En l’absence, encore une fois d’un résultat positif, et avec le forfait de l’homme en forme du moment, Samuel Eto’o, on est à nouveau obligé de consacrer le portrait de l’homme du dernier match des Lions indomptables dans ces éliminatoires couplées Coupe du monde/Coupe d’Afrique des nations 2006 au mauvais acteur de la partie. Et même si cela commence à devenir redondant de le dire, Winfried Schäfer a encore étalé en terre soudanaise, samedi dernier, son incapacité à mener la sélection camerounaise sur les cimes du football africain.
De sorte que son équipe est passée tout à côté d’une humiliation devant le généreux Soudan, qui distribue gentiment points et goal-average conséquent aux adversaires directs des Lions indomptables depuis le début des matches de qualification à la prochaine Coupe du monde (Côte d’Ivoire, Egypte et Libye).
Le Cameroun était déjà passé à côté d’une raclée devant l’Egypte le 5 septembre dernier au Caire : mené 3-0 jusqu’à la 90ème minute, il fallut un sursaut des joueurs et un petit miracle dans les arrêts de jeu pour qu’il revienne à 3-2, encaissant une défaite plus supportable. Un mois a passé, mais rien n’a changé dans l’équipe, ni dans sa composition, ni dans sa façon de préparer les rencontres, ni dans l’organisation du jeu, encore moins dans l’état d’esprit. C’est une nouvelle fois dans les toutes dernières minutes du match et grâce à un nouveau petit miracle que les Lions indomptables ont arraché un petit point devant le distributeur automatique de points dans cette poule 3 des éliminatoires zone Afrique du Mondial 2006. Un match nul qui n’a absolument rien d’honorable puisque, non seulement il ne reflète pas le niveau et la valeur de l’équipe du Cameroun, mais encore il compromet un peu plus les chances d’une sixième qualification à la phase finale de Coupe.
Le premier responsable de cette dégringolade continue des Lions indomptables est, qu’on le veuille ou non, leur entraîneur. Qu’on ne nous brandisse surtout pas des arguments ‘’poncepilatiques » du genre: « est-ce lui qui doit marquer les buts ou barrer les attaquants adverses? » Le football est un sport collectif, et c’est à l’entraîneur à construire une équipe à base de talents individuels divers. Ailleurs, quand un technicien ne parvient pas à atteindre cet objectif, il donne lui-même sa démission. Chez nous, M. Schäfer a peut-être adopté les habitudes locales, puisque celui qui nomme les ministres qui le nomment continue, vingt-deux ans après, à promettre que les choses iront mieux demain. Quelle promesse peut encore nous faire Winfried Schäfer, à la tête des Lions indomptables depuis trois ans, et où il n’a jamais imprimé sa marque de grand technicien dont on nous disait qu’il est au moment de son recrutement? La Can 2002 a été gagnée sur les vestiges de la Dream Team héritée de son prédécesseur. La place de finaliste de la Coupe des confédérations 2003 fut obtenue avec un système ultra-défensif où l’innovation du coach fut d’aligner un coureur de 110m haies sur le couloir gauche du milieu. On n’oublie d’ailleurs pas le contexte particulier de cette compétition, boudée par les grandes nations comme le Brésil qui y envoya une équipe B.,, et qui, de toutes les façons, ne fut pas gaie pour le Cameroun avec cette disparition brutale de Marc Vivien Foé.
Que reste-t-il à Schäfer à brandir comme titre de gloire? Rien du tout. Une sortie honteuse au premier tour de la Coupe du monde 2002 où les Lions indomptables étaient attendus dans le dernier carré, une élimination tout aussi calamiteuse en quart de finale lors de la Can 2004 alors que le Cameroun était promis à un troisième sacre d’affilée après les succès de 2000 et de 2002. Tout ceci étant le résultat des errements tactiques permanents, d’une gestion hasardeuse de l’effectif (Mboma, Wome, Idrissou, Kameni, Emana, Ndiéfi…) et d’une absence totale de fonds de jeu. Comme si cela ne suffisait pas, et profitant des embrouilles administratives à répétition autour de la sélection, le technicien allemand en vient même à refuser des matches amicaux négociés pour les Lions indomptables. Dans la Bundesliga, le championnat de son pays d’origine, son haut fait serait d’avoir détecté quelques joueurs allemands de valeur dont le gardien Oliver Kahn. Comme si on pouvait formater un gardien de buts, un poste spécifique où le talent naturel est déterminant comme on le voit depuis des décennies au Cameroun. Le mérite d’un entraîneur peut être de transformer un ailier gauche en milieu récupérateur, ou un milieu offensif en grand libero, pas d’avoir détecté un gardien. Et le match Soudan-Cameroun de samedi nous réconforte davantage dans l’idée que Winfried Schäfer est en train conduire les Lions indomptables vers une élimination programmée.
E. Gustave Samnick, Mutations