Il avait été nommé pour résoudre la crise qui secoue le football camerounais. En 7 mois et 14 jours de règne, l’ancien gouverneur de province devenu ministre de la Jeunesse et des sports ne semble pas avoir donné satisfaction au sommet de l’Etat.
Le football au Cameroun a dépassé les bornes du simple sport-roi pour s’apparenter au parti unique autour duquel se rassemble la grande majorité des Camerounais. Et le nouveau ministre des Sports en est conscient pour laisser encore perdurer l’ennuyeuse transition qui court depuis que le processus de renouvellement des instances dirigeantes de la fédération camerounaise de football (Fécafoot) avait été stoppée net à sa phase finale par le secrétaire général à la présidence de la République. “La Fécafoot, je le sais, occupe une grande place dans le cœur des Camerounais. Je vais m’employer à régler ce problème de façon assez rapide. Je pense qu’il y aura une solution à la satisfaction, je dirai, de tous.” Ces promesses de Philippe Mbarga Mboa ne donnent cependant aucune piste sur la manière dont va se déployer le ministre des Sports et de l’éducation physique qui, au moment où cette “ crise ” éclatait, était encore ministre chargé de mission à la présidence de la République. C’est à dessein qu’il peut dire avoir “une idée très précise là dessus”. Et c’est également ce qui ferait la différence entre lui et son prédécesseur, David Siegfried Etame Massoma qui y était arrivé comme un cheveu dans la soupe en avril dernier.
La gestion du passionnant “ dossier Fécafoot ” par ce grand commis de l’Etat ( administrateur civil ayant passé 17 ans de gouverneur de province ) n’aurait pas plu au sommet de l’Etat au bout de 7 mois et 14 jours, à en croire certaines sources. On lui reproche par exemple son dillétantisme avant et après la réunion tripartite de Zürich du 5 novembre dernier. La commission de relecture des textes que préside Nguewa Omer s’était rendue dans la capitale suisse sans aucune consigne particulière du ministre, et donc du gouvernement qui l’a nommée. En plus, le Minjes avait alors désigné un de ses collaborateurs, Robert Ndzana, comme chef de délégation alors qu’il n’avait pas travaillé sur le dossier. Conséquence, il ne le maîtrisait guère. Or sa suite était composée de Nguewa Omer (président de Union de Douala pendant 15 ans et président du comité technique d’organisation de la Coupe du monde de 1994 ) qui préside la commission de relecture des textes de la Fécafoot dont les membres sont : le professeur de droit Minkoa She et Joseph Antoine Bell. Selon le rapport qui est parvenu à la présidence de la République, Robert Ndzana n’aurait laissé ni l’espace ni le temps à ceux qui maîtrisaient le dossier. A la fin, la Fifa a renvoyé une fois de plus les 2 parties camerounaises pour qu’elles s’entendent sur quelques zones d’ombre. Et pourtant, avant leur départ le secrétaire général de la présidence de la République, Jean-Marie Atangana Mebara aurait demandé au Minjes Siegfried Etame Massoma et au Premier ministre Peter Mafany Musonge de recevoir les 2 délégations (Fécafoot et Commission de relecture des textes ) pour aplanir les différences. Mais cela n’avait pas été fait. Comme si cela ne suffisait pas, après la tripartite de Zürich, le ministre de la Jeunesse et des Sports ne s’est même pas officiellement prononcé sur le dossier.
Sauvegarder les intérêts
L’autre reproche qu’on fait au dernier ministre de la Jeunesse et des sports est qu’il a pris un peu trop du temps pour régler le cas Schäfer. Les occasions ne manquaient pourtant pas. On se demande bien pourquoi ne l’avoir pas limogé après le pénible match nul contre le Soudan, qualificatif pour les Coupes d’Afrique des Nations et du Monde de 2006 ; mais plutôt à l’issue du match amical sans enjeux contre l’Allemagne qui est vice-champion du monde en titre. D’autres se demandent même pourquoi avoir limogé Schäfer et laisser Corfou. Cependant, en pleine crise qui tire visiblement à sa fin, le dossier de l’entraîneur des Lions Indomptables aurait dû attendre que la Fécafoot se dotât d’une nouvelle équipe dirigeante. Car selon les prescriptions de la Fifa, “la gestion des équipes nationales revient aux fédérations et non aux entités externes (…) ” ; c’est-à-dire que le recrutement des entraîneurs des Lions Indomptables relève de la Fécafoot et non du ministère des Sports. Même si c’est le ministère des Sports qui le paie ; cela ne relèverait que de l’entente entre les 2 entités. En limogeant donc Schäfer maintenant que la Fécafoot est en pleine restructuration, le ministre Etame Massoma a créée un vide que son successeur pourrait être tenté de combler avec empressement, créant ainsi un autre incident avec la Fifa.
Malgré ces multiples va et vient à Zürich, il y a toujours des problèmes qui coincent la Fécafoot et le Minjes. Notamment le problème des affiliations à la Fédé. La Fécafoot entend par exemple tout contrôler. Elle veut agréer directement les associations qu’elle appelle plus tard des clubs de football. Or la loi sur les associations au Cameroun demande que les associations soient agréées par le ministère de l’Administration territoriale et de la décentralisation. Si une association décide par la suite de jouer au football, elle devrait donc solliciter l’affiliation à la Fécafoot. En outre, les textes de la Fécafoot prévoient que les membres du gouvernement ne soient pas membres des bureaux exécutifs de la Fécafoot. Or récemment, Grégoire Owona a été élu dans le bureau exécutif de la Fécafoot du Centre lors du dernier renouvellement des instances de base, alors qu’il n’était même pas dans la salle des travaux. Philippe Mbarga qui a l’expérience de sportif (ancien international de basket) et de dirigeant de Fécafoot – à ce titre, il participa à une querelle épique entre le ministère et la fédération, sous la présidence de Maha Daher -, saura certainement trouver la bonne formule, pour sauvegarder les intérêts du Cameroun et les relations entre le gouvernement et ses anciens amis de la Fifa. Quant aux relations avec la Fécafoot , son bureau actuel en fin de mandat lui a tendu la main en soulignant sa disponibilité à collaborer avec le ministère des Sports.
Par Noé Ndjebet Massoussi