Car, dimanche dernier, alors qu’on s’acheminait tranqillement vers une lourde défaite de 0-3 contre l’Egypte, au stade Osman Ahmed Osman du Caire, on ne sait trop par quelle alchimie les Lions indomptables ont pu réduire le score à 2-3, entre la 91ème et la 93ème minutes de ce match comptant pour la quatrième journée des éliminatoires de la Coupe du monde 2006 groupe 3 zone Afrique. On ne sait jamais ce qui serait arrivé, si la défaite avait été aussi rondelette, équivalent d’une humiliation en règle sur le territoire des Pharaons d’Egypte…
Il n’est pas interdit de perdre un match de football, mais une équipe nationale au palmarès établi telle que celle du Cameroun ne peut se permettre de baisser la culotte devant ses adversaires, parfois sans curriculum vitae consistant, comme c’est le cas depuis la dernière édition de la Coupe d’Afrique des nations de football en Tunisie (janvier-Février 2004). La victoire fait partie du sport, mais encore faut-il se préparer à la victoire, avant d’être déjoué par les circonstances du match. Or, depuis le chamboulement aussi inexplicable que grossier intervenu dans l’encadrement technique des Lions indomptables en juin 2001, ceux-ci semblent avoir perdu leur football chatoyant et conquérant, celui-là même qui leur avait permis, bien avant la République tchèque, d’être cité parmi les outsiders capables de remporter un jour la Coupe du monde. Pas moins!
Il y eut d’abord l’intronisation précipitée (et finalement malheureuse) de Jean Paul Akono, à la place d’un place d’un Pierre Lechantre rayonnant et presque sur le toit du monde. L’entraîneur des champions olympiques 2000 fut sanctionné à une vitesse supersonique,après une défaite en Angola, là où Winfried Schäfer peut se permettre des échécs successifs en phases finales de Coupe du monde et de Coupe d’Afrique des nations sans être inquiété le moins du monde. L’intérim de Robert Corfou fut aussi anecdotique que le recrutement de ce blanc-bec pré-retraité français, dont on se demande encore ce qu’il est venu faire au Cameroun. Puis vint donc l’énigmatique Allemand Winfried Schäfer, précédé d’un cursus respectable en Bundesliga, mais qui, depuis plus de trois ans, ne parvient pas à justifier le choix porté sur sa personne. C’est peu dire que de rappeler que le technicien germanique n’a encore rien prouvé à la tête des Lions indomptables. Certes, la victoire du Cameroun à la Coupe d’Afrique des nations 2002 au Mali va ajouter une ligne dorée à son maigre palmarès. Seulement, celle-ci est intervenue alors que l’intéressé était encore à la recherche de ses repères, qu’il n’a d’ailleurs toujours pas trouvés jusqu’à ce jour.
Les survivances de la »Dream Team » bâtie par son prédécesseur avaient alors permis aux Lions indomptables de conserver leur couronne continentale. Depuis lors, approximations, balbutiements et errements tactiques rythment le quotidien de l’équipe du Cameroun. Il faut en sortir, et l’urgence est signalée, sinon il faut dire immédiatement aurevoir à la Coupe du monde 2006 en Allemagne, le pays de Schäfer, dont le rêve est pourtant d’y être à la tête d’une sélection camerounaise qu’il a largement contribué à banaliser.
Quelles sont donc les voies du futur? Il n’y en a que deux, à notre connaissance: soit M. Schäfer s’amende en changeant ses méthodes, soit il est remercié et remplacé par un autre technicien capable de faire des résultats immédiatement. On peut craindre que l’ancien entraîneur du Borussia Mönchengladbach ne soit pas du tout disposé à corriger lui-même sa propre façon de travailler, qui a montré ses limites. Restera donc à s’en séparer, si l’équipe du Cameroun tient toujours à être présente au Mondial allemand. Il se pourrait que l’idée, exprimée depuis des mois par une bonne frange des supporters des Lions indomptables, ait maintenant élu domicile dans la tête des employeurs de Schäfer.
Nous aurions pu nous réjouir de cette évolution d’attitude chez les décideurs du sport camerounais, ayant été les premiers à dénoncer l’incapacité de Winfried Schäfer à remplir sereinement la mission qui lui avait été confiée. Et pourtant, nous pensons que les dirigeants camerounais ont trop laissé pourrir la situation pour penser qu’ils vont aujourd’hui guérir le mal d’un coup de baguette magique. Notre réserve est d’autant plus de mise que, dans les allées du ministère de la Jeunesse et des Sports, c’est le nom de Pierre Lechantre, le sélectionneur qu’on aurait jamais dû chasser, qui revient comme une panacée. Cet entraîneur français, avant de faire sensation en 2000, avait eu une année pour travailler dans le calme. Ses résultats plaidaient pour lui. S’il revenait aujourd’hui, il lui sera demandé les résultats à l’immédiat, ce qui n’est jamais garanti en football. En fait, le problème des Lions indomptables, c’est ceux qui ont cassé la dynamique Lechantre en juin 2001 et qui ont persisté à faire confiance à un looser nommé Schäfer. Ce qui rend toujours brumeux l’avenir de l’équipe du Cameroun.
Emmanuel Gustave Samnick, Mutations