À Douala, on a supporté le Fc Barcelone comme si c’était les Lions indomptables. Dans un cabaret non loin de la Cité Universitaire de la capitale économique du Cameroun, plusieurs personnes, dont une bonne poignée habillées aux couleurs du club catalan, étaient en délire au coup de sifflet final.
« Parlez encore ! Le Fc Barcelone n’est rien sans Eto’o. Après avoir fait une passe décisive à Ronaldinho sur l’action du premier but, il assassine Benfica grâce à son but à la fin du match », hurle un fan à gorge déployée. Réplique de son voisin d’en face : « Même si les Lions [indomptables, ndlr] ne vont pas à la coupe du monde, on a notre Eto’o qui impose le respect à tout le monde ». Alors que le bouillonnant public quitte les écrans, quelques enfants scandent déjà le nom du goléador, à tu tête, sur la route : « Eto’o, l’homme du match !!! »
Ce mercredi soir était un jour pas ordinaire pour les Camerounais de Douala comme c’est le cas dans tout le pays. Dès l’entame de cette rencontre de quart de finale retour de la ligue des champions contre Benefica Lisbonne, les indécrottables fans de Samuel Eto’o Fils y vont, chacun de son commentaire. A l’instar d’un cube qu’on met dans toutes les sauces, certains trouvent même le moyen d’introduire le nom de l’attaquant ivoirien de Chelsea : « J’espère que Drogba est devant son écran pour voir la leçon de football qu’Eto’o va développer tout à l’heure » lance Abraham Moussa, un ‘’bendskinneur » (conducteur de moto de taxi) qui, après avoir garé son engin, entre dans le cabaret. Chaque touche de ballon de Samuel est commentée, analysée, avec beaucoup de passion. Avant les dix premières minutes, le Barça obtient un penalty. L’homme à tout faire du Camp Nou, Ronaldinho exécute un tir foudroyant qui est renvoyé par le gardien portugais. Notre public est debout, les mains sur la tête : « Mais pourquoi il n’a pas laissé ce penalty à Eto’o qui pouvait le marquer sans problème », lance une voix. On a vite oublié qu’un penalty peut être manqué par tout joueur. Réplique instantané de son vis-à-vis : « Mais gars, tu oublies que c’est à cause d’un penalty raté par Eto’o que les Lions sont rentrés en quart de finale de la dernière Can ? »
Marche de soutien à Eto’o
Prenant à contre-pied certains qui doutaient de lui, Eto’o tient à marquer les esprits. Très inspiré, le goléador est intenable. Permutant régulièrement sa place avec son coéquipier Ronaldinho. A la 19′, l’artificier des Lions indomptables fait un festival de dribble sur le flanc droit, exécute un parfait centre en retrait sur les pieds de Ronaldinho qui pousse le ballon au filet. C’est le 7è but en champions league du Brésilien. 1-0 pour le Barça. « Voilà Eto’o qui est passeur décisif, cet enfant sera ballon or européen cette année », commente un téléspectateur.
A la seconde mi-temps, la domination des Catalans est infructueuse. Elle subit un coup avec le réveil des Portugais qui font des infiltrations dans la défense du capitaine Puyol. Un but d’égalisation du Benfica, et le Barça est éliminé. Tout le monde garde en encore à l’esprit la grosse désillusion de l’Olympique Lyonnais la veille qui détenait encore la qualification jusqu’à la 90′ avant d’encaisser deux buts en trois minutes. Le Nou Camp arrête sa respiration ; le public de notre cabaret aussi. 89è minute. Grâce à un pressing du Pichichi et un excellent jeu collectif, les Catalans donnent un caviar à Eto’o, très en forme, qui élimine le dernier défenseur d’un bel amorti, avant de fusiller le gardien Portugais. 2-0 pour le Barça. C’est le but du break. Le Nou Camp est debout, le public du cabaret de la Cité Universitaire à Douala aussi. Tout le monde respire enfin. La qualification pour les demi-finales est acquise grâce à l’enfant du coin, le petit gars de « New-Bell », Eto’o Fils, qui inscrit son 5è but en champion’s league, faisant de son club la meilleure attaque de la compétition (21 buts) devant Milan Ac (20 réalisations).
Ironie du sort, les deux meilleures attaques se rencontrent en demi-finale dans deux semaines. « On a vu un Samuel Eto’o passeur décisif, buteur et surtout récupérateur. Il a livré un match complet », analyse un expert sur une chaîne de télévision qui fait le bilan de la rencontre. Autant d’arguments qui font dire aux habitants de la capitale économique que la qualification du Barça tient d’abord à l’œuvre de Samuel. Une ville de Douala qui prépare déjà sournoisement une marche de soutien à travers la cité samedi prochain, pour soutenir et encourager Samuel Éto’o et d’autres joueurs africains, face à la montée des propos et des comportements racistes dans certains stades et médias européens.
Eric Roland KONGOU, à Douala