On aurait pu penser qu’après la sanction sportive (bien que levée par la suite) et financière que la Fédération internationale de football association (Fifa) avait infligé le 16 avril dernier au Cameroun, dont l’équipe nationale de football avait arboré un maillot « non conforme » lors de la Coupe d’Afrique des nations (Can) en janvier-février 2004 en Tunisie, que les deux parties entretiendraient des relations tendues. Que non !
Du moins, si l’on se réfère aux dernières correspondances échangées par les présidents de la Fifa et de la Fécafoot (Fédération camerounaise de football). La plus récente date du vendredi 6 août 2004. Dans ce courrier adressé à M. Mohammed Iya, Joseph S. Blatter écrit: « […]Je suis heureux d’apprendre que le football camerounais, par l’intermédiaire de son président, désapprouve entièrement et regrette vivement cette plainte de la société Puma [équipementier des Lions indomptables, Ndlr]. Soyez sûr que j’apprécie particulièrement votre message et que je n’ai jamais mis en doute votre loyauté envers la Fifa. Tout en souhaitant à votre association plein succès sur le chemin d’une cinquième qualification consécutive en Coupe du monde… ».
Comme on peut le constater, cette correspondance vient en réaction à un fax que Mohammed Iya a adressé quatre jours plus tôt à M. Blatter. Le 2 août dernier, le président de la Fécafoot affirmait se désolidariser de l’action juridique intentée par Puma contre la Fifa, après que cette dernière eut interdit son maillot novateur une pièce baptisé UniQT. Le 28 juillet dernier en effet, l’équipementier des Lions indomptables a déposé un recours devant la justice et réclame plus de deux millions d’euros (un peu plus d’un milliard de F Cfa) de dommages et intérêts à la Fifa qui avait sanctionné cette équipe pour avoir porté des maillots une pièce. Puma a intenté l’action juridique auprès du Tribunal civil de Nuremberg (sud de l’Allemagne) en vue d’obtenir la levée de l’interdiction faite aux joueurs de porter l’UniQT lors des compétitions organisées par la Fifa, indiquait il y a quelque temps un porte-parole du fabricant allemand d’articles de sport. Cette action de Puma confirmait les propos tenus en avril dernier par Horst Widmann, directeur général de Puma et bras droit de son patron, Jochen Zeitz : « Quelqu’un doit maintenant entreprendre quelque chose contre la Fifa. On ne peut plus tolérer cela », avait-il commenté.
Évocation
D’après la société allemande, au moment où la sanction sportive infligée au Cameroun tombe, elle n’existe point dans le code de discipline de la Fifa et l’objet de la faute (port de maillot une pièce), encore moins dans les Lois du jeu, amendées le 15 mai 2004 par l’International football association Board (Ifab) réuni à la demande du président de la Fifa. Lors de cette rencontre tenue la veille du congrès du centenaire de la Fifa les 18 et 19 mai derniers à Paris, l’Ifab, garant des lois du jeu, avait apporté un ajout à la Loi 4 des Lois du jeu concernant l’équipement de base de tout joueur comprenant un maillot ou chemisette, des culottes « deux pièces ». Différent donc de l’UniQT porté à la Can par les Lions indomptables.
Toutefois, à la demande des congressistes de la réunion du centenaire à Paris, la Fifa avait décidé de lever la sanction de six points de pénalité infligée par sa Commission de discipline un mois auparavant au Cameroun lors des éliminatoires jumelées Can/Coupe du monde 2006 en Allemagne.
Laquelle sanction avait été prononcée le 16 avril et confirmée le 12 mai par la Commission d’appel de la Fifa. En revanche, la Fifa avait maintenu l’interdiction de porter les maillots une pièce fabriqués par Puma ainsi que l’amende de 200.000 francs suisses (80 millions et demi environ de F Cfa) imposée à la Fécafoot. »Une décision défavorable », avait alors estimé l’équipementier allemand qui, à la fin du mois écoulé, a porté plainte au civil contre la Fifa. On se souvient d’ailleurs que l’avocat allemand du Cameroun, Reinhard Stuenkel avait qualifié de « farce » cette procédure contre les « Lions indomptables ». C’est « comme cela que j’imagine une procédure judiciaire dans un état totalitaire », avait-il ajouté.
Reste que la position de la Fécafoot par rapport à l’action de Puma est plutôt curieuse, si l’on s’en tient aux démarches menées conjointement par l’équipementier et son client aux fins de lever la double sanction sportive et financière de la Fifa. Il apparaît donc que la Fécafoot qui a passé des moments difficiles au moment où couvait cette double sanction, voudrait revenir dans les bonnes grâces de la maison mère. Puisqu’à entendre certains de ses responsables actuels, « mieux voudrait l’avoir avec elle que contre « . Ce revirement de la Fécafoot par rapport au recours en justice de Puma pourrait-elle porter un coup à leur relation? La convention les liant arrive à échéance en 2006. Même si à la Fécafoot, on se justifie en arguant qu’après l’affaire des maillots qui a semé le trouble (en terme de responsabilité des uns et des autres) dans la tête de bien de personnes, « il vaudrait mieux éviter toute action prêtant à équivoque ».
Bertille M. Bikoun, Mutations