La confrontation a eu lieu. Elle a partiellement tenu la promesse des fleurs. Un supporter camerounais laisse sa vie sur le carreau. De nombreux blessés. La rencontre revêtait plusieurs enjeux pour les deux équipes : revanche, consolidation des acquis, maintien en pôle position dans la poule C, meilleure formation nationale africaine de l’heure… On avait annoncé un match très explosif, enlevé, très disputé, de haute facture entre Camerounais et Ivoiriens.
On attendait les prouesses et envolées de Didier Drogba. On attendait les duels entre l’attaquant marseillais et Rigobert Song Bahanag, libéro des Lions Indomptables d’une part et Samuel Eto’o Fils, le goléador, d’autre part. Conséquences, le public, camerounais et ivoiriens, nombreux, a convergé vers le stade Ahmadou Ahidjo de Yaoundé dès le lever du jour ce 4 juillet 2004 pour vivre de près, cette effervescence. Du Nord au Sud, de l’Est à l’Ouest, les supporters des Lions Indomptables ont pris le chemin de Yaoundé. Dès 10 heures du matin, les billets d’entrée au stade étaient épuisés. Oumarou Fadil, Maire de la Commune urbaine de Douala 3, venu à Yaoundé pour assister à la rencontre, n’a pas eu la chance de vivre en direct les deux buts de Samuel Eto’o Fils et de Guy Feutchine, faute de billet d’entrée au Stade. Joseph Owona, ministre de l’Education Nationale et Grégoire Owona, ministre en charge des Relations avec les Assemblées, ainsi que d’autres personnalités de la République, bien que possédant les billets de la tribune présidentielle ont été bousculés par l’immense foule qui s’est spontanément massée autour du stade Ahmadou Ahidjo. Comme on le constate, la détention d’un billet ne conférait pas forcément la qualité de spectateur. Il fallait user un peu de longs et gros bras pour se frayer un passage. Nombre de spectateurs en possession du » sésame » n’ont pas pu assister à la rencontre. Ils ont été bloqués à l’extérieur, faute de place. On chiffre à 120 000 le nombre de personnes qui s’est déplacé pour la cuvette de Mfandena. Du coup, les spéculateurs occasionnels se sont longuement léchés les babines autour du stade. Les billets de 20 000 f cfa sont passés à 25 000. Ceux de 3000 f cfa à 7 500. Et ceux de 1000 f cfa à 1500 fcfa. Un supporter qui n’aura pas eu la chance de vivre cette effervescence en direct et qui n’aura même pas eu la veine de voir la victoire de Samuel Eto’o Fils sur Didier Drogba, c’est Abdoulaye Dahirou. Parti de Douala, la capitale économique, où il exerce comme commerçant, il trouve la mort à Yaoundé, suite à un accident de la circulation, alors qu’il se rend déjà au stade pour assister à la confrontation. Il est percuté, en même temps qu’une jeune fille par une moto à vive allure qui le tue sur le champ. La demoiselle est conduite à l’hôpital. Dans les gradins du stade omnisports, on dénombre au moins quatre cas d’évanouissement, immédiatement transportés dans les centres hospitaliers de la ville de Yaoundé. Le match s’est aussi joué ailleurs avec la même ardeur que sur le terrain.
Sur l’ensemble, les Lions Indomptables remportent une victoire psychologique importante pour la suite de la compétition. Non seulement, ils retrouvent la première place du groupe C, mais ils regagnent la confiance des spectateurs et supporters qui commençaient déjà à désespérer après trois quarts d’heure de jeu. Le Cameroun a certes gagné deux buts à zéro, estampilles de Samuel Eto’ Fils et de Guy Feutchine, mais son jeu n’a pas proprement convaincu. Amorphe et terne au départ, il a repris du poil de la bête avec les remplacements survenus au cours du jeu, marqués par les entrées de Guy Feutchine, Patrice Abanda et Pius Ndiefi Sielenu. Si Souleymanou Hamidou, le nouveau gardien de buts, qui a pris la place de Idriss Carlos Kameni et la défense camerounaise ont quelque peu rassuré, il n’en est pas de même du milieu de terrain et de l’attaque qui se réveillaient sporadiquement pour quelques actions d’éclats. Winfried Schäfer, malgré cette victoire a encore du pain sur la planche. En attendant la future confrontation, Didier Drogba a perdu la confrontation avec Samuel Eto’o Fils, mais il sort vainqueur au Cameroun. Il a eu la possibilité de constater qu’au Cameroun, il est plus populaire que certains Lions Indomptables. Des effigies de cet attaquant talentueux ont été dressés dans les quartiers de Yaoundé comme Essos. A l’entrée de l’Hôtel Hilton, où étaient logés les Ivoiriens, ses fans camerounais ont élu domicile, juste pour poser le regard sur lui et faire des photos.
Gabriel LEUMALEU à Yaoundé