« Monsieur Iya Mohamed m’a envoyé un million pour acheter mon silence, et voici la preuve ». Alors que le déjeuner-débat organisé dans un hôtel de Yaoundé hier tire à sa fin, Louis Marie Ondoa, administrateur de la Fécafoot, « franchit le rubicond » comme il l’avait annoncé d’entrée, en brandissant un bordereau de retrait de Express Union. On y lit que le 11 janvier 2006 à 11h32 Louis Marie Ondoa a déchargé à l’agence Express union de Warda à Yaoundé la somme de un million de francs Cfa.
L’expédition a été faite à partir de l’agence Express Union de l’Avenue des banques à Garoua. L’expéditeur de cette somme est Iya Mohamed (sic) dont la qualité de président de la Fécafoot est mentionnée entre parenthèses à la suite de son nom. Une précision qui intrigue quand on sait qu’en général ce niveau de détail n’est pas requis de l’expéditeur. En plus le nom du président de la Fécafoot est écrit avec un seul « M » alors que sur le site de la Fécafoot, Mohammed a bien deux « M ».
Louis Marie Ondoa soutient que cet argent lui a été versé pour l’amadouer après un « entretien houleux » qu’il a eu avec le président de la Fécafoot le 6 janvier à Yaoundé au lendemain d’une réunion du conseil exécutif. Iya Mohamed aurait par ailleurs promis à son interlocuteur une indemnité mensuelle de 200.000F Cfa que lui payera désormais la Fécafoot. Sur les raisons de cette dénonciation tardive qui intervient plus de quatre mois après que l’argent ait été effectivement perçu, Louis Marie Ondoa soutient qu’étant à la veille de la coupe d’Afrique des nations, il aurait eu du mal à faire entendre sa voix. En l’absence du président de la Fécafoot actuellement au Caire en Egypte, il a nous a été impossible d’obtenir les explications de ce dernier sur les motivations de cette transaction.
Cette révélation sur la fin a relégué au second plan ce qui était présenté comme l’élément central de ce déjeuner-débat organisé par le « Collectif des associations pour la relance de la Fécafoot », dont l’un des maillons, le Cercle camerounais des amis du football (Cecaf), a reçu une autorisation de manifestation publique signée du sous-préfet de Yaoundé 5e. Dans la salle des présences très remarquée dont celles de Emmanuel Mve, Antoine De Padoue Essomba Eyenga, Abraham Tchato, Emmanuel Mbapè Essoka, colonel Tchatchou. Un parterre venu écouter la présentation par Louis Marie Ondoua de son « projet sportif », « Projet Fécafoot vision 2010 ».
Une synthèse d’un document transmis au président du bureau du comité exécutif de la fédération camerounaise de football, Iya Mohamed, à l’époque où Louis Marie Ondoa postulait pour le poste de directeur général de la Fécafoot.
Ce projet, qui part de « constats qualitatifs et quantitatifs », établit que la Fécafoot souffre d’absence criarde de vision, d’anachronisme des infrastructures, du faible niveau de structuration des clubs et de l’absence d’une véritable politique technique nationale. Du déjà entendu en somme. L’une des conséquences logiques selon l’exposant est cette moyenne de 500 spectateurs dans les stades du Cameroun depuis 2000 pour les matchs du championnat de 1ère division.
La perspective d’un schisme au sein de l’exécutif apparaît inéluctable puisque, comme des actes manqués, des phrases reviennent dans l’exposé de Louis Marie Ondoa pour confirmer la logique insurrectionnelle. Morceau choisi : « 15 personnes sur 30 sont prêtes pour la révolution. On a la moitié du comité exécutif avec nous », affirme l’ancien capitaine du Canon de Yaoundé qui ne s’est pas limité à constater que « le football camerounais est à 6000m dans les fonds marins. Pour s’extraire de ces profondeurs, celui qui se présente comme « enseignant à l’Esstic et expert en knowledge management » propose: la mise sur pied d’un ligue professionnelle de football ; un toilettage du cadre juridique avec la mise en place du Tribunal arbitral du football (Taf) ; l’érection du poste de président en un organe avec une obligation permanente pour le président de résider au siège ; élaboration d’un organigramme. Sur ce dernier point des propositions concrètes ont été faites avec un organigramme fonctionnel dont l’application peut être immédiate.
Les questions financières n’ont pas été en reste. Tout en en préconisant une gestion rationnelle des fonds déjà générés, comme ceux issus du « Programme d’aide financière » de la Fifa à savoir 250.000$ par an depuis 1998 (Environ 135 millions de francs Cfa), Louis Marie Ondoa propose le lancement d’un loto sportif, une formule de sponsoring de la coupe du Cameroun pour booster les revenus de lé fédération.
Il faut rappeler que depuis quelques semaines la Fécafoot est à nouveau rentré dans le cycle des affaires avec l’instruction menée par la police judiciaire et dont les conclusions ont été transmises au parquet. Des indiscrétions annoncent dans les prochains jours l’ouverture d’un procès opposant l’Etat du Cameroun à la Fécafoot sur l’application de la convention passée entre la Fécafoot et le ministère des Sports. La dernière réunion du comité exécutif de la Fécafoot a également vu la résurgence de quelques antagonismes quant à la procédure de sélection d’un nouveau directeur général à la Fécafoot.
Junior Binyam