Au jour d’aujourd’hui, il est difficile de trouver au Cameroun des joueurs de la trempe de Manga Onguéné ou Eugène Ekoulé qui, dans les années 70 et 80, ont fait courir la quasi-totalité des amoureux du sport-roi camerounais. Au fil des saisons, nombre de footballeurs ont marqué l’histoire du football camerounais par leur capacité de tout mettre en œuvre sur un stade pour marquer des buts au cours des matches comptant pour les compétitions nationales.
Des réalisations qui, à force de provoquer l’hystérie collective et les des passions en tous genres dans les stades ont fini par conférer à leurs auteurs le titre de buteurs de race. De l’avis de plusieurs observateurs avertis, c’est dans les années 70 et 80 que le sport-roi camerounais a enregistré une bonne brochette de renards des surfaces évoluant dans des équipes engagées en compétitions nationales. Des footballeurs ayant marqué leur époque par des buts décisifs et en grand nombre au Cameroun, à l’instar des célébrités mondiales telles Pélé, Puskas, Just-Fontaine, Paolo Rossi, Emilio, Butragueno dit “ El buitre ”, Diego Maradona, Van Basten, Joan Cruyff, Karl Heinz Rummenige, Gerd Muller, Jean-Pierre Papin, Laurent Pokou et autres footballeurs talentueux sur qui reposait souvent le sort de leurs équipes.
Des goléadors du championnat d’élite du football camerounais qui, depuis 1959 se déroule bon an mal an, Charles Léa Eyoum, Albert Roger Milla, Jean Manga Onguéné et Eugène Ekoulé sont des symboles les plus marquants. Mais, ces attaquants qui ont brillé dans la première moitié des années 70 (Charles Léa Eyoum au sein de l’Aigle de Nkongsamba puis du Diamant de Yaoundé, Albert Roger Milla dans Léopard de Douala puis Tonnerre de Yaoundé) puis dans la deuxième moitié et au début des années 80 (Jean Manga Onguéné dans Canon de Yaoundé et Eugène Ekoulé au sein du Caïman de Douala puis de l’Union de Douala et Dihep di Nkam de Yabassi) ne sont que la partie visible de l’iceberg car, le glacier ne paie pas de mire. Le pionnier camerounais en matière de renard des surfaces est à n’en point douter le maréchal Mbappé Leppé dont les exploits relèvent souvent de la légende. Son tir était si puissant qu’on raconte qu’“il avait tiré une balle de tennis en l’air et elle n’était retombée que quatre jours plus tard”. Avec son équipe Oryx de Douala, son plus grand fait d’arme est, pour nombre d’observateurs avertis, la conquête victorieuse de la toute première coupe d’Afrique des clubs champions à Accra devant le président N’Krumah médué. Bien que déjà décédé dans le dénuement total, Mbappè Leppé qui fut l’une des meilleures gâchettes du championnat national de football de première division dans les années 50 et 60 est resté indélébile dans la mémoire collective. Sa réputation, bien qu’il ne soit plus de ce monde au jour d’aujourd’hui, est toujours grande.
Eparpillés dans les clubs de l’élite
A l’époque, chaque club du championnat d’élite du football au Cameroun avait en son sein son buteur attitré, un goléador de race. L’on pense certes à plusieurs joueurs, notamment Norbert Owana “ l’enfant chéri ” du célèbre président Samuel Kouam (d’illustre mémoire) de l’Union de Douala mais, il faut reconnaître que Albert Roger Milla, Charles Léa Eyoum, Jean Manga Onguéné et Eugène Ekoulè ont fait rêver nombre d’inconditionnels des compétitions nationales et inter-clubs africains dans lesquels les équipes camerounaises étaient engagées dans les années 70 et au début des années 80. Rejeté par les dirigeants du Tonnerre de Yaoundé parce que trop frêle à leur goût, Jean Manga Onguéné s’est engagé chez le frère ennemi de la capitale, Canon de Yaoundé au sein duquel il s’est imposé comme l’un des plus grands buteurs de l’histoire du football camerounais. Doté d’un excellent jeu de tête, il a, grâce à celui-ci, permis au Canon de Yaoundé de survoler tant le Cameroun que l’Afrique. Albert Roger Milla est révélé au grand public en 1972, au sein de Léopard de Douala qui, en déplacement à Conakry pour rencontrer le Hafia (à l’époque, cette équipe guinéenne survolait les compétitions africaines de clubs) a éclaboussé la rencontre de son talent ; résultat : 4 buts à 2.
Avant de partir du Cameroun pour la France, à Rennes où sa carrière n’a malheureusement pas été un grand succès pour cause de blessure, Charles Léa Eyoum a, quant à lui, imprimé sa marque au sein de l’Aigle de Nkongsamba puis du Diamant de Yaoundé. Excellent dribbleur et buteur hors pair, il renforça le Canon de Yaoundé en finale de coupe d’Afrique des clubs champions contre les Ghanéens de l’Ashanti Kotoko de Kumasi. Un renfort gagnant car, c’est grâce au but de Charles Léa Eyoum, à l’époque sociétaire et buteur attitré du Diamant de Yaoundé, que le club de Nkoldongo (Canon) avait remporté le titre de champion d’Afrique des clubs champions. L’autre grand buteur qu’a enregistré le championnat d’élite de football est bien sûr Eugène Ekoulé. Revélé dans Caïman de Douala, c’est dans l’Union sportive de Douala que Eugène Ekoulé dit “ Sam Mangwana ” a explosé en marquant des buts à profusion. Goléador pouvant inscrire des buts dans toutes les positions, Eugène Ekoulé détient encore la palme de meilleur buteur africain en compétitions inter-clubs, enlevée au début des années 80 avec 27 buts. Chaque fois que l’on parle d’Eugène Ekoulè, on pense à ce titre et aux multiples oppositions Canon-Union. Car, Ekoulé dans l’Union et Manga dans le Canon étaient d’excellents renards des surfaces adverses. Le plus souvent, dès que l’un marquait pour son club, l’autre repliquait pour le sien.
Après l’époque des buteurs prolifiques Léa Eyoum, Milla, Ekoulé, Manga Onguéné, l’on a enregistré d’autres renards des surfaces qui, malheureusement, n’ont pas longtemps participé aux compétitions nationales de football organisées par la Fédération camerounaise de football (Fécafoot) sur le triangle national. Tout simplement parce que, après avoir marqué quelques buts, ils ont cru qu’ils étaient déjà accomplis et se sont expatriés pour des carrières professionnelles.
Raould Noumbissi et Honoré Foimoukom, Le Messager