Une heure avant le début de la rencontre Racing-Victotia United de Limbé comptant pour la 8è journée du championnat de D1 disputée lundi 5 avril dernier à Bafoussam, le quartier Bamendzi qui abrite le stade municipal de la même ville, grouille déjà de monde. Dans cette zone des bas fonds qui tourne le dos à quelques petits sommets, le nouveau bâtiment de l’évêché semble s’imposer à tous.
Soudain, un frisson parcourt ce maelström d’odeurs et de couleurs: les portes du stade de Bamendzi s’ouvrent. Par grappes, en petites foulées, les hommes et les femmes se dirigent vers l’enceinte qui, vingt minutes plus tard, déjà pleine, vibre au son des fanfares bigarrées et des tambours qui ne se tairont que quatre vingt dix minutes après, dans la joie. Racing de Bafoussam vient de réaliser un autre coup en battant son adversaire du jour par trois buts à zéro. Le » Tout puissant de l’Ouest » garde ainsi la première place et confirme par ailleurs son invincibilité dans la poule B, en alignant cinq victoires et deux matches nuls: dix buts inscrits et aucun encaissé pour dix sept points dans la cagnotte.
La chaleur monte dans presque tous les quartiers sulfureux de la capitale provinciale de l’Ouest. Certains sympathisants du porte fanion de Bafoussam, prétentieux, voient plus loin et songent déjà à un titre cette saison sportive. La bière coule à flots dans les bars. L’ambiance est chaude: » Il faut saluer cette victoire « , lance un fêtard, la voix emportée par des litres d’éthanol. Les klaxons d’automobiles retentissent à perforer le tympan. Même ceux qui n’ont pas regardé une seule seconde de ce match se mêlent à l’euphorie. L’atmosphère devient dès lors insoutenable. Rien n’indique qu’on va se coucher tôt. On n’avait pas encore vu cela depuis plusieurs saisons. Pas même à l’époque où le Tpo était vraiment puissant et comptait dans ses rangs une constellation de stars : Alain Serges Tsémo, Raphaël Ndoumbou, Richard Tchakounang, Fogué, Henri Nwosu, Boniface Panebeng, Olivier Djappa, Alexis Eyala, Bruno Djeukam Hameni, Kombou, Sylvestre Talom, Tabi Kassara, feu Jean Paul Nguetché, Mouzong, Joël Moussinga, Paul Yonkeu, Jules Nono, Simon Nlend, Samuel Tchoupo, Denis Chantal Ndé, Manfred Ndouma, Ibrahim Ndangsabé, David Embé, Elie Pigou. Ou encore récemment avec Mbella, Idrissou Mohamadou, Serges Patrick Kwetché, Gérémi Njitap. Une période au cours de laquelle Racing faisait bien rêver des gens. Aujourd’hui, c’est comme si on revoyait cette belle époque-là. L’équipe se compose à nouveau de jeunes loups aux dents très longues. Des garçons époustouflants, prêts à tout terrasser sur leur passage. A l’exemple du capitaine Ze Sangha et de quelques uns de ses coéquipiers, Kalapack, Semé, Noudjeu, Bihina, Ndedi, Babanda?
L’arrivée de Donatien Koagne à la tête du staff dirigeant, au début des années 90, avait plus que créé des incompréhensions. Jean Jacques Fotso Wabo s’est également essayé à la direction du Tpo, sans véritable succè. Pourtant, le Tpo ne manquait pas de techniciens. Nana Saleng, Pierre Tatchoum et Jean Youdom ont apporté, tant bien que mal, leur part de contribution à une équipe considérée comme mythique. Jules Frédéric Nyongha a pris le relais actuellement pour donner un peu plus de vie à une formation qui commençait déjà à sombrer dans une sorte de léthargie. Son expérience en la matière et son passage dans plusieurs clubs de D1 (Prévoyance de Yaoundé, Coton Sport de Garoua, Mont Cameroun de Buéa…) aidant, la mayonnaise est sans doute en train de prendre. Petit à petit, le Racing new look fait son petit bonhomme de chemin. Un exploit pour un club qui n’avait cessé de briller pas de piètres prestations. Qui arrêtera le » Tout puissant de l’Ouest » ? Notamment en ce moment où l’on note comme un grand retour des supporters dans les travées du stade de Bamendzi.
Et la détermination de l’actuel président du conseil d’administration du Racing, Samuel Wembé, à ne pas rentrer bredouille au soir de la 45ème édition du championnat d’élite. Principal pourvoyeur de fonds, ce dernier n’a cependant pas opéré une révolution en ce qui concerne les primes de match qui sont restées inchangées: 30.000 par match gagné et 10.000 Fcfa après un match nul. Des montants qui sont payés régulièrement et sans retard, de peur de fragiliser le bloc. Si le décalage est considérable entre le premier et le second de ce groupe, il paraît qu’il relève davantage de la psychologie de groupe que du football proprement dit. Racing, c’est la jeunesse et l’enthousiasme aussi. Sur le terrain les résultats sont également le fruit d’un travail de titan. L’engagement du club des supporters, l’Armée Cinglée, en rajoute à la rage de vaincre. L’animation au sein du Tpo, c’est son affaire.
Michel Ferdinand