Le déçu de la Coupe du monde explique l’échec.
*Pourquoi la grève de Paris ?
Nous avons organisé la grève dans l’intention de nous faire respecter de nos dirigeants. Ceux-ci n’ont pas été très honnêtes avec nous. Et c’est comme ça que nous avons exigé de recevoir le minimum de ce que nous demandons avant de quitter Paris.
*Pensez-vous aujourd’hui que cette grève avait sa raison d’être ?
Ce n’est pas la grève qui est l’origine de notre élimination. Si on avait pris des dispositions bien à l’avance, cette grève n’aurait pas eu lieu.
On aurait loué un avion depuis Paris pour nous déplacer que nous serions arrivés à temps. Je ne sais pas pourquoi les dirigeants ont tenu à le faire sur Paris. Maintenant que l’échec est là, l’on ne met en avant que cette grève pour le justifier. Tout le monde vilipende les joueurs, alors que ceux-ci réclamaient leur dû. Par contre, on balaie d’un revers, les 48 heures de vol que nous avons effectué pour arriver au Japon. A un moment, les joueurs ont pensé payer de leur proche les billets d’avions, mais nous n’avions pas le trajet.
*Quelle a été votre degré d’implication à ce mouvement ?
(Hésitations)… Pourquoi moi ? Je fais partis des anciens de cette équipe. Par le passé, il y a toujours eu des problèmes. Mais cette fois-ci, nous avons jugé que c’était trop, les dirigeants avaient exagéré. Car ce que nous réclamions en fait à Paris, nous en avions déjà parlé avec eux bien des mois à l’avance. Et ils nous avaient fait comprendre que cela allait s’arranger. Pendant le stage préparatoire, tout s’est bien passé. Nous avons été tranquilles, même si, entre temps, nous attendions un geste des dirigeants. Ils ne parlaient pas. Jusqu’à la veille du départ. Et le jour-J, ils nous ont dit : » Vous allez avancer, cela viendra vous retrouver sur place « . Nous avons alors dit : » non ! Il faut résoudre ce problème avant de partir.
En fait, il n’y avait pas un problème en tant que tel. L’argent que nous réclamions était celui que la Fifa alloue à la préparation de toutes les équipes qui prennent part à la phase finale de la Coupe du monde. Mais je ne comprends pas pourquoi le Cameroun (toujours nous !) Connaît chaque année les mêmes difficultés.
*Et vous faites partie de ceux sur qui le décalage horaire a pesé, puisque vous n’êtes jamais revenu au mieux de votre forme durant cette compétition…
Tout le groupe, les 23 joueurs, ont subi la fatigue du voyage et des longues distances asiatiques. Et c’est surtout à la reprise des matches que nous la ressentions. C’est pour cela que je vous dis que ce n’est pas en restant ou en quittant Paris à la date prévue que cela allait arranger quoi que ce soit. Sinon, dans l’ensemble, cela n’a pas été facile. Je continue d’attribuer cet échec à nos dirigeants. Supposons un seul instant que nous soyons partis de France le 20 mai, suivant l’itinéraire tracé par je ne sais qui, cela allait toujours être la catastrophe. Pour aller à Tokyo depuis paris, vous en avez pour 12 heures de vol maximum. Vous voyagez dans de bonnes conditions et à l’arrivée, vous ne ressentez pas le poids du voyage. Mais nos dirigeants, comme toujours, ont voulu leur faire à leur façon. Nous avons emprunté un avion de notre compagnie aérienne, le 737, un avion qui ne peut pas faire longues distances d’un trait.
*Comment avez-vous trouvé vos adversaires ?
Dans notre groupe, on avait tranquillement passé le premier tour, si tout s’était bien passé dès le départ côté administratif.
*Et la responsabilité de Schäfer alors ?
Je ne crois pas que l’entraîneur ait quelque chose à voir dans notre élimination. Lorsque, par le passé, ça c’est bien passé, on n’a jamais parlé de l’entraîneur. Mais aujourd’hui que c’est mauvais, on l’accuse. La fatigue a été notre seul handicap. J’estime qu’on ne peut pas faire 48 heures de vol, livrer un match le lendemain et prendre aussitôt le chemin pour un site situé à des centaines de kilomètres de la ville.
*Ainsi donc le logement vous a posé problème ?
Les infrastructures étaient agréables, mais les distances que nous avions à parcourir étaient très longues.
*Qu’en est-il des problèmes qu’il y aurait eu au sein du groupe ?
En dehors d’être footballeur, nous sommes avant tous des hommes. Seulement, je peux vous rassurer qu’il n’a jamais eu de bagarres entre mes coéquipiers durant notre séjour en Asie, encore moins entre certains membres de l’encadrement technique. J’ai été surpris moi-même d’apprendre cela, en appelant ma famille depuis le Japon, que certains de mes coéquipiers en étaient venus aux poings pendant la mi-temps de notre premier match.
*Il n’y a non plus eu élévation de ton entre vous ?…
Non !
*Il se dit généralement c’est vous, les joueurs, en fin de carrière, qui avez mis le feu aux poudres…
Il s’agit des rumeurs. Il y a sis mois vous m’auriez posé la même question que je n’aurais pas eu la même réponse. C’est la même équipe que vous avez vu jouer en janvier dernier.
*Pensez-vous une rivalité entre l’équipe du Cameroun et celle du Sénégal ?
En temps normal… Actuellement, on ne parle partout en France que des Sénégalais parce qu’ils sont arrivés en quarts de finale. Ce qui est légitime. Quant à nous, si tout avait été mis en place, nous serions allés plus loin que cela dans cette Coupe du monde.
*Si Nous revenons à l’incident d’après élimination, vous êtes partis à la sauvette après la défaite contre l’Allemagne…
Après le match, tout le monde était fâché. Nous ne nous attendions pas à sortir au premier tour. Les joueurs ruminaient leur déception chacun dans son coin. Et puis, nous avons décidé, les uns et les autres, de partir. On nous avait demandé d’attendre l’avion Camair qui devait arriver le vendredi, c’est-à-dire, trois jours après notre match, mais nous avons estimé que c’était trop. Et chacun a décidé de regagner sa famille.
Maintenant, j’attends les gens dire que nous n’avons pas voulu jouer. Ce que ces personnes ignorent, c’est que c’est d’abord notre gagne pain que nous cherchons avant de faire plaisir à notre peuple. Donc, la participation nous a dépassé, as parce que nous ne pouvions pas ou ne voulions pas jouer, mais parce que nous étions fatigués.
*D’après les informations qui nous sont parvenues, vous auriez fait vos réservations avant d’aller jouer ?
Personne d’entre nous ne pouvait dire avant le match que nous allons être éliminés. Lorsque c’est arrivé comme vous le savez, chacun, dans sa colère, s’est dit : nous n’y sommes plus. Ce qui nous reste à faire, c’est de renter. Nous connaissons les compétitions. Quand elles finissent pour nous, que ce soit avant ou après la délégation camerounaise met toujours trois à quatre jours dans le même pays avant de partir.
Alors, nous avons pensé à Nelly, une dame qui travaille en France. Elle s’occupe en particulier des réservations pour les footballeurs. Nous l’avons appelé aussitôt après la défaite pour qu’elle nous fasse des réservations d’avion. Elle en a fait pour dix. Et c’est entre joueurs que nous avons décidé de qui devait partir ou rester. C’est impossible d’avoir en tête de partir alors que vous avez à livrer un match décisif. Cependant, certaines personnes avaient en effet déjà rangé leurs effets, parce que quel qu’avait été le résultat, il aurait fallu partir de notre site. Les joueurs qui sont restés attendre l’avion (qui n’est pas venu à temps) sont partis plus tard à leurs propres frais.
*Est-ce qu’il y a eu des problèmes avant ce match contre l’Allemagne ?
Non ! Le coach a fait son classement. Nous disant que ce match était à quitte ou double, il fallait nous donner à fond plus que lors des deux précédentes rencontres.
*Quelle orientation va prendre à présent votre carrière professionnelle ?
Je quitte Bologne. Mais j’attends le 05 juillet 2002 pour être fixé. Je ne peux pas vous dire plus. Je le ferai le moment venu.
*Et vous vous donnez encore combien de temps en tant que footballeur ?
Je suis encore jeune ! Lorsque vous me posez cette question, c’est trop me demander.