« …Tout le monde a tiré sur nous en disant que nous étions à l’origine de cette affaire. J’ai donc pensé qu’il nous revenait à nous de trouver une solution à ce problème et c’est ce que nous avons fait. Maintenant, c’est un sentiment de joie et de satisfaction qui m’anime et vous comprenez pourquoi. Je suis heureux pour le football et les joueurs camerounais… »
Le président de la Fédération Camerounaise de football explique les péripéties ayant abouti à la levée de la sanction de la FIFA contre le Cameroun, en même temps qu‘il évoque l’actualité dans cette institution ainsi que l‘avenir…
L’Action: Monsieur le président, vous revenez de Paris où vous avez posé à vos collègues présidents des Fédérations affiliées à la Caf, le problème de la sanction de la Fifa contre la Fécafoot. Quelle a été votre démarche?
Mohammed Iya: J’ai tout d’abord obtenu l’autorisation du président de la Caf pour qu’on me donne la parole. Vous savez qu’il s’agissait d’une Assemblée générale extraordinaire qui ne devait examiner que l’unique point inscrit à l’ordre du jour. J’ai donc pris la parole pendant une quinzaine de minutes et j’ai sollicité la solidarité et la compréhension de mes collègues présidents des 51 autres Fédérations. Après avoir exposé les faits, nous avons pu les convaincre, cinq ou six présidents de Fédérations se sont levés pour appuyer ma position et après quoi, toute la salle était d’accord. Une décision a été prise à l’issue de tout cela pour écrire au président de la Fifa Sepp Blatter. Ce qui a été fait. Voilà comment les choses se sont passées.
Espériez-vous une telle suite de la Caf et de la Fifa ?
Au point où j’en étais, je n’avais rien à perdre. J’avais d’ailleurs aussi l’intention de solliciter la parole au niveau de l’Assemblée générale de la Fifa. Heureusement, les choses se sont arrangées avant et je n’ai plus pris la parole. Mais, je dois dire que lors de l’Assemblée générale extraordinaire de la Fifa, notre compatriote Roger Milla a été décoré au nom de l’Afrique. Parce que la Fifa a reconnu l’apport de l’Afrique dans le développement du football mondial pendant les cent dernières années. La Fifa a apprécié cette contribution, c’est pour cela qu’elle a décidé d’accorder une distinction au football africain. Monsieur Blatter a estimé que Roger Miller, mieux que quiconque, incarnait ce développement du football africain, il a donc reçu la distinction au nom de tous les footballeurs africains. A cette occasion, il a lui aussi pris la parole pour demander à monsieur Blatter et à toute l’Assemblée générale de lever la sanction qui pesait sur le Cameroun. C’est donc la conjugaison de tous ces efforts qui a permis le déblocage de la situation. Je saisis cette occasion pour remercier l’ensemble des dirigeants de tout le football africain qui nous ont solidement soutenus. Je remercie toutes les 205 Fédérations du monde entier qui ont, ensemble, soutenu une proposition qui venait d’ailleurs du président Blatter. Nous nous sommes rencontrés le vendredi 21 mai au matin et il m’a dit qu’il allait inscrire cette affaire à l’ordre du jour, bien que cela n’eût pas été statutaire. Monsieur Blatter a œuvré, il a pu convaincre les 205 délégués à soutenir la proposition qu’il a lui même, chose exceptionnelle, faite.
Quel est finalement le sentiment du président de la Fédération Camerounaise de football que vous êtes, la Fécafoot sur qui tout le monde a tiré dans la gestion de cette affaire?
Honnêtement, c’est une affaire sportive. Tout le monde a tiré sur nous en disant que nous étions à l’origine de cette affaire. J’ai donc pensé qu’il nous revenait à nous de trouver une solution à ce problème et c’est ce que nous avons fait. Maintenant, c’est un sentiment de joie et de satisfaction qui m’anime et vous comprenez pourquoi. Je suis heureux pour le football et les joueurs camerounais. Je suis un président soulagé.
Des informations font état de ce que Puma a décidé de poursuivre l’affaire en traînant la Fifa devant les tribunaux, quelle va être la position de la Fécafoot dans tout cela ?
Il n’appartient pas à Puma de poursuivre l’affaire ; c’est à la Fécafoot de le faire et pour l’instant, j’ai donné des instructions à nos avocats de retirer la plainte déposée au Tribunal arbitral du Sport à Lausanne en Suisse. Le dossier avait été déposé le vendredi 21 mai, c’est-à-dire le jour même où l’Assemblée générale de la Fifa décidait de lever la sanction. J’ai également demandé à Puma de ne pas contester l’amende, parce que pour nous, il n’y a plus de problème.
Maintenant, qui va payer? La Fécafoot ou Puma?
Vous savez que dans ce jugement, personne n’évoque la responsabilité de Puma ; c’est la Fécafoot qui est mise en cause. Maintenant, on peut trouver un arrangement pour le payement mais, c’est la Fécafoot qui est sanctionnée et donc, c’est elle qui devra payer.
Comment entrevoyez-vous l’avenir de l’équipe nationale du Cameroun, celui de la Fécafoot et de votre séjour à la tête de cette institution?
Je pense que, s’agissant de l’équipe nationale du Cameroun, les joueurs vont évoluer avec moins de pression puisqu’il n’y a plus de handicap. La levée de la sanction est de nature à les galvaniser davantage. Il reste maintenant à la Fédération de mettre les moyens pour qu’il y ait une bonne prestation, l’objectif visé étant la qualification pour la coupe du monde et la CAN, dans un groupe extrêmement difficile.
S’agissant de l’avenir de la Fécafoot, nous sommes des camerounais, nous sommes des responsables, une décision a été prise de mener des enquêtes au sein de la Fécafoot, de relire les textes, de reporter l’Assemblée générale, etc. En tant que citoyens républicains, nous ne pouvons pas aller contre la décision des pouvoirs publics. Nous attendons. Je suis personnellement à la disposition des enquêteurs, j’attends l’évolution de la relecture rapide des textes. Les élections avec ou sans moi, peu importe, j’ai confiance en toutes les personnes qui ont été désignées pour faire la lumière objectivement sur toutes ces affaires et qu’on y trouve une solution. Encore que, je le redis, il n’y a vraiment pas de feu dans la maison. Les gens se sont agités, on est arrivé à cette situation. Ils croyaient vraiment que c’était assez simple. Il ne fallait pourtant par faire l’amalgame entre l’affaire des maillots et les élections, malheureusement, l’amalgame a été fait. Il faut pouvoir trouver ensemble une solution pour permettre à la Fédération de continuer à travailler et à gérer le football. Pour ceux qui ne comprennent pas, c’est un mal nécessaire si c’en est un, mais, je dirais même pour ma part que c’est un bien nécessaire, et je continue à croire que la Fédération a un rôle. Le Cameroun ne peut pas gérer son football autrement qu’à travers la Fédération. C’est comme cela que ça se passe dans le monde entier. Mais malheureusement, nous voulons faire les choses autrement.
Propos recueillis par Simon Meyanga, L’Action