Plusieurs cadres camerounais avaient fait acte de candidature au poste de directeur général de la Fédération camerounaise de football (Fécafoot), en déposant sur la table de Mohammed Iya leur curriculum vitae ou leur dossier de manifestation d’intérêt, et, pour certains, en faisant valoir leur parrainage par de gros bonnets de la République. Etaient ainsi lice, Louis-Marie Ondoa, André Nguidjol Nlend, Jean-Lambert Nang, Théophile Olomo, George Fube, ou encore Maurice Tadjoré Ndjock
« Nos compatriotes ont certainement la compétence qu’il faut, mais sont-ils prêts à résister aux diverses pressions? Je n’en suis pas si sûr! » C’est ainsi que Mohammed Iya, le président de la Fécafoot, explique son choix finalement porté sur un ressortissant français pour diriger, au quotidien, le football camerounais. Il ajoutait que c’est la même précaution qui a souvent guidé au recrutement d’un sélectionneur national expatrié, alors que le pays ne manque pas de techniciens de football valeureux et expérimentés. Nous sommes dans l’obligation de donner, a priori, un accessit au patron de la Fécafoot pour cet argumentaire qui repose, somme toute, sur des faits constants. On cachera du reste difficilement notre gêne de savoir que des personnalités haut placées, y compris depuis le palais de l’Unité, aient voulu faire le forcing pour placer leur pion au poste stratégique de directeur général de la Fécafoot. La mode du raccourci se porte ainsi très bien, dans un pays où rien ne semble s’obtenir au mérite mais grâce aux appuis et par la force d’un décret toujours discrétionnaire.
Le patron élu de la fédération doit-il pour autant se frotter les mains d’avoir réussi à manoeuvrer son affaire pour éviter de se mettre à dos divers groupes de pression nationaux? Il aurait tort de crier victoire. Déjà, les Camerounais n’aiment pas le changement, même quand il est fait de bonne foi et pour l’intérêt général. La Fécafoot a pu le vérifier avec sa nouvelle formule du championnat de D1 qui n’a vécu que le temps d’une saison 2004. Tout le monde est d’accord qu’il fallait mettre de l’ordre dans le fonctionnement de la Fécafoot, mais c’est encore chacun qui veut que cela se passe autour de sa personne.
Chercher la paix politique en refusant de choisir parmi les candidats nationaux peut aussi paraître comme une fuite en avant. Dans deux ans, quand le contrat de M. Prêcheur sera arrivé à terme, il s’en trouvera toujours pour dire pourquoi le poste est revenu à tel, pourquoi il est entre les mains de telle tribu. La compétence reste le seul moyen de boucler le bec à pareils contempteurs. On jugera donc le nouveau directeur général de la Fécafoot, non pas à la couleur de sa peau, mais à l’aune de la rigueur qu’il aura imposée dans la gestion de notre football, à la sérénité et à la transparence qu’il aura apportées, bref aux résultats d’une gestion saine et moderne d’un secteur qui draine pas mal de passions. En ce qui nous concerne, tout en étant persuadé qu’il ne faut pas renvoyer l’indépendance du Cameroun à l’infini, un tel bilan nous comblera d’aise, qu’il soit l’oeuvre d’un ressortissant de Birmanie, de Normandie, du Palatinat ou des bords de la Sanaga.
E.G.S.