Alors que la plupart des championnats Européens observent la trêve hivernale, celui de Russie est à son terme depuis bientôt deux mois. L’international camerounais Serge Branco médaillé d’or aux jeux olympiques de Sidney 2000 par un appel à la tolérance et la générosité a ouvert son cœur stigmatiser le phénomène de racisme en Russie dont il est souvent victime. Dans un entretien à bâtons rompus accordé à Camfoot, il n’a pas éludé ses envies et ses ambitions de retourner en sélections nationales du Cameroun devant prendre part aux jeux olympiques à Beijing et la Can 2008 au Ghana.
Camfoot.com: Vous venez de remettre un don d’équipements sportifs à l’Ajsc, comment qualifiez-vous ce geste à l’endroit des journalistes sportifs Camerounais ?
Serge Branco : Je me suis rendu compte que les journalistes et les sportifs formaient les maillons d’une chaîne parce qu’étant attachés à la même passion qu’est le football. Avant d’être homme de médias certains parmi eux ont flirté avec le football et c’est une fierté pour moi d’offrir ce don à la presse.
Camfoot.com: On vous a aussi remarqué par des gestes à l’endroit des jeune de certains quartiers de la ville de Douala…
Serge Branco : Oui j’organise chaque fin d’années et ce depuis trois ans un tournoi de football qui regroupe trois quartiers (Nganguè, Haoussa et Makepè). Pourquoi ces quartiers ? Tout simplement parce que le Quartier Haoussa à New-bell c’est chez ma belle famille, le quartier Nganguè c’est là où j’ai été élevé par mon oncle et Makepè c’est mon lieu de résidence depuis 7 ans. J’ai offert des denrées alimentaires et des équipements sportifs aux jeunes de ces différents quartiers question pour moi de lutter contre la pauvreté au Cameroun.
Camfoot.com: Quels sont les projets que vous aviez déjà réalisé ?
Serge Branco : Je suis cofondateur de As Douala IIème depuis 5 ans club évoluant en championnat provincial du Littoral. J’ai leur ai fourni beaucoup d’équipements sportifs et de matériels d’entraînement. En 2004, j’avais offert un don de médicaments dans un hôpital à Bafang et bientôt je vais construire un centre de formation des footballeurs à Yassa.
Camfoot.com: La saison s’est achevée depuis bientôt deux mois, quel est votre bilan sportif ?
Serge Branco : Notre bilan cette saison n’a pas été très bon, notre équipe qui était habituée à figurer parmi les cinq premiers, mais cette saison nous avions terminé la saison au 11è rang du classement ceci dû aux problèmes extra sportifs. Mon club a connu des changements d’entraîneurs et de présidents ce qui a nécessité le rachat par une société dont Abramovich est actionnaire.
Camfoot.com: On vous a vu évolué en sélection nationale espoirs en 2000 mais beaucoup de Camerounais ignorent votre parcours de footballeurs.
Serge Branco : J’ai commencé à jouer très jeune à Ngaoundéré, bénéficiant du soutien de Joseph Koska à l’époque entraîneur provincial de l’Adamaoua qui m’avait repéré lors des jeux Ossuc en 1994. C’est après ma belle performance lors de la coupe Top que j’ai été retenu parmi les stagiaires de la 3è promotion de l’ecole de football des brasseries du Cameroun. Pierre Womé Nlend, Salomon Olembé et Patrick Suffo étions des co-équipiers à cette époque. C’est dans l’Unisport de Bafang que j’ai signé ma première licence avant de partir en Europe.
« J’ai subi les pires frustrations et blessé dans mon amour-propre en Russie »
Camfoot.com: La société Russe est très hostile aux noirs avec le phénomène de racisme ambiant. Pouvez-vous nous décrire l’environnement dans lequel vous vivez ?
Serge Branco : La Russie c’est un pays rude d’abord par le climat et les relations inter humaines. Je me souviens de ce 11 novembre 2007 lors du match de la dernière journée du championnat où j’ai été obligé d’abandonner mes coéquipiers sur le terrain à cause des cris de singes lancés contre moi. Ça été une image terrible pour moi ; les Russes n’ont pas une culture africaine comme les autres pays Européens. Ils considèrent les noirs comme des animaux, c’est un calvaire pour les étudiants noirs dans ce pays qui sont au quotidien reduits à leur plus simple expression. Le gouvernement Camerounais doit s’engager pour interpeller le gouvernement Russe pour ce phénomène de racisme devenu alarmant.
Camfoot.com: Comment vivez-vous cette situation en tant qu’Africain ?
Serge Branco : Vous savez c’est facile pour un footballeur de vivre dans ce cadre. La société Russe fonctionne avec deux classes diamétralement opposées. Je place les étudiants noirs dans la classe des pauvres et les footballeurs chez les riches. Les footballeurs vivent dans un cadre sécurisé différents des autres couches de la société alors que les étudiants sont exposés parce que le plus souvent en contact direct avec les populations qu’ils rencontres dans les métros, supermarchés et au campus.
Camfoot.com: Comment voyez-vous votre avenir en Russie ?
Serge Branco : J’ai signé un contrat de 4 ans avec mon club Krylia Sovetov Samara et je suis à ma deuxième année. Après l’incident du 11 Novembre dernier, j’ai saisi la fédération Russe de football et la Fifa par le biais d’un avocat pour que les sanctions soient prises contre le racisme. Ce n’est pas la première fois que de tels actes se manifestent en championnat. Il y’a trois ans un joueur Brésilien sociétaire de Lokomotiv de Moscou avait été victime des chants racistes et la fédération avait infligé une sanction financière de 600.000 dollars au club adverse. Compte tenu de la richesse des clubs Russes, l’Uefa avait affirmé qu’il fallait sévir davantage. S’agissant de mon cas, j’attends la réponse dans les prochains jours et s’il n’y a pas de sanction, je mon avenir serait incertain dans ce pays. J’ai subi les pires frustrations et blessé dans mon amour-propre en Russie.
« Je reste à la disposition des entraîneurs pour défendre encore les couleurs de mon pays comme lors des jeux Olympiques à Sidney en 2000 »
Camfoot.com: Parlons des lions indomptables du Cameroun. Seriez-vous prêt à renouer avec la sélection nationale ?
Serge Branco : Je reste à la disposition des entraîneurs pour défendre encore les couleurs de mon pays comme lors des jeux Olympiques à Sidney en 2000. Cette médaille d’or vaut encore une importance huit années après l’avoir remporté. Ma longue absence en équipe nationale du Cameroun est due à une incompréhension entre certains responsables à l’époque ce qui avait poussé le ministre Pierre Ismael Bidoung Kwaptt à me soustraire des joueurs sélectionnables.
Camfoot.com: La politique de reconstruction de l’équipe nationale du Cameroun est-elle urgente comme c’est le cas en Europe ?
Serge Branco : Je dirais plutôt qu’il faille intégrer des nouveaux joueurs et l’encadrement technique des lions devrait revoir sa politique en surclassant les joueurs dans chaque catégorie comme c’est le cas au Brésil, en France et ailleurs. Il faut qu’il y ai une continuité chez les minimes, cadets, juniors et seniors.
Camfoot.com: Comment vivez-vous le conflit permanent qui oppose la Fécafoot au ministère des sports et de l’éducation physique ?
Serge Branco : C’est triste, je me demande parfois si c’est le Cameroun de Roger Milla, Samuel Eto’o Fils… De quelle époque sommes nous dans ce pays?! J’ai des coéquipiers Béninois et Gabonais qui me parlent comment sont déterminés les rôles des deux entités. Une franche collaboration entre la Fécafoot et le ministère serait bénéfique pour notre football, on a besoin de la stabilité pour le bon fonctionnement de l’équipe nationale du Cameroun.
Camfoot.com: Quelles sont les chances du Cameroun à la prochaine coupe d’Afrique des nations qui démarre dans quelques semaines au Ghana ?
Serge Branco : Le Cameroun dispose un bon groupe par ses joueurs de qualité qui demandent d’être mis en confiance. Les leaders actuels Rigobert Song, Samuel Eto’o Fils et Géremi Njitap doivent tenir la locomotive pour entraîner les jeunes vers le sacre. On gagnerait plus en intégrant des nouveaux joueurs pour parvenir à ce résultat. Je pense que nous sommes bien partis pour figurer dans dernier carré mais tout dépendra de l’entame de la compétition.
Entretien mené par D. Ekoulé à Douala
Parcours
– 1995- 1997 : Unisport de Bafang
– 1997- 1998 : SD Croatia Berlin
– 1998- 2000 : Eintracht Braunschweig
– 2000- 2003 : Eintracht Frankfurt
– 2003-2004 : Vfb Stuttgart
– 2004 : Leeds United
– 2004-2005: Queens park Rangers
– 2005: Shinnik Yaroslavi
:Krylia Soveto Samara
Palmarès
– Champion Olympiques Sidney 2000
– 12 sélections avec les lions indomptables du cameroun
– 4 matchs en champions league avec Vfb Stuttgart.