« Il ne faudrait pas que les Lions Indomptables soient l’arbre qui cachent la forêt. Le développement du football passe par celui du football des jeunes. Ce qui ne devrait pas rester un slogan. Lorsque vous avez une équipe comme la France, qui joue avec, en moins de 18 ans, des joueurs comme Jérémie Meniez, l’avant-centre et meilleur buteur du tournoi, qui joue à Sochaux, ou même Franck Songo’o… »
Du 4 au 11 février dernier, les Lions Cadets ont participé au tournoi Méridien en Turquie. L’équipe nationale a encaissé 17 buts et n’en a marqué que 2, un bilan catastrophique. Que s’est-il réellement passé?
Nous sommes allés à cette compétition dans des conditions particulièrement difficiles. Ce qui nous a causé de gros préjudices. Le visa de transit de la France a été refusé, parce que nous n’avions pas de visa de Turquie. Pourtant, les organisateurs ont envoyé des titres de transport via la France, disant que le visa turc allait être obtenu à l’aéroport. Le forfait a été évité de justesse, puisque les billets ont été changés à la dernière minute. L’équipe est allée en Turquie en trois groupes. Un premier groupe de deux personnes, composé de l’entraîneur Engelbert Mbarga et du médecin Dr Assamba qui, grâce aux passeports de service, ont pu obtenir le visa de transit en France. Le reste de l’équipe, c’est-à-dire les joueurs et les autres encadreurs, est passé par Nairobi et Dubai. Dans la capitale des Emirats Arabes Unis, le premier groupe est resté trois jours à l’aéroport, dans les pires conditions. Dormant sur le sol, sans manger, sans se reposer. Le troisième groupe, composé de 6 joueurs et de 2 encadreurs, est arrivé un jour avant le deuxième match. Lors de notre première sortie, face à la France, l’équipe avait seulement 11 joueurs. Il était impossible d’effectuer des remplacements. Au bout de 27 minutes, ils ont commencé à craquer. Encore qu’ils sont arrivés à 3 heures du matin alors que la rencontre commençait à 12h.
Selon certaines informations, en plus des problèmes de voyage, les joueurs ont manifesté leur mécontentement pour n’avoir pas reçu les primes promises…
Je ne peux pas vous répondre, parce que lorsque le ministre des Sports et de l’Education physique, Philippe Mbarga Mboa, a rendu visite aux joueurs à Akono. Ils leur a parlé seul à seul. Sans encadreur. Ils ont même applaudi. Je crois donc qu’ils se sont entendus. Sur place, à partir du 3ème match, quand ils ont vu leurs collègues effectuer des achats, ils ont pensé que l’Uefa nous avait donné de l’argent. Nous leur avons montré la page financière du dossier du tournoi, où il n’était mentionné nulle part une dotation réservée aux équipes.
La préparation au Cameroun a pratiquement été bâclée. N’a-t-elle pas eu un impact sur votre prestation en Turquie?
A cause du budget qui n’a pas été débloqué au moment où nous devions partir, nous avons eu une semaine de préparation à Akono. Il y a également les conditions dans lesquelles les joueurs ont été convoqués. Au lendemain du match contre le Burkina Faso, ils nous a été demandé de fournir une liste de 30 joueurs à l’Union européenne de football association (Uefa), d’où il fallait tirer 18 joueurs. En réalité, nous aurions pu renforcer cette équipe de Cadets. Mais la liste étant partie avant le début des Interpoules, nous n’avons pas pu renforcer nos effectifs. Ce qui nous a pénalisé. Par contre, la qualification pour la Can nous aurait permis de le faire.
Comment s’est senti l’entraîneur que vous êtes après une débâcle de cette envergure ?
En réalité, les deux premiers matches ne comptaient pas parce qu’ils étaient faussés. Puisque les 6 autres joueurs sont arrivés la veille du deuxième match. Par conséquent, nous avons pris 4 buts contre l’Espagne. Et c’est à partir du troisième match que nous avons joué à notre véritable niveau, en prenant trois buts à un. Il ne faut pas rougir de ce score, parce que le niveau de la compétition était très élevé. Le fossé qui sépare le football des jeunes sur les deux continents est énorme.
Deux joueurs sont revenus malades. De quoi souffrent-ils?
Brice Owona est arrivé dans le dernier groupe des joueurs. Il a néanmoins joué 15 minutes le lendemain face à l’Espagne. Quelques temps après, il a eu un fort accès palustre. Il nous d’ailleurs abandonné pour le reste de la compétition. En outre, il y a le gardien Otia qui s’est fait mal, victime d’une sévère entorse au niveau du genou, avant la mi-temps du dernier match. Il est rentré sur les béquilles, l’organisation a tout pris en charge, au niveau des frais médicaux et d’hospitalisation.
Quelles sont les leçons à tirer de cet échec?
Il ne faudrait pas que les Lions Indomptables soient l’arbre qui cachent la forêt. Le développement du football passe par celui du football des jeunes. Ce qui ne devrait pas rester un slogan. Lorsque vous avez une équipe comme la France, qui joue avec, en moins de 18 ans, des joueurs comme Jérémie Meniez, l’avant-centre et meilleur buteur du tournoi, qui joue à Sochaux, ou même Franck Songo’o, qui a largement sa place en équipe première du Cameroun, j’avoue qu’il y a un énorme travail à faire pour que nous arrivions à avoir des jeunes joueurs réellement compétitifs. Il faut donc une prise en charge effective du football des jeunes, afin que ceux-ci soient mieux à affronter les compétitions. Si nous ne nous mobilisons pas, nous serons rattrapés par les autre nations africaines.
Propos recueillis par Priscille G. Moadougou