer ne serait-ce que deux matches amicaux avant la reprise des éliminatoires en mars prochain.
A l’issue de la tripartite du 5 novembre dernier à Zurich, la Fifa a prescrit au gouvernement de laisser la gestion administrative et technique de l’équipe nationale à la Fécafoot. Comment est-ce que vous appréciez cette prescription ?
Je ne pense pas que ce soit une prescription. Je n’en ai reçu aucune de la Fifa. Nous avons eu des discussions avec la Fifa et la Fédération camerounaise de football au sujet de la gestion de l’équipe nationale. Il y a des points sur lesquels nous avons eu une convergence de vues. De même qu’il y en a sur lesquels il y a eu divergence d’opinions. Nous continuons la discussion là-dessus. J’ai pour cela désigné, il y a quelques jours, la commission paritaire qui doit examiner les points de divergence entre nous, la Fifa et la fédération. Ce travail est en cours. Je ne pense pas qu’au jour d’aujourd’hui, on puisse dire qu’on va faire ceci ou cela. Mais d’une manière générale, je crois que la philosophie qui soutend notre position dans cette affaire est que l’équipe nationale est un service public. Dès lors, il est peut-être mieux qu’elle ait un statut particulier.
Au moment où l’on tourne la page Schäfer, est-ce-que nous pourrions avoir une idée de la liquidation de son passif, ce d’autant plus qu’il nous a semblé qu’il serait arrivé dans un package de la coopération allemande qui comprenait par ailleurs l’encadrement médical et l’équipementier Puma?
Le contrat de Schäfer avait été négocié individuellement. Puma est sous contrat avec la Fédération camerounaise de football sur les équipements. Pour ce qui est de Schäfer, c’est tout autre chose. Que va devenir son contrat ? Tout cela est prévu dans la convention qui nous liait. En cas de rupture unilatérale, il y a des effets juridiques qui naissent, des obligations et des droits. Il faudra, bien évidemment, les assumer.
Est-ce que vous avez arrêté une fourchette du salaire mensuel du prochain entraîneur?
Je crois que cela se négocie, comme tout contrat de travail. Tout dépendra des prétentions de l’autre partie et de ce que moi je serai capable d’offrir. Nous allons discuter pour nous mettre d’accord.
Les expatriés ont des cahiers de charges, pas les locaux…
Je ne peux parler avec précision de ce qui se passe pour les entraîneurs locaux, parce que quand je suis arrivé, j’ai trouvé un entraîneur expatrié. A ma connaissance, chaque fois qu’il a été question d’un entraîneur national, l’on a toujours fait appel à un fonctionnaire. Le ministre de la Jeunesse et des Sports peut décider de mettre un de ses collaborateurs à la disposition d’une équipe nationale, c’est de son droit. C’est compte tenu de cette prérogative qu’on a eu à nommer des entraîneurs nationaux.
Entre autres raisons qui vous ont poussé à limoger Schäfer, vous avez parlé de faute lourde. Il s’agit de quoi précisément ?
Il y a la non résidence. Schäfer ne s’est pas du tout occupé de l’équipe A’. Même si cette sélection a un entraîneur, il revenait à Schäfer de faire la prospection. Curieusement, après le match contre l’Allemagne, après qu’il eut été au courant de la décision que j’ai prise, pour la première fois depuis que je suis là, il m’a adressé un rapport du match et il m’a fait tenir un document dans lequel il détaille un programme de travail qui concerne la prospection. Cela veut dire que lui même reconnaît qu’il a manqué à une obligation professionnelle. Même s’il continue par ailleurs d’affirmer qu’il est toujours l’entraîneur des Lions indomptables. Il a fallu que je prenne la décision de le limoger pour que, pour la première fois, j’aie un rapport en bonne et due forme d’un match livré par les Lions. Et pour la première fois, il me dit qu’il va faire la prospection des jeunes footballeurs, qu’il viendra au Cameroun faire une tournée dans toutes les provinces afin de constituer une sélection nationale des moins de 15 ans…
Pourquoi avoir attendu tout ce temps avant de prendre cette décision alors qu’il y avait les mauvais résultats qui s’accumulaient et que M. Schäfer ne résidait pas par ailleurs au Cameroun?
Il s’agissait juste d’un problème d’opportunité de la décision. Je suis quand même le chef. Par ailleurs, j’arrive au moment où son contrat vient d’être renouvelé, et avant terme. Je me dis quand même qu’il y a une continuité du service public. Je n’allais pas m’attaquer à ce contrat aussitôt arrivé. L’autre raison pour laquelle je ne me suis pas prononcé plus tôt est que nous avons gagné contre le Bénin et la Côte d’Ivoire. Le match nul contre le Soudan, par contre, était insuffisant, tout comme la défaite face à l’Égypte. C’est pourquoi j’ai parlé de «résultats insuffisants». Mais avant de prendre cette décision, nous avons eu à lui dire que nous n’étions pas contents de ses résultats. Et à plusieurs reprises. Pourquoi donc avoir attendu ? C’est juste un problème d’opportunité.
Êtes-vous optimiste par rapport à la qualification des Lions indomptables pour la Can et le Mondial 2006 ?
Déjà, pour la coupe d’Afrique, je suis très optimiste. Nous avons encore nos chances pour le Mondial. Mais nous sommes quand même dans le domaine du sport. Il nous reste cinq matches à livrer, dont trois à Yaoundé. L’essentiel est que nous ayons une main heureuse pour trouver un bon entraîneur, que les joueurs prennent conscience de l’enjeu, qu’ils soient solidaires et fassent preuve de patriotisme. Ce faisant, nous sommes capables de gagner des matches à grand enjeu comme celui contre la Côte d’Ivoire, chez elle. Maintenant, il faudrait savoir qu’en face de nous, il y a également des équipes qui veulent aussi gagner. Si d’aventure il arrivait que nous ne réussissions pas à nous qualifier pour l’une ou l’autre compétition, il ne faudrait pas que ce soit un drame. Le sport a ses aléas. On peut avoir le meilleur entraîneur du monde et perdre un match.
Bertille M. Bikoun, Emmanuel G. Samnick, Mutations