La dégaine alerte pour un physique de baroudeur, Julien Moulite dégage beaucoup de spontanéité et d’aplomb pour ce qui est des championnats de vacances. Sur le sujet, il démarre au quart de tour et parle sans presque discontinuer de cette passion qui l’habite et l’a poussé depuis le début des années 2000 à s’engager dans cette aventure incertaine dont il est devenu au plan national, un des acteurs majeurs. Promoteur de « Relance-foot » sis au stade Cité Cicam en plein coeur de la ville de Douala, version des plus populaires et la mieux élaborée de cette compétition de circonstance, il nous cause un brin de son expérience. Rencontre avec un saltimbanque d’un autre genre, revenu de toutes les difficultés.
Camfoot.com: Succinctement, présentez nous votre championnat et qu’est-ce qui fait sa spécificité?
Julien Moulite: Le championnat « Relance-foot » dont je suis le promoteur est né il y a de cela une dizaine d’années. Aujourd’hui et ce malgré l’adversité, je suis rendu à la 10è édition. Ce championnat traditionnellement subdivisé en 2 poules, intègre non seulement les équipes des quartiers environnants c’est-à-dire le pourtour immédiat de la Cité universitaire mais aussi celles des équipes venant de très loin. On peut citer sans être exhaustif, les équipes des quartiers Maképé, P.K14 Bonamoussadi, Deido, Bépanda, Kotto et j’en passe. Pour tout dire, c’est véritablement de l’inter quartiers au sens premier du terme.
Camfoot.com: Sous quelle formule se déroule-t-il?
Julien Moulite: L’année dernière vu la grande sollicitation, nous avions 32 équipes réparties en 4 poules de 8 équipes chacune. Après un championnat de 7 journées,on a dû prendre les deux premières équipes de chaque poule pour passer directement à des phases éliminatoires commençant en 1/4 de finale et ainsi de suite jusqu’à la finale. Cette année, nous gérons un effectif de 24 équipes réparties en deux poules. Avec des frais d’affiliation s’élévant à 60.000francs, nous sommes toujours contraints de ne pas faire suite aux nombreuses sollicitations qui nous suivent. Il s’agit de garantir par un nombre suffisamment cohérent, une certaine qualité de jeu et d’engagement.
Camfoot.com: Du premier regard, on constate qu’il n’y a pas d’espaces payants autour de votre aire de jeu. Mieux, vous assurez une sonorisation de qualité, un reportage en direct et déployez même une escouade de sécurité. Tout cela coûte évidemment quelque chose. Quels sont vos partenaires à l’organisation de cet événement et de quels soutiens bénéficiez-vous concrètement?
Julien Moulite: C’est vrai que vous faites un constat clair de la situation. Ici, c’est une vitrine importante et qu’il soit ainsi délaissée, n’est pas faute de n’avoir pas de partenaires. Le problème pour nous, c’est d’avoir des partenaires qui veulent vraiment collaborer et s’engager dans un deal donnant-donnant. On a eu des partenaires qui pour l’ensemble pensent à tort que c’est eux qui nous rendent service et nous pas. Avec un championnat de forte notoriété comme le nôtre, nous avons pensé face à ce comportement, que nous ne pouvions pas nous vendre comme çà, comme des arachides. Simplement, nous ne croyons pas qu’il s’agisse de rentrer dans un schéma de sponsoring ou une ligne déjà tracée d’avance et où pour des miettes on vous invite à adhérer. On a refusé. Ce n’est pas une camisole de force. Il faudrait que ceux qui viennent ou veulent collaborer avec nous acceptent qu’en profitant de notre travail, nous aussi, nous puissions profiter de leur travail…
Camfoot.com: …vous semblez développer de grosses exigences. Précisez nous les montants qui n’ont pas semblé vous convenir.
Julien Moulite: Pour être clair, je dois vous dire que dans mon championnat, j’ai des primes qui s’élèvent à près d’un million. Quand aujourd’hui, je reçois des gens qui viennent me dire qu’ils me donnent 300.000fCFA et entendent m’envahir de toutes parts, je dis que ce n’est pas raisonnable car dans le même temps j’ai des amis qui sans contrepartie sont capables de me prêter main forte. Le seul fait d’avoir un annonceur qui sous prétexte d’habiller les équipes et décorer le stade à sa façon en envahissant une plateforme de visibilité d’importance comme la nôtre pour des broutilles à l’endroit de l’organisation, ne fait pas sérieux. Quelques uns pensent en tendant 3 millionsde francs qu’ils onvrent la porte des miracles. Que vaut cette somme relativement à la lourde logistique déployée pour l’événement? Encore que dans notre contexte, il faut batailler rude pour accéder à cette somme et laisser sûrement des plumes en route.
Pour ne rien arranger non plus, il faut que je vous dise aussi et ce compte tenu de mon expérience, qu’il y a dans ces milieux du sponsoring des lobbies qui se sont formés et des réseaux d’amitiés sans lesquels rien n’est possible si on n’a pas un tel ou un tel autre qui intervient.
Camfoot.com: Seul le mécénat vous apporte alors son soutien?
Julien Moulite: Oui je suis dans une espèce de mécénat si on peut appeler ainsi le soutien des amis. Tout le monde sait qu’ici se joue le plus grand championnat des vacances. Même les sociétés qui font semblant de nous bouder. La preuve il n’y a qu’à voir les sollicitations qu’elles manifestent pour cet espace unique que j’ai développé et bonifié. Les partenariats me sont refusé parce que au sein de ces sociétés là, les responsables savent que je ne suis pas manipulable ni achetable pour des rétro commissions inopportunes.
Camfoot.com: Quid de la Communauté urbaine responsable de l’animation de la ville?
Julien Moulite: J’existe et j’ai fait mes preuves dans la ville. A la communauté urbaine j’ai bien déposé une demande en bonne et due forme. Ils me connaissent et savent que c’est ici, le milieu le plus attrayant de la ville durant la période des vacances scolaires. Je ne trouve pas de raison que l’on sache que quelque part se trouve le meilleur plateau et qu’on n’y soit pas. Sans doute est-ce ma tête qui ne leur plaît pas.
Camfoot.com: Pour finir, quel serait votre vœu le plus ardent pour votre initiative?
Julien Moulite: Je voudrais que les entreprises viennent se mouvoir ici et vendre leur image de marque sur ce lieu par excellence de forte promotion. Mieux, je souhaite en toute sincérité qu’une franche collaboration de respect s’établisse entre les sociétés et nous et qu’enfin, on cesse de vouloir clochardiser les organisateurs des championnats de vacances.
Propos recueillis par Edgar Zacharie Yonkeu