Ils étaient des centaines ? Des milliers ? Qu’importe ! Ils étaient tous inconsolables. Bouleversés. Abasourdis. La gorge nouée par la douleur. Le visage tuméfié par un torrent de larmes. Lorsque le prêtre de la paroisse St Jan Marie Vianney de Loum (bourgade situé à 100 km de Douala) termine la messe funèbre, de gros bras descendent le cercueil du correspondant de Camfoot à Bafoussam, entièrement couvert des fleurs, au fond de la tombe. Instantanément, des cris, des pleurs et des clameurs atteignent leur paroxysme.
Familles, proches, collègues, inconnus, atterrés, s’inclinent pour la dernière fois avant que la terre de nos ancêtres ne se referme définitivement sur Mathieu Kisito Ngalamou alias Kinga ou Kingamat. C’était 14 octobre 2006. Il était 14h 07′. Un jeune et prometteur journaliste venait de casser sa plume.
Des fines gouttelettes de pluies (synonyme de bénédiction, en Afrique) inondent les hauteurs de Loum et le domicile familial au quartier Nkombi 2. Une pluie qui n’a pas empêché aux populations et proches de Kisito, massés sous les tentes ou armés de parapluies, de venir lui rendre hommage à travers des témoignages vibrants. Tour à tour, une dizaine d’ambassadeurs représentant des groupes divers vont défiler devant l’estrade pour exprimer leurs témoignages. Les représentants des familles maternelle et paternelle vont déplorer « la disparition précoce d’un fils qui laisse un vide qu’on ne pourra plus jamais combler. Un fils qui servait de locomotive pour tout le reste de la famille ». Un ami d’enfance, devenu évêque, va rappeler les souvenirs de cet ami qui « a failli devenir prêtre avant de choisir la voix du journalisme, car disait-il toujours, si je deviens prêtre est-ce que je pourrais avoir assez pour aider mes nombreux petits frères à réussir leurs études ? ».
Témoignages poignants
Paul Alain Kamchi Kamchi, le représentant des amis s’étonne sur « cette curieuse mort qui ne viendra arracher qu’une personne dans un véhicule de six personnes lors de cet accident de circulation». David Nouwou, le rédacteur en Chef de La nouvelle Expression, un quotidien dans lequel Ngalamou travaillait également énonce la vie courte mais dense de ce ‘’turbo » hors pair qui « brillait par une étonnante production journaliste de qualité qui laisse une rédaction inconsolable ». Roland Tsapi, le coordonnateur général du Cmo (club média Ouest) déplore la perte de leur Secrétaire permanent « si prolifique en projet, et présent sur tous les fronts, mais qui partira sans avoir conclu un seul. Dieu avait décidé autrement ». Jean Marc Soboth, le premier secrétaire du Syndicat national des journalistes camerounais (Snjc) regrettera la mort tragique du « syndicaliste engagé qu’était Kisito qui se battait corps et âme pour le bien-être de la corporation des journalistes ». Un dirigeant de Fovu de Baham, un haut gradé de la gendarmerie, en tenue, fera un salut martial à Kisito, avant de présenter les condoléances de la grande famille sportive.
La voix coupée par l’émotion, Roger Wandji, le représentant de Camfoot va rappeler l’œuvre incommensurable de Kinga dans la rédaction. Un travail abondant et rigoureux qui a drainé « une compassion générale des internautes en Amérique, en Europe, en Asie, en Afrique…qui ont inondé le site Camfoot des lettres de condoléances. La rédaction de Camfoot porte à jamais le deuil». Tous les témoignages avaient tous un dénominateur commun, Kisito était un grand homme, multisectoriel qui a précocement quitté la scène le 09 septembre 2006 d’un accident de circulation à Ndikinemeki, ville située non loin de Yaoundé (confère article sur les circonstances de sa mort). Alors qu’il venait de couvrir, brillamment, avec ses confrères, le match Cameroun -Guinée équatoriale du 7 octobre dernier.
Des cœurs à jamais mouillés
De son vivant, tous ceux qui ont connu Kisito regardent davantage les qualités que ses défauts. Toutes les personnes présentes aux obsèques et même ceux qui sont éparpillés aux quatre coins du monde se souviennent de cette grande silhouette, au pas lent et sûr, de cette apparente timidité qui cachait en réalité un homme alerte, vif, souriant et surtout plein de vie.
Une présence discrète, mais significative aux obsèques de Kinga, est celle de maman Madeleine Mbamba, la mère de Guy Bertrand Madjo, un jeune joueur camerounais évoluant à Stafford
Rangers, dans le championnat anglais. Dans l’impossibilité de se déplacer pour le Cameroun, Guy Madjo a envoyé sa mère le représenter et une enveloppe pour la famille éplorée. Camfoot.com, quant à lui, s’est assuré que Kisito, son correspondant principal et administrateur, soit accompagné de manière digne à sa dernière demeure. La palme d’or revient aux internautes de la mailing-liste de Camfoot, qui, au-delà des mots de condoléances, ont cotisé une importante somme d’argent remise à la famille du défunt qui laisse derrière lui Diane, une amie inconsolable et quatre petits frères et soeurs: Michel, étudiant à l’institut national de la jeunesse et de sport (Injs), Marguerite, étudiante à l’université de Yaoundé I, Jeanne Paule, élève à Loum et Antoine qui fréquente un lycée de Bafoussam. Si tout le monde reconnaît que Kisito n’a pas laissé d’enfant sur terre, Guy Modeste Djuidje, l’ami et le confrère soutient mordicus dans un humour décapant : « Kisito a accouché des articles de presse qui survivront des milliers d’années plus tard ».
Ainsi, cinq jours après son décès survenu le 9 Octobre 2006 des suites d’un accident de circulation sur la route nationale Yaoundé – Bafoussam, Ksito repose enfin dans sa dernière demeure Loum (Moungo), aux côtés de son feu frère ainé et de sa mère feue Marie Thérèse Nana.
Mathieu Kisito Ngalamou laisse derrière lui une foule de personnes inconsolables. Et si jamais nos larmes venaient de cesser de couler, nos cœurs resteront à jamais mouillés. Salut l’artiste !
Eric Roland Kongou, à Loum