Lors de son interview à RFI ce jeudi, Samuel Eto’o a évoqué sa candidature au comité exécutif de la Confédération Africaine de Football (CAF). En arrière d’une ambition pour moderniser le football africain, se cachent des contradictions par rapport à sa gestion de la FECAFOOT. C’est désormais à la CAF que le Samuel Eto’o veut évincer son ex-ami Seydou Mbombo Njoya, actuel membre du comité exécutif. Est-ce une quête personnelle d’influence ou une vendetta bien sentie?
Il a justifié sa candidature par la nécessité d’une rupture à la CAF. Cette instance est déjà en rupture avec celle, corrompue, de son ami Ahmad. Conseiller Spécial du Malgache, Samuel Eto’o et autres avaient conduit la CAF au bord d’un gouffre financier absolu. En plus, sa candidature entre en contradiction avec son discours sur l’unité et la promotion des intérêts camerounais. En affrontant Seydou Mbombo Njoya, qui dispose déjà d’une place au comité exécutif, Eto’o divise inutilement les camerounais.
Les règles de la CAF autorisent les candidats sortants à se représenter. Samuel Eto’o nuance et explique que :
La CAF n’aura, au long de toutes ses années d’existence, connu de cas où une fédération refuse à son représentant de défendre son mandat. Elle devrait donc trancher à savoir si cette obligation de parrainage est valable pour les candidats sortants. Si cela s’avère nécessaire, Mbombo Njoya peut bénéficier d’une “lettre de parrainage” d’une autre fédération d’un pays membre de l’UNIFFAC. Tout ceci fait que l’on accuse Samuel Eto’o de constamment choisir la confrontation. Certains y voient une tentative de régler des comptes personnels avec Mbombo Njoya, qu’il avait évincé de la FECAFOOT en 2021. Ce duel, qui aurait pu rester local, s’exporte désormais sur la scène continentale, où il met en lumière une incapacité à transcender les rivalités pour le bien commun.
Des intentions réelles questionnées
Eto’o affirme vouloir transformer la CAF en instaurant plus de transparence et de professionnalisme. C’est clairement la charité qui se moque de l’hôpital. Il faut dire que l’ancien “une-seule-fois-Pichichi-malgré-Ronaldinho-Xavi-Messi-Iniesta-Deco” a transformé le football camerounais en une noirceur sans fin. On n’évoque même plus la transparence. Par exemple, personne, même pas son Comité Exécutif, ne sait combien d’argent les sponsors versent à la fédération par année. En réalité, cette ambition de transparence semble tellement dissonante avec ses propres pratiques à la FECAFOOT. Depuis son arrivée à la présidence de la fédération, sa gestion est critiquée pour son autoritarisme, sa manipulation des résultats de matchs, un manque de concertation et probablement des détournements de fonds.
Il semble désormais clair que Eto’o semble moins motivé par le développement du football africain que par une volonté de consolider son influence personnelle. C’est cette quête de pouvoir qui détourne l’attention des réformes promises au niveau national, où la FECAFOOT continue de faire face à des défis majeurs, notamment dans la structuration des compétitions locales et la gestion des sélections nationales.
Un contexte favorable à Seydou Mbombo Njoya
Face à Samuel Eto’o, Seydou Mbombo Njoya apparaît comme une figure de continuité. Ancien président de la FECAFOOT et membre en exercice du comité exécutif de la CAF, il dispose d’un réseau bien établi. Il bénéficie d’un certain nombre de soutien auprès de figures influentes du football africain. Il est aussi un homme sur qui Patrice Motsepe s’est appuyé pour s’installer après son élection à la CAF.
Mbombo Njoya a parfois été critiqué pour son manque d’audace, mais il est perçu comme étant un homme de consensus. Contrairement à Samuel Eto’o qui multiplie les polémiques, le Sénateur Njoya mise sur une diplomatie discrète.
Les controverses d’Eto’o comme frein à sa candidature
La candidature de Samuel Eto’o est également affaiblie par plusieurs controverses. Il purge depuis le 30 septembre une suspension du Comité de Discipline de la FIFA pour six mois. Sa condamnation en Espagne pour fraude fiscale, et la polémique autour d’un contrat signé avec une plateforme de paris sportifs jettent une ombre sur son intégrité. Le fait aussi que le gouvernement camerounais lui retire toute prérogative de gérer les subventions publiques prouve ses difficultés avec les finances.
Ces scandales alimentent des doutes sur sa capacité à incarner le changement qu’il prône pour la CAF et dont il n’a pas fait montre à la Fécafoot. En outre, son style de leadership, souvent perçu comme autoritaire, pourrait ne pas convenir à une instance continentale où le compromis est essentiel.
Un manque de soutien clair de la CAF et de la FIFA
Bien que Samuel Eto’o dise entretenir de bonnes relations avec Patrice Motsepe, président de la CAF, et Gianni Infantino, président de la FIFA, ces soutiens restent pour l’instant discrets. Il se pourrait d’ailleurs que Motsepe pourrait privilégier Mbombo Njoya, considéré comme moins clivant.
Cette absence de soutien explicite de la part de ces figures clés soulève des interrogations sur la véritable capacité d’Eto’o à rassembler au-delà de sa popularité. Son passé d’icône du football ne suffit pas à masquer les zones d’ombre de sa gestion actuelle et les divisions qu’il crée.
Une vision continentale floue
Si Samuel Eto’o critique l’opacité de la CAF et promet des réformes, son discours tranche avec ses réalisations avec la Fécafoot. Ce flou alimente l’idée qu’il pourrait utiliser la CAF comme un tremplin politique ou comme un moyen d’accroître sa visibilité internationale, plutôt que comme une plateforme pour des réformes durables.
Les ambitions du gars de New-Bell mettent en lumière un paradoxe : celui d’un dirigeant prônant le rassemblement, mais dont les actions alimentent continuellement les conflits. Cette vendetta contre Seidou Mbombo Njoya n’a pas lieu d’être. Mais
Seydou Mbombo Njoya, avec son approche plus modérée, pourrait apparaître comme une alternative plus pragmatique, bien que moins spectaculaire. Si Eto’o ne parvient pas à clarifier ses intentions et à rassurer sur sa capacité à fédérer, sa candidature pourrait être perçue comme un symbole de division, plutôt que de renouveau.
Une ambition qui divise plus qu’elle ne fédère
Samuel Eto’o, malgré son statut légendaire, semble pris dans une quête d’influence qui pourrait nuire autant à sa crédibilité qu’à celle du Cameroun. En s’opposant frontalement à Seydou Mbombo Njoya, il met en lumière des fractures internes qui affaiblissent la représentation du pays sur la scène continentale.
Alors que le football africain a besoin de dirigeants capables de transcender les rivalités personnelles pour bâtir un avenir commun, la candidature d’Eto’o, entachée de controverses et d’ambiguïtés, risque de diviser davantage qu’elle ne rassemble. Une situation qui pose la question de la priorité : l’intérêt du football ou celui de l’homme ?