Le foot, c’est de l’or. Personne ne sait où le trouver. Bonaventure Djonkep en est convaincu, “avec de bons joueurs dans chaque club, les spectateurs reviendront au stade”. Les contours du cercle vicieux sont connus: pour remplir les stades, il faut un spectacle de qualité; il faut des joueurs talentueux pour faire un spectacle de qualité; il faut de l’argent pour s’offrir des joueurs talentueux et il faut des stades remplis pour avoir de l’argent…
Par quel bout faut-il commencer? Tout le monde s’accorde à dire que l’argent est le nerf de cette guerre. Mais la Fecafoot et les clubs ne réussissent pas à en trouver suffisamment.
Alors qu’en Côte d’Ivoire, l’Asec d’Abidjan réussit à boucler un budget d’un milliard de francs cfa, le 44e championnat national du Cameroun s’ouvre, lui, avec des clubs qui tirent le diable par la queue. Stade de Bandjoun par exemple n’a pas de jeux de maillots complets. L’équipe des Bandjoun n’a pu commencer la saison qu’avec l’aide bienveillante du député Calvin Foinding, par ailleurs président de Mont Cameroon FC qui lui a offert 30 ballons et 5 millions de francs cfa. Caïman de Douala n’est pas mieux loti. Le club a arrêté un budget de 120 millions de francs, mais les cotisations lors de son congrès n’ont rapporté que 10 millions de francs. D’où viendront les 110 autres millions? Surtout pas de la vente des cartes des membres, puisque les meilleurs clubs en placent au trop une centaine par an. Ils ne viendront encore moins des maigres recettes des stades. L’année dernière, toutes les équipes qui ont joué au stade de la Réunification se sont partagé… 13 millions de francs cfa.
Ailleurs, les clubs constitués en véritables entreprises, bouclent une partie de leur budget avec des opérations de merchandising. Au Cameroun, la modernisation de la gestion des clubs n’est pas à l’ordre du jour. Malgré la création de sociétés à objet sportif, nombre de clubs restent encore trop dépendants de leurs présidents. Ce ne sont pas l’Union de Douala ou le Canon de Yaoundé qui n’ont pas pu s’offrir un siège depuis des décennies qui vont fabriquer des maillots et des écharpes à vendre à leurs potentiels sympathisants.
Ailleurs aussi, les clubs et les championnats sont financés par les collectivités locales, les sponsors et la télévision. Mais dans une ville comme Douala qui compte une vingtaine de clubs de première et deuxième division, à qui les mairies qui ont mieux à faire avec peu, vont-elles donner les maigres subventions qu’elles pourraient dégager par extraordinaire pour le soutien du mouvement sportif? Faut-il compter avec le sponsoring alors que les entreprises installées au Cameroun considèrent que le football local n’est pas vendable. Quand il leur arrive de s’y intéresser, c’est pour financer les Lions indomptables, en espérant un gain immédiat en terme d’image. Seul Mtn a pris l’option de soutenir le football des clubs. Cet opérateur de téléphonie mobile a en effet signé en 2002 une convention avec la Fecafoot pour investir pendant deux ans 600 millions de francs dans l’animation du football qui se joue à l’intérieur du Cameroun.
Quant à la télévision, les hommes des médias trouvent inopportune le souhait des présidents de clubs de voir les chaînes désireuses de retransmettre les matches payer des droits de retransmission. Pour Martin Luther Donkeng, le directeur de publication de Global Football, par exemple, il ne faut pas rêver. Il est illusoire de penser aujourd’hui que les médias audiovisuels déjà désargentés pourraient payer des droits de retransmission d’un championnat qui n’est pas vendable. Sam Séverin Ango du service sports de la télévision Canal 2 estime quant à lui que “la Fecafoot a besoin des médias comme partenaires pour faire connaître le championnat, afin qu’il puisse attirer les spectateurs et générer des recettes”.
Que faut-il alors faire? Il est certainement urgent de travailler à la recherche des solutions. L’une d’elles consisterait déjà à mettre fin à la folie des grandeurs. À quoi cela sert-il d’avoir un championnat à 16 clubs, si c’est pour y compter des équipes qui n’arrivent pas à s’acheter des maillots? La Fecafoot devrait sérieusement songer à définir un cahier de charge à remplir impérativement par chaque club désireux d’évoluer au sein de l’élite. De peur que l’on ne continue de dire que le Cameroun n’a pas de championnat.