Fidèle à son franc parler légendaire, l’ancien portier des Lions Indomptables aujourd’hui consultant à RFI, dresse pour nous les principales attentes de la CAN 2004.
Comment voyez-vous la CAN 2004 et quels sont vos favoris ?
Je pense qu’il n’y aura pas beaucoup de nouveauté dans cette édition en dehors des deux nouveaux qui sont le Bénin et le Zimbabwe. De fait, on aura toujours le même groupe de favoris : Cameroun, Afrique du Sud, Sénégal, Tunisie et Nigeria, avec des outsiders qui pourraient réaliser une demi surprise comme le Mali et le Maroc. Pour résumé, je suis persuadé que le vainqueur sortira de ce groupe de pays.
Et si nous analysions plus précisément chacun des postulants. D’abord, les pays du Maghreb et du Nord de l’Afrique, qui semblent en retrait ces dernières années – à l’exception notable de la Tunisie -…
Effectivement. La Tunisie tient ses espoirs de deux choses : Elle organise la compétition à domicile et elle bénéficiera d’un renfort de qualité en la personne de Santos (NDLR : l’attaquant de Sochaux récemment naturalisé brésilien). De plus, le fait d’avoir confié la sélection à Roger Lemerre peut être déterminant, non pas tant par la qualité du coach mais surtout par le retour qu’il peut avoir sur le plan psychologique. Or c’est précisément sur le plan psychologique, que les tunisiens ont souvent pêché par le passé lorsqu’ils organisaient des compétitions majeures.
L’Algérie elle, est en reconstruction. Elle est dans une phase positive mais il lui faut un certain temps. Il y a un problème à mon avis, celui d’un encadrement sportif crédible, qui puisse faire passer l’idée de la gestion du temps. N’oublions pas que l’on tombe toujours plus vite qu’on ne remonte ! Donc il faut du temps aux équipes pour se reconstruire !
L’Egypte a des moyens encore supérieurs. Mais elle est souvent mal gérée sur le plan sportif. La gestion sportive doit pouvoir toujours primer sur la gestion administrative. Le pays doit absolument prendre le chemin de la reconstruction.
En Afrique sub-saharienne, que pensez-vous des deux derniers finalistes de la CAN 2002 ? Comment ont-ils évolué depuis lors selon vous ?
L’évolution me parait plus négative que positive. Le Sénégal par exemple a connu des soubresauts d’ordre administratif (le président de la fédération qui démissionne, etc.). Il se trouve que dans ce cas, les performances sportives ont couru trop vite par rapport à la gestion administrative. Mais de cette crise peut ressortir un groupe plus fort, plus soudé. Les joueurs n’ont pas fondamentalement baissé de niveau ou alors de très peu. La gestion peut soit amoindrir leur potentiel ou leur permettre de mieux s’exprimer. Il faut espérer ici que ce sera le deuxième cas.
Le Nigeria par contre semble clairement vieillissant et nettement en retrait comparativement à la fin des années 90 ?
N’oublions pas que le Nigeria est le pays qui a le plus large réservoir de joueurs du continent. Si l’ossature des jeunes joueurs est capable de s’unir autour d’un ancien grand joueur comme Christian Chukwu, c’est très prometteur. D’autant qu’il pourra toujours bénéficier de l’apport de joueurs d’expérience et de qualité. Mais là encore, une gestion sportive avec une certaine objectivité, commanderait de se séparer de certains joueurs au bon moment.
Le Mali, en tout cas est le réel espoir de cette CAN. Les matchs amicaux récents confirment la montée en puissance de cette sélection.
Effectivement, le Mali semble bien avancer. Sur un plan individuel, on situerait le Mali effectivement comme un espoir. Maintenant, il faudrait confirmer. On attend qu’il puisse passer chez les A. On pense qu’ils devraient apporter un peu de fraîcheur. Je pense toutefois qu’ils ont besoin de se surpasser pour y arriver.
Enfin, nous avons un groupe de pays Guinée, RDC, etc…
Oui, ce sont des football en reconstruction. D’ailleurs, cette reconstruction est handicapée par le fait que ces pays eux-mêmes sont reconstruction. Il est donc difficile d’être solide dans un environnement pareil. Il convient d’ailleurs de relativiser leurs performances, car il est certain que dans une CAN à huit, ces pays n’auraient pas pu se qualifier. Je dis souvent que si on est honnêtes, si on est sportifs, et la première qualité d’un sportif, c’est d’être honnête, aller en coupe du monde pour le Cameroun par exemple – alors que le continent bénéficie de 5 places- ne devrait plus constituer une performance en soi, puisqu’il le faisait déjà lorsque l’Afrique avait 2, puis 3 places. De la même manière, aller à la CAN dans une configuration à 16 participants n’est plus une performance pour une grande majorité de pays !. La Guinée et la RDC font partie de ces pays.
Enfin pour terminer, que pensez-vous des conditions d’organisation de cette CAN ? et puis de l’arbitrage africain très peu souvent évoqué ?
Je pense que les conditions d’organisation seront satisfaisantes, puisque la Tunisie candidate à l’organisation de la coupe du monde 2010 à tout intérêt à présenter des aires de jeu en bon état, et une organisation impeccable.
Au niveau de l’arbitrage, je dirai qu’il y a des bons arbitres sur le continent, mais ils ont une certaine dérive autoritaire, qui est le principal domaine dans lequel ils doivent faire des progrès. Pour le reste, ils commettent des erreurs comme tout le monde, et en ce qui me concerne, ils seront toujours pardonnés.
Merci Joseph Antoine et bonne CAN 2004
Merci à vous
Propos recueillis par Cyrille Nono