Convoqué parmi les 28 au stage d’avant-Can des Lions Indomptables, Pierre Ebédé s’envolait ce dimanche matin vers le Burkina Faso. A l’aéroport de Roissy, l’ancien gardien du Tonnerre de Yaoundé juniors tenait à signifier aux camerounais qu’il est toujours là, et qu’il mérite mieux qu’un poste de numéro trois, comme certains lui destinent déjà d’office…
Pierre Ebédé Owono est souriant, à quelques minutes de l’embarquement pour Ouagadougou. Accompagné de son épouse et de Evariste Onana, dont il parraine le Solifoot , il commence à ressentir la pression inhérente à l’appel de la sélection camerounaise. « Je suis quelque part ému de retrouver le groupe » dit-il un peu timidement, ce qui contraste beaucoup avec son mètre 88 et son imposante carrure. Ces Lions qu’il va rejoindre au Burkina, il les avait perdus de vue, mais ne se souvient pas très bien depuis quand. Il hésite un peu avant de répondre: « mon dernier match avec les Lions? c’était à la dernière CAN? à Rouen en 2006? je ne sais plus, mais ça date de longtemps je ne me souviens même plus! » En fait c’était à Rouen au match amical contre la Guinée, où il joue vingt minutes, en Août 2006, le jour même de la nomination de Aarie Haan, annoncée durant la partie! Ebédé est amer, parce que « malgré tout ce que je faisais en Grèce, étant le seul gardien camerounais sur le terrain en Coupe d’Europe, jusque-là on ne m’appelait pas! Mais bon, il faut respecter le choix des coaches, donc aujourd’hui on a de nouveau fait appel à moi, je ne peux que donner le meilleur de moi-même. »
Entretemps, le Cameroun joue sa campagne de qualification pour la Can sans jamais le convoquer, ni contre le Rwanda, la Guinée Equatoriale et le Libéria, soit six matches officiels ainsi que les trois amicaux en Belgique, au Japon et en Gallice. Ebédé en profite pour terminer son séjour au Panathinaïkos de Grèce et s’engage au Fc Metz en Août 2007. Le club lorrain vient de monter et on s’attend à ce qu’il joue au vu de son statut, notamment ses matches en Coupe de l’Uefa. Trivino commence la saison, puis Marichez. Ebédé, 28 ans en février prochain, joue finalement peu en cinq mois…
« Je suis arrivé dans une équipe à problèmes » note Pierre qui se réjouit du changement récent d’entraineur. « Les choses devraient également changer de mon côté, car je suis resté presque la première moitié du championnat de côté. J’ai eu une petite discussion avec le nouvel entraineur [Yvon Pouliquen, ndlr] qui m’a fait comprendre que il va me donner mes chances. » L’électrochoc semble prendre comme cela arrive parfois quand un coach débarque: Metz commence l’année par une victoire en Coupe par 6 buts à 1 samedi soir 5 janvier, contre un adversaire de division inférieure.
On reparle rapidement du stage de Ouaga, où sont conviés quatre gardiens. Comment se situe le gardien messin dans la hiérarchie de l’équipe nationale? Déçu d’être réduit à un affrontement avec Mbarga Janvier pour le dernier strapontin, comme lu la veille sur cet article de Camfoot.com, sa réponse fuse: « je crois que normalement, je suis Pierre Ebédé qui a fait beaucoup de choses. J’ai beaucoup bossé, j’ai été amateur, puis j’ai déjà fait une longue carrière en tant que professionnel. J’ai joué en Coupes d’Europe. Je me dis que je mérite un peu de respect, je respecte mes coéquipiers Carlos [Kameni] et Souleymanou. Je crois qu’au Cameroun on a toujours eu la grande classe de gardiens de but. Mais au jour d’aujourd’hui, je crois que je mérite mieux. »
Pense-t-il alors que la hiérarchie se fera sur le terrain, au stage du Burkina? « Normalement et logiquement oui! Quand on parle de gardien de but au Cameroun actuellement, on ne peut pas m’écarter. je suis à la mesure et à la hauteur des deux autres, Carlos Kameni et Souleymanou. ça dépend du nouveau coach et de ses appréciations, mais je crois que je suis à la hauteur, et pourquoi pas quelqu’un qui peut aider aussi le Cameroun. »
Ce voyage en Afrique de l’Ouest sera aussi l’occasion pour Ebédé de rencontrer pour la première fois Otto Pfister récemment installé à la tête de l’équipe nationale: « c’est vrai que le nouveau coach allemand, je ne le connais pas très bien, mais l’adjoint Gwéha, il me connait puisqu’il m’avait déjà eu en juniors, donc lui je pense qu’il peut bien se souvenir de moi, parce que déjà en ce temps là je faisais déjà des choses, j’étais déjà un gardien de classe… »
Pas trop dur alors de faire le choix entre Metz qui a un nouvel entraineur susceptible de vous faire jouer et aller passer trois semaines ou un mois à la Can au Ghana? « Vous savez, je crois que c’est l’ambiance qui change: à Metz, j’ai passé des moments vraiment difficiles, les cinq premiers mois. Aller à la CAN c’est un nouveau challenge, je vais aller retrouver mes potes, c’est la patrie quoi, on peut se donner de nouvelles choses… »
Il va être temps d’embarquer dans l’avion, ce qu’ont déjà fait Joseph Désiré Job et Modeste Mbami, deux des autres Lions présents à l’aéroport. C’est le moment de se dire au revoir avec une dernière question, celle que tout le monde se pose dans le triangle national et ailleurs: Le Cameroun a-t-il des chances d’aller loin dans cette Can comme les gens l’attendent? Pierre Ebédé est serein et imperturbable: « Bien sûr! Le Cameroun a toujours eu une très grande équipe: il suffit que les gars soient sérieux, même si on ne parle pas du Cameroun en ce moment je me dis qu’on peut toujours faire mieux. En tant que camerounais, je me dis qu’on doit remporter… »
-Avec vous dans les cages, pourquoi pas?
-« C’est pas impossible! Si je peux créer la surprise, pourquoi pas? je ne serais que ravi…
Jean-Pierre K. ESSO à Roissy Charles de Gaulle
La vidéo complète de l’entretien avec Pierre Ebédé
Un article sur Ebédé paru en 2005