Depuis le Marrakechgate, l’idée me démangeait d’écrire un pamphlet un peu musclé contre la Fécafoot, afin de rétablir quelques vérités, surtout concernant Samuel ETO’O.
La lourdeur de la sanction individuelle qui s’est abattue sur le capitaine, mêlée au déni complet de la moindre responsabilité des dirigeants du football camerounais ont fini par dissoudre le peu de crédit que le peuple pouvait encore avoir en cette institution. Les nuages qui s’amoncellent aujourd’hui au dessus de Tsinga ne surprennent personne, mais passons !
L’esbroufe et le cynisme qui ont permis à la Fécafoot de faire de Samuel ETO’O la source de tous les malheurs du football camerounais étaient nauséeux. Mais l’effet recherché, qui visait encore une fois à détourner l’attention des vrais sujets a été largement atteint. Et comme le supporteur est par nature ingrat, on a vilipendé Samuel ETO’O, allant jusqu’à dire qu’il n’a jamais rien fait pour les Lions Indomptables, comme si le football était un sport individuel. On a vite oublié qu’en 2000, il est devenu un joueur essentiel, participé activement à la conquête de trois titres majeurs avec les Lions, alors qu’il n’avait que 19 ans. C’est vrai, deux CAN et une médaille d’or aux JO c’est pas grand-chose. Une finale de Coupe des Confédérations non plus !
On dit à Tsinga que comme il est riche, Samuel ETO’O veut tout contrôler, et tout faire tout seul. Il est Ministre des sports, Président de la Fécafoot, Entraineur national, Capitaine et joueur. Il sélectionne les joueurs, négocie les matchs amicaux, intervient pour l’obtention des visas pour les joueurs, décide du système de jeu et des remplacements. Soit ! Si on l’accuse de tant de maux, il doit certainement être coupable de quelque chose. Mais si tout cela était vrai, il serait légitime de se poser la question de savoir qui a permis à Samuel Eto’o de faire autre chose que jouer ? Avec des grand ministres des sports comme Félix TONYE MBOCK, André NGONGANG OUNDJI ou Ibrahim MBOMBO NJOYA, Eto’o ne se serait jamais retrouvé en train d’intervenir pour que les joueurs aient des visas pour un match officiel. Quand IYA Mohammed a nommé l’incompétent Denis LAVAGNE à la tête des Lions, tout le monde a vu l’échec se pointer, gros comme un immeuble, sauf lui. Après, c’est astucieux de dire qu’il a échoué à cause de Samuel ETO’O. Si ses choix nous ont éliminés pour la CAN, c’est qu’ils étaient contestables. Samuel ETO’O n’aurait jamais contesté les choix de NEPOMNIACHI, Claude LEROY, Pierre LECHANTRE ou Arthur JORGE.
De passage au siège du SCO d’Angers en France, j’ai décompté sur la carte de la ville 21 terrains de foot (aires de jeu non comprises SVP), pour une petite ville de 395 000 habitants. A Yaoundé, une mégapole de 2. 440 000 habitants, toutes les aires de jeu de notre enfance ont été vendues pour la construction des églises et des stations service. Pardon ! Combien de fois doit-on nous répéter que le Cameroun c’est le Cameroun ? Je veux bien que Samuel ETO’O soit la source de tous nos problèmes, mais c’est pas à cause de lui que le championnat de DII dans le Littoral s’est joué toute une saison sans licences, sans que personne à la Fécafoot ne soit scandalisé.
Dans ce pays, décidément, on marche sur la tête. Nous avons un sens des priorités qui défie toute logique. Dans un pays où les gamins n’ont pas de ballons pour s’amuser, on exige aux académies, pour chaque gamin, un test du poignet à 13.000F pour déterminer son âge, avant tout enregistrement. Sauf que c’est un test qui est en train d’être abandonné par ses propres initiateurs, la marge d’erreur étant de plus ou moins deux ans. La vraie raison, c’est qu’ils ont été confiés exclusivement à un docteur agréé, et qu’au fond, l’âge des gamins, on s’en fiche. Et alors ! C’est pas parce qu’ils sont gamins qu’on ne peut pas faire les affaires avec les copains en leur nom.
Depuis tellement longtemps, dès que la moindre réserve est émise sur la gestion du football au Cameroun, nos dirigeants vont pleurnicher à la FIFA, diabolisent tout le monde, crient à l’anti patriotisme, comme s’ils détenaient le monopole du patriotisme. S’ils géraient aussi bien, cela se saurait. Et puis, les affaires qui commencent à se démêler nous en apportent malheureusement la preuve contraire. J’ai récemment rencontré deux grands acteurs de notre foot. L’Ambassadeur Roger MILLA expliquait qu’on en était arrivé à un point où la présence des anciens internationaux n’était plus tolérée au siège de la Fécafoot. Grégoire MBIDA ARANTES quant à lui, s’est dit scandalisé qu’un joueur comme Samuel ETO’O soit jeté en pâture et que personne ne songe à le protéger.
Samuel ETO’O a certainement ses écarts, et loin de moi l’intention de les justifier. Par contre, qu’on l’admire ou qu’on le déteste, personne ne peut remettre son patriotisme en question. Je suis tout simplement choqué que la Fécafoot prenne les camerounais pour des demeurés, et qu’elle utilise indéfiniment des manœuvres à deux sous pour détourner notre attention de l’essentiel. Qu’on veuille construire un siège à quatre milliards, pourquoi pas ? Mais l’argent du foot se gagne sur les terrains et non dans les bureaux. Le Cameroun se fait éliminer deux fois consécutivement pour la CAN, et à la Fécafoot, on nous dit « circulez, y a rien à voir ». Le président veut juste organiser ses élections, sans être embêté. D’ailleurs, si on doit s’en prendre à quelqu’un, c’est bien à Samuel ETO’O parce qu’il a osé réclamer des primes institutionnelles de matchs. Je ne connais pas Samuel ETO’O à titre personnel, mais s’il est le « diable » dont parle la Fécafoot, je voudrai être son Avocat parce que sur le terrain, il donne les arguments pour le défendre.
Claude KANA, Consultant