Après une première période accrochée, essentiellement marquée par l’expulsion de Del Horno, le choc annoncé de ces huitièmes de finale de la Ligue des Champions entre Chelsea et Barcelone a pris une incroyable intensité en deuxième période. Si Chelsea a ouvert le score, les Catalans ont pris le contrôle du match pour s’imposer finalement 2-1, le but de la victoire étant signé Eto’o. Le Barça, avec un Messi de gala, prend une belle option pour les quarts avant le retour au Camp Nou.
Ronaldinho avait illuminé le choc d’il y a un an entre Chelsea et le Barça. Cette saison, le Ballon d’Or a dû partager la vedette avec le nouveau prodige catalan, Lionel Messi. Souvent comparé à Diego Maradona, le petit Argentin a fait étalage de tout son talent. Véritable poison, Messi a harcelé la défense de Chelsea pendant 90 minutes et a été un des grands artisans du spectacle proposé mercredi soir à Stamford Bridge en multipliant les actions de très grande classe.
Du très grand spectacle en effet pour une opposition entre les deux clubs qui est en passe de devenir un grand classique du football européen. Et pourtant, la tension, palpable depuis plusieurs jours avant le match, se vérifiait d’emblée sur le terrain où, dans un premier temps, l’opposition allait se limiter à un combat physique très intense. Un terrain, parlons-en, qui ne fait pas honneur à la réputation d’excellence du gazon anglais. Car la pelouse de Stamford Bridge, dont la piètre qualité avait été dénoncée par le FC Barcelone, est véritablement indigne d’un club du niveau de Chelsea et par conséquent d’un match de Ligue des Champions. On reconnaît néanmoins les grands vins à ce qu’ils peuvent être appréciés dans un verre en carton, les vingt-deux acteurs allaient ainsi s’employer à faire preuve de leur talent malgré des conditions difficiles. Les plaisirs les plus doux étant souvent ceux qu’il faut savoir attendre, le public aura dû d’abord assister à une première période âpre avant de se régaler.
Le match avait ainsi débuté par un long round d’observation. Si Messi était le premier à déclencher les hostilités sur une frappe cadrée mais facilement interceptée par Cech (3e), les joueurs se jaugeaient physiquement au milieu de terrain et le match, parti sur un faux rythme, avait des allures de bras de fer entre deux équipes aux conceptions tactiques différentes. Tandis que Frank Rijkaard, fidèle à son habitude, avait mis en place une équipe résolument penchée vers l’avant, José Mourinho avait choisi un schéma plus défensif avec pour consigne à ses joueurs de se montrer explosifs et d’exploiter la moindre faille. La possession de balle était barcelonaise mais les Blues pesaient sur la défense catalane et l’extraordinaire activité de Claude Makelele offrait de nombreuses récupérations de ballon à Chelsea au milieu de terrain.
Messi beaucoup !
La déception est cette fois pour Chelsea et Lampard.
Le Barça, moins mobile qu’à son habitude, avait des difficultés à appliquer son jeu de velours et fonctionnait par accélération successives. Ce sont néanmoins les Catalans qui se procuraient les meilleures situations. Par exemple quand Messi débordait sur son côté droit et centrait pour Samuel Eto’o. Le Camerounais, dos au but, laissait filer pour Ronaldinho qui ne pouvait pas armer sa frappe (19e). Un Ronaldinho qui se montrait encore plus dangereux à la réception d’un centre en retrait d’Oleguer avec une frappe à ras de terre laquelle faisait briller Petr Cech, auteur d’un splendide arrêt réflexe (23e). Jusque là, les deux formations avaient fait preuve d’une extrême prudence, ne se découvrant pas et préférant attendre la bonne ouverture pour accélérer, mais Barcelone pressait et Messi était particulièrement intenable. L’Argentin était ainsi victime d’un premier attentat de Del Horno à l’angle de la surface (32e). Une grosse faute sans conséquence directe mais dont l’arbitre, le Norvégien Terje Hauge, allait se souvenir quatre minutes plus tard quand, Messi, après avoir enrhumé Arjen Robben, se prenait un énorme tampon du même Del Horno qui n’échappait pas cette fois à la sanction : carton rouge.
A dix contre onze, c’est un autre match qui débutait alors mais Chelsea ne se laissait pas abattre. Tandis que Mourinho remplaçait immédiatement Cole par Geremi, histoire d’amener de la densité physique au milieu de terrain, Makelele compensait en se multipliant sur la pelouse. L’international français était partout et faisait plus que combler les brèches. Et de fait, après la pause, Chelsea repartait au combat revigoré avec la volonté de ne pas subir. Didier Drogba, entré à la place d’Hernan Crespo, apportait sa puissance et malgré la supériorité numérique, le Barça était ballotté. Coup sur coup, Robben (47e) puis Ferreira (51e) alertaient Valdes. L’accélération des Londoniens avait le mérite de débloquer le match et les deux équipes allaient dès lors se libérer. Sur un corner tiré en deux temps, Messi obligeait ainsi Cech à se coucher (52e), puis Motta tentait sa chance de loin mais ne trouvait pas le cadre (56e).
La mitrailleuse barcelonaise
Mais à l’heure de jeu, c’est Chelsea qui allait trouver l’ouverture. Un coup franc côté gauche tiré par Frank Lampard créait la panique dans la défense catalane. Sous la pression de John Terry, Valdès et Motta ne se comprenait pas et le milieu brésilien marquait contre son camp (1-0, 59e). Un but heureux très mal vécu par le Barça qui se révoltait immédiatement. Commençait alors une demi-heure de folie qui allait tenir en haleine le public qui assistait à un festival d’occasions et de mouvements d’école. Messi était dans tous les bons coups sur son aile droite. Un slalom de l’Argentin dans la surface avec un centre en retrait n’était pas récompensé (62e). Mais Chelsea répliquait et profitait néanmoins des espaces offerts par Oleguer, en position d’arrière droit, mis en grosse difficulté notamment par Robben.
Et Eto’o a offert la victoire au Barça !
Le Barça poussait. Ronaldinho déposait un premier coup franc sur la tête de Larsson, tout juste entré en jeu, qui mettait le ballon au-dessus (67e). Le deuxième, trois minutes plus tard, allait être le bon. La frappe de Ronaldinho était déviée par Terry, capitaine malchanceux, qui trompait son propre gardien (1-1, 71e). Une égalisation qui libérait les Blaugrana, à l’image, encore une fois de Messi, dont la frappe enroulée, sublime, s’écrasait sur l’angle de la cage de Cech, impuissant (72e). L’attaque barcelonaise passait alors sur le mode mitrailleuse quand Larsson se heurtait à Terry, dernier rempart de Chelsea sur sa ligne (74e). Puis une frappe tendue de Silvinho obligeait Cech à se détendre (75e). Dans la minute suivante, Ronaldinho décalait Messi, mais l’Argentin était muselé par un tacle de Carvalho qui sauvait son camp (76e). Dans la foulée Terry, toujours là, repoussait du bout du pied une nouvelle frappe de Ronaldinho (76e) avant de mettre un terme au calvaire de Chelsea d’une façon peu catholique, plaquant littéralement Messi en pleine surface. L’arbitre préférait fermer les yeux…
L’étau se resserrait sur la défense anglaise et le bien nommé Samuel Eto’o, jusque là effacé, allait se rappeler au bon souvenir de Chelsea qui lorgne sur le Camerounais et serait prêt, dit-on, à lui dérouler le tapis rouge. En attendant, c’est bien la « camiseta » qu’Eto’o a sur le dos. Et le meilleur joueur africain était à la conclusion d’une action d’école. Ronaldinho, profitant de la lassitude physique de plus en plus palpable des Blues, perçait dans l’axe et décalait Larsson côté gauche qui remisait pour Rafael Marquez. L’ancien Monégasque adressait alors un modèle de centre qu’Eto’o se faisait un plaisir de reprendre de la tête pour crucifier Cech (1-2, 80e). La résistance héroïque de Chelsea avait pris fin à l’issue d’une demi-heure extraordinaire du Barça qui a su forcer son destin. Les Barcelonais ont effacé de la plus belle des façons le douloureux souvenir de leur élimination la saison dernière et ce sont bien eux qui seront en position de force au retour, au Camp Nou.
Par FREDERIC WARINGUEZ, Sports.fr