Si vous ne savez pas, Monsieur Iya, ce que je pense de vous, je vais vous le rappeler. Vous n’avez jamais été Owona Homme Sec. Vous n’avez certainement jamais été Vincent Onana. Vous n’avez jamais ressemblé à un de vos prédécesseurs qui nous ont humiliés partout dans le monde et qui ont, dans l’ensemble, apporter l’opprobre sur leur charge. Vous n’avez jamais suscité chez nous le dégoût que nous ont inspiré certains de ces personnages. En bref, Monsieur le Président, je vous ai toujours considéré comme un personnage tout à fait fréquentable.
Vous comprendrez donc, Monsieur, que ce n’est pas moi qui nourrirais la moindre intention de battre froid à un des rares grands dirigeants à Yaoundé qui ne se conduit pas comme un soudard. Cela dit, j’ai été surpris de vous entendre annoncer votre candidature à la présidence de la Fécafoot, pour un troisième mandat. Cela me préoccupe, Monsieur le Président, et je vous demande : est-ce bien raisonnable ?
Vous dirigez la Fécafoot depuis 2000. Cela va faire bientôt neuf ans. Neuf ans, Monsieur le Président, c’est long ; mais surtout, c’est largement suffisant pour faire ce qu’on voulait faire et ce qu’on avait promis de faire. Quatre ans de plus, pour quoi faire au juste, Monsieur ?
En neuf ans vous aurez fait ce que vous avez pu faire. Quatre ans de plus n’y changeront rien : vous ne pourrez rien faire de plus. C’est là une vérité statistiquement significative. Je n’ai pas la vertu du comptable ; je ne fais donc pas de bilan. Mais comme beaucoup de vos compatriotes, je sais compter et, surtout, je n’oublie pas une promesse.
Il n’est pas nécessaire de rappeler toutes les casseroles qu’on traîne nécessairement après neuf ans à la tête d’une institution. Je veux juste vous rappeler qu’en 2005, vous avez promis de professionnaliser le football de haut niveau au Cameroun. Je vous le donne volontiers, c’était là le genre de promesse inconsidérée qu’on fait au cours d’une campagne électorale, mais vous avez bien promis. Quatre ans plus tard, rien, même pas le moindre frémissement. Vous avez échoué.
Mais il y a plus. L’affaire Bamboutos, par exemple, menée de façon lamentable, est digne du fameux « footoir » de Me Nguini. Elle traduit tout l’amateurisme du monde et met au jour les dysfonctionnements de l’institution que vous dirigez. Que dire de l’inénarrable feuilleton Précheur-Nang ? Un directeur général pour la Fécafoot, Monsieur le Président, c’est une très bonne idée que vous n’avez pas réussi à mettre en œuvre. Vous nous avez donné l’image d’un dirigeant pusillanime et prompt à flinguer ses collaborateurs à la moindre attaque extérieure. Pire encore : je crois que vous n’avez jamais songé à donner à un directeur général l’autorité voulue pour faire le travail que vous lui auriez confié.
Là où je vous attendais, où je plaçais tous mes espoirs, Monsieur le Président, c’est au plan des rapports avec le MINSEP. Ces rapports sont-ils meilleurs maintenant qu’ils n’étaient il y a huit ans ? Vous allez me dire : pour danser un bon tango, il faut être deux. Soit. Vous avez eu pour partenaire quelques personnages totalement ineptes au MINSEP, mais cela ne nous soucie pas. C’est votre job de trouver un arrangement avec le ministère en créant un rapport de forces favorable. Vous ne l’avez pas fait. Faire donner la FIFA à tout bout de champ ne nous émeut plus et n’a rien rapporté de bon au football camerounais.
Si l’évocation de ces petits points ne suffit pas à vous émouvoir, j’en appelle au sens du devoir que je sais que vous cultivez. Vous n’êtes pas irremplaçable. Peu importe que les candidats qui se bousculent dans l’ombre soient préoccupants au double plan de la morale et de la compétence, une jeune institution comme la Fécafoot a besoin de sang neuf, régulièrement.
Je vous conjure, monsieur le Président, réexaminez votre décision. Vous ne pouvez rien nous promettre de crédible pour les quatre prochaines années. Vous êtes un homme recommandable ; cela ne changera jamais dans notre esprit. Mais la Fécafoot a besoin de plus que ça. Laissez tomber, Monsieur, nous vous en saurons gré.