Un coach « blanc » ou un coach « noir »? Le débat est relancé. Si officiellement, on a encore formé une commission mixte (Ministère des Sports – Fédération camerounaise de football) très à la mode chez nous, le président de la Fédération est à la recherche intensive de l’oiseau rare du côté de l’Europe. Cela ne nous empêchera pas de prendre position.
La raison ? Les éliminatoires de la Coupe d’Afrique des Nations Gabon-Guinée 2012 démarrent le week-end du 3 au 5 septembre 2010. Le Cameroun évoluera dans le groupe formé de la RD Congo, du Sénégal, de l’Ile Maurice.
Le chantier laissé par la Coupe du Monde est immense. D’où la question qui taraude l’esprit des Camerounais : Quel coach pour les Lions indomptables ?
Si la plupart des fans soutiennent qu’il faut recruter un entraîneur camerounais, nous avouons que nous partageons également ce point de vue.
Oui, pour un sélectionneur local. Et il y a des noms qui circulent à la pelle : Michel Kaham, Jean Paul Akono, Jules Frédéric Nyongha, Thomas Nkono, Joseph Songo’o, etc. Je nous vois déjà retomber dans nos vieilles habitudes qui consistent à penser qu’en dehors des noms déjà connus, il n’y a plus de techniciens de football Camerounais. Comme si depuis 25 ans, le Cameroun n’a plus produit d’entraîneur, comme si l’horloge s’était arrêtée depuis lors.
Nous avons la faiblesse de penser qu’il faut des hommes neufs. Je n’hésiterais pas à citer une métaphore biblique qui dit qu’on ne saurait mettre du « vin neuf dans des vieilles outres ». Après avoir échoué avec les collectifs d’entraîneurs locaux, les « blancs », il est temps de tourner la page et donner la chance aux hommes neufs. Des hommes de poigne qui ne sont pas (encore) dans la combine ambiante autour de la tanière des Lions.
A propos des hommes neufs, j’entends des noms tels que Joseph Antoine Bell, Oman Biyick, Eugène Ekéké, Patrick Mboma, etc… qui sont crédités d’une bonne expérience de footballeur mais qui sont aussi des hommes au caractère trempé. De toutes les façons, au point où nous sommes rendus, peut-on faire pire ?
Il faudrait aussi être conséquent: le travail technique est un travail d’équipe. Ces hommes doivent être adjoint des professionnels de métier, rompus à la compétition. Avoir un sélectionneur camerounais et deux ou trois adjoints européens peut faire avancer les choses, le camerounais étant le décideur; un peu comme on encadre un jeune surdoué pour ses futurs tâches manageuriales.
Sur quoi tabler ?
LES CRITÈRES DE SELECTION
Un contrat de longue durée
Ceci est nécessaire pour bâtir une équipe forte et soudée. Le selectionneur sera ainsi à mesure de planifier sur du long terme, pourra laisser mûrir des joueurs pour que la mayonnaise puisse prendre. L’échéance de 2014 nous interpelle.
Un bon salaire
Les meilleurs s’arrachent. Et le salaire, sans être un élément de motivation, est un élément motivateur. Le nouveau sélectionneur doit être à l’abri du besoin. Ceci permettra à l’entraîneur d’éviter la mendicité dont certains techniciens locaux sont souvent accusé à tort ou à raison ou d’éviter un coach qui « bipe » son joueur sur son téléphone portable pour discuter avec lui comme on a connu par le passé.
Des moyens de travail décents
Malgré le flop dont nous avons été infligé, il faudra éviter de retourner en arrière. La complète autonomie du sélectionneur est primordiale. Elle permet de restituer les responsabilités. L’heureux élu devrait avoir des avantages similaires à ceux dont a bénéficié Paul Le Guen.
- Des titres de transports pour prospecter les joueurs au Cameroun, en Afrique (où pullulent plusieurs camerounais) et dans le reste du monde.
- Un avion pour son équipe lors des campagnes des Lions indomptables
- La possibilité de choisir son staff avec qui il peut bosser comme cela se passe dans les pays où le football est professionnel, etc.
L’obligation de résider au Cameroun
Presque tous les entraîneurs expatriés recrutés depuis un certain temps par le Cameroun refusent d’habiter le terroir. Or, coacher une sélection c’est aussi gérer les sensibilités des uns et des autres. Et pour le faire avec de la réussite, il faut comprendre comment les individus fonctionnent, ce qui peut les motiver, ce qui peut les frustrer. Il faut connaitre le milieu.
« Les fédérations africaines ont le grand tort de laisser les sélectionneurs diriger leurs équipes nationales en vivant à 10 000 km et en venant que deux fois par mois pour entraîner en Afrique », martèle Claude Le Roy qui a déjà entraîné plusieurs sélections africaines. Voilà l’une des raisons qui explique la débâcle des sélections en Coupe du monde 2010, insiste t-il.
Les pleins pouvoirs
Voilà la pomme de discorde qui a souvent divisé le monde sportif. Les sélectionneurs camerounais, plus d’une fois ont souvent été des marionnettes du politique qui leur dictent parfois la conduite à tenir. Il est temps qu’on aille au-delà des discours officiels et que le sélectionneur ait véritablement les pleins pouvoirs pour diriger son équipe. A cet effet, un entraîneur, fut-il local, doit être de fort caractère pour s’imposer. Le contre exemple de Le Guen ne devrait pas nous faire reculer. C’est la voie à suivre.
La feuille de route
Les objectifs clairs, à court, à moyen et à long terme doivent être spécifiés. Et ici, le contre exemple de Le Guen sera encore cité. Lors du renouvellement de son contrat, le ministre des Sports lui a fixé comme objectif de « remporter la Can avec panache et en Coupe du monde, faire mieux que lors du Mondial 1990 ».
Paul Le Guen par la suite avouera à la presse que la « CAN lui servira de galop d’essai pour le Mondial ». Le technicien français, a ensuite achevé l’espoir des Camerounais en concluant que « c’est à proprement rêver les yeux ouverts que de penser que les Lions arriveront en ¼ finale de la coupe du monde ». Même de ses nombreuses rebuffades, il a au moins tenu sa promesse.
Au delà de tout ceci, une véritable Direction Technique Nationale devra être mise en place et un véritable pôle d’entraîneur de haut niveau développé. Ce pôle devra comporter majoritairement les anciens internationaux et la fédération devra mettre l’emphase à leur développement en les aidant à acquérir des connaissances techniques de haut niveau et des stages auprès des équipes nationales européennes et latino-américaines.
La reprise en main des Lions Indomptables ne peut plus être un objectif à court terme, mais devra s’inscrire dans la durée et toute la politique globale du football devra être concertée. Du football jeune au football sénior, les systèmes de jeu devront être identiques. Les jeunes doivent être rigoureusement suivis depuis la base.