Monsieur Owona n’aurait pas, selon la rumeur, le moindre ennemi. Cela n’est pas raisonnable pour un homme public de sa trempe et, en toute honnêteté, c’est plutôt inquiétant. Car si cela était avéré, une telle tare serait rédhibitoire pour l’accès au pinacle d’un comité justement chargé de mettre la main dans le cambouis, de secouer des fourmilières et, en définitive, de fâcher beaucoup de gens.
Ce qui n’est pas une rumeur toutefois, c’est que M. Owona a la fesse bien tondue et, en bon séducteur, aime plaire à tout le monde. Nous n’allons pas battre froid à un grand mandarin qui, chose rarissime dans le sérail, a la réputation de ne pas se conduire comme un soudard, mais nous devons lui rappeler qu’il ne saurait, ni par coquetterie de dandy vieillissant ni par étourderie, perdre de vue le trophée qu’il a été chargé de ramener.
La lamentable situation dans laquelle se trouve la gouvernance du football camerounais est étroitement liée au désespoir que cause l’impossibilité matérielle de mettre le président de la Fécafoot à la porte par des voies légitimes. Tout tourne autour de la fonction de président, des conditions d’accès à cette fonction, des pouvoirs et attributions connexes et, c’est indéniable, de l’absence d’un contre-pouvoir. C’est là le nœud du problème. M. Owona ne peut pas ne pas le savoir.
Relecture, retoilettage, remise à plat, refondation, du blabla que nous ont servi ad nauseam des générations de MINSEP totalement étouffées par la puissance du président de la Fécafoot. Tout cela n’a servi à rien, peut-être juste à amener les gogos que nous sommes à croire que les pouvoirs publics et les grands acteurs de la planète foot faisaient quelque chose. Mais nous nous doutions alors et nous sommes convaincus maintenant que la citadelle que M. Iya, pour ne citer que lui, avait érigée, était imprenable. Il n’a pratiquement jamais été possible, quelle que soit la qualité de l’assaut, de battre M. Iya à un quelconque scrutin.
Le travail de M. Owona est quand même assez aisé, à la fin. Tout ce qu’il a à faire, tout ce qu’on attend de lui, c’est qu’il donne une chance à l’alternance au sommet de la Fécafoot. Il suffit, pour ce faire, de simplifier les conditions d’accès à la présidence, de colmater deux ou trois poches de corruption et de fermer un ou deux circuits de clientélisme qui rendent les divers comités de la Fécafoot pratiquement inopérants.
Il restera juste au professeur président, pour faire bonne mesure, de redéfinir les rapports qui doivent exister entre la Fécafoot et l’État en réaffirmant clairement que c’est à la Fédération que revient le privilège exclusif de diriger le football camerounais au Cameroun et à l’étranger, parce que le football est une activité privée qui doit être, comme cela se passe ailleurs avec beaucoup de bonheur, gérée par une institution privée. Accessoirement, le professeur devrait demander que soit abrogé le vieux décret de M. Ahidjo qui ne fait même plus rire même s’il nourrit beaucoup de personnes. Cela permettrait enfin à M. Owona d’accéder au hit-parade des hommes honnis de la République. Ce qui n’aurait rien de négatif dans ce cas-ci.
Léon Gwod