L’entraîneur de l’équipe fanion du département du Haut-Nkam donne les raisons de son retrait de l’encadrement technique de l’équipe. « …j’ai décidé de me retirer, parce que j’ai horreur de continuer à faire semblant. En entraînement, on ne fait pas semblant. Ou c’est ça ou ce n’est pas ça ! »
Coach Tchamango, vous êtes à Bafoussam ce dimanche, alors qu’on vous espérait à Guider à côté de l’Unisport de Bafang…
Jules Marie Tchamango : C’est vrai, mais j’ai décidé de suspendre mes activités parce que, tel que l’Unisport fonctionne, ce n’est plus véritablement une équipe de football. Pour nous qui sommes entraîneur, quand on veut travailler avec des joueurs qui ont tous les petits problèmes du monde, c’est difficile de faire une programmation qui puisse apporter les résultats. Alors, j’ai décidé de me retirer, parce que j’ai horreur de continuer à faire semblant. En entraînement, on ne fait pas semblant. Ou c’est ça ou ce n’est pas ça ! Je décrie cette situation pour permettre au dirigeants ou à tout Haut-Nkamois de voir dans quelle mesure ils peuvent arranger ce qu’il y a à arranger pour que l’Unisport puisse fonctionner comme une équipe de football.
Vous savez que c’est depuis le début de cette année que l’Unisport connaît de sérieux problèmes. Après le départ de l’ancien président, la transition n’est pas toujours facile. Ça fait que maintenant, il y a des joueurs qui réclament à tue tête leurs primes de signature. Ce qui a encore enfoncé le clou, c’est que, il n’y a pas longtemps, même les primes d’entraînements ne tombaient pas ; les bailleurs sont en train de faire sortir les joueurs, etc. Au lieu de continuer à vivre cette situation, j’ai dit qu’il faudrait que je fasse quelque chose, pour amener les dirigeants à se titiller un peu. Et vous savez qu’au foot, quand ça marche c’est les autres et quand ça ne marche pas, c’est les entraîneurs. Donc, j’ai préféré décrier la situation à temps pour que quelque chose soit faite.
Vous vous êtes adressé à la direction de l’équipe. Qu’est-ce qu’elle a dit ?
J.M.T : Disons que j’ai rencontré personnellement mon président, après notre match perdu contre Opopo à Limbé. J’ai souhaité qu’il convoque, comme président de l’équipe nouvellement arrivé qui n’a pas eu à gérer une équipe de football, une réunion de crise avec tous les administrateurs. Et l’impression que j’avais en tant que technicien, un ancien qui a roulé sa bosse, c’est que, au sein de la direction, tout le monde ne regardait pas dans la même direction. Le constat que j’ai fait après deux à trois semaines, c’est que rien ne semblait bouger. J’ai été obligé de rencontrer Monsieur le préfet pour lui signifier le problème…Pour qu’en fait, nul n’en ignore. C’est ce que j’ai fait.
Certaines personnes laissent entendre que c’est vous qui monteriez vos poulains à faire grève parce que vous auriez une quote-part dans leurs primes de signature. Qu’en dîtes-vous ?
J.M.T : Ces personnes qui parlent ainsi ne me connaissent pas du tout. On ne se jette pas les fleurs, mais je suis fier de moi. Je suis passé un peu partout. Il faut que les gens sachent que l’Unisport de Bafang cette saison, je l’ai fabriquée de toutes pièces. J’arrive dans une équipe de l’Unisport sans président, sans joueurs et sans rien. Alors, je prends le risque comme Haut-Nkamois en fait, puisque comme entraîneur je n’aurais pas travaillé de cette manière, de faire des pieds et des mains pour monter une équipe comme celle-là. Aujourd’hui, les enfants n’ont besoin que d’un peu de motivations pour jouer, et jouer pour maintenir cette équipe d’Unisport qui est chère à nous. Je ne vous apprends rien que je suis un ancien de cette équipe et tout ce qui me préoccupe, c’est que l’Unisport vive…Si on estime qu’il y a de l’argent à prendre dans une équipe qui est déjà suffisamment pauvre, c’est malheureux pour ceux qui pensent de cette manière et une déception pour moi, avec tout ce que j’ai fait comme boulot. Même avec un autre entraîneur, je suis convaincu que s’ils sont un tout petit peu motivés, Unisport n’aura pas un problème de maintien.
Qu’est-ce qu’il en est de la pétition des joueurs au sujet de la subvention qu’a accordée Mtn dernièrement au club ?
J.M.T : Jusqu’à ce que je suspende mes activités, je suis convaincu que cet argent n’était pas encore arrivé. Parce que ce qui est certain, si c’est arrivé dans certaines équipes, cela a permis aux uns et aux autres de motiver leurs enfants pour qu’ils se remettent. Bon, si les nôtres continuent à grever, ça veut dire que rien n’est arrivé. A ceux qui se sont arrangés à toucher cet argent, surtout que dans les coulisses on nous a dit que c’était de l’argent frais et non pas un chèque, je pense que le plus tôt serait le mieux que ça serve à éponger, un tout petit peu, les problèmes des enfants.
Coach Tchamango, s’il arrive que les choses s’arrangent du côté de Bafang, êtes-vous à renouer avec Unisport de Bafang ?
J.M.T: Comprenez bien : jusqu’à présent, c’est moi qui suspends mes activités. Personne ne m’a demandé de me retirer, pour que les choses s’arrangent. Il ne faudrait pas que d’ici à demain, si les choses se gâtent, qu’on dise qu’on n’avait pas averti à temps. Je voudrais que l’Unisport soit sauvée. Le plus important là maintenant, c’est les rencontrer, comprendre leurs doléances et résoudre, pas peut-être à 100%, mais leur donner ce qu’il y a à donner. Les dirigeants font ce qu’ils font et puis chacun rentre dans son bureau. Je suis avec eux aujourd’hui, ça fait huit mois. Huit mois que j’ai passés sous stress, parce que j’avais perdu finalement le langage devant ces enfants. Je leur disais la même chose tous les jours (ça va s’arranger, ça va aller, etc… et à la limite je devenais ridicule. Il fallait que je suspende ainsi et si ça peut arranger la situation, tant mieux.
Propos recueillis par KINGA, Ouest Echos