L’année 2002 qui s’achève a été marquée d’un sceau particulier par l’équipe nationale de football. A la fois conquérante et décevante, elle s’en sort avec un bilan mitigé partagé entre l’illusion et la désillusion. 2003 permettra-t-il à l’équipe fanion du Cameroun et à son football de redorer le blason ?
Le 10 février 2002. L’année s’ouvrait avec le sacre des Lions Indomptables à Bamako. Après leur victoire acquise de haute lutte face à une équipe sénégalaise plus que jamais déterminée à mettre un terme à la légende des Lions du Cameroun, Rigobert Song et ses coéquipiers confirmaient ce jour tout le bien qu’on pensait d’eux. Impitoyables ! les Lions du Cameroun l’étaient devenus l’espace de cette Coupe d’Afrique des nations malienne. Ils avaient alors imposé leur marche royale démontrant qu’ils étaient demeurés le roi de la forêt, des savanes, des eaux et des airs. Eperviers, Aigles, Simbas (anciens Léopards), Eléphants, Lions, etc. aucun fauve ni aucun rapace ne leur a résisté. Pour la quatrième fois et pour la deuxième fois consécutive, les Lions Indomptables devenaient champions d’Afrique. Fait plutôt rarissime sous le Renouveau, les Lions Indomptables terminaient une compétition en beauté, sans éclats de voix, improvisations, ni intrigues. Du coup, les observateurs pensaient la sérénité retrouvée au sein de l’équipe fanion du Cameroun. Ce qui a fait dire à certains que les Lions Indomptables pouvaient aller très loin en coupe du monde de mai-juin au Japon. Les joueurs étaient au sommet de leur gloire. Le tirage au sort leur a réservé des équipes à leur taille qui toutefois, sans être des enfants de chœur, n’étaient pas des foudres de guerre non plus pour ces Camerounais devenus des extraterrestres. Auréolés de leur nouveau titre de champions d’Afrique, les Lions Indomptables eurent droit à des matches amicaux de haute facture. L’Autriche, l’Angleterre, le Danemark, l’Argentine…, il n’y avait pas mieux surtout que les scores sont restés bien flatteurs.
Mais au fait, c’était sans compter avec l’amateurisme des dirigeants camerounais qui n’avaient pas su mettre à profit le temps de préparation pour liquider tous les problèmes d’intendance. Et comme un malheur ne vient jamais seul, la délégation camerounaise pléthorique comme d’habitude en pareille circonstance est bloquée à Paris devenue la plaque tournante des Lions Indomptables. Les joueurs égrènent leur chapelet de doléances sans solution depuis des lustres. Encore une histoire de primes (30 millions de francs cfa pour la participation) non payées pour une équipe qui est à sa cinquième participation à une phase finale de la Coupe du monde de football (1982, 1990, 1994, 1998, 2002). Une fois de plus, le Cameroun jusque-là respecté et craint dans le monde étale ses incongruités. Les joueurs boudent des chèques signés des autorités de leur pays. L’affront est cuisant et fait revisiter les chantiers de la feymania qu’on reproche aux Camerounais. Le gros porteur de la Camair affrété pour les Lions Indomptables et le reste de la délégation par un nationalisme hautain ne décollât pas ; les autorisations de survol des territoires furent périmées. 4 jours de conciabules à Paris puis commence l’ennuyeuse aventure ambiguë vers l’Asie où attendus le 19 mai les Lions Indomptables ne seront à Nakatsue que le 27 mai, à 72 heures du match d’ouverture.
La suite est connue. Une prestation catastrophique des Lions Indomptables à la Coupe du monde Corée/Japon 2002. Ils en sont rentrés la queue entre les jambes au 1er tour alors que nombre d’observateurs les voyaient parmi les favoris de cette édition. Le rêve a été de courte durée. Après cette débâcle des Lions, rien ou presque n’a plus réussi au football camerounais en 2002.
Trois représentants en Coupes africaines des clubs, aucun trophée. Certes, Tonnerre Kalara Club a échoué à près du but en finale de la Coupe de la Caf face à Jeunesse sportive de Kabylie (0-4 et 1-0) respectivement à Alger et Yaoundé. Cotonsport de Garoua et Fovu de Baham ont été en deçà des espérances en Champions League et en Coupe des vainqueurs de coupe.
Une année pour rebondir
Sur place au pays, le championnat national et la Coupe du Cameroun se sont joués, cahin caha ; avec, il est vrai moins de scandales que les années antérieures. Ennuyeuse et interminable, la saison footballistique a consacré ses lauréats. Canon sportif de Yaoundé a été sacré champion du Cameroun ; Cotonsport de Garoua en est le dauphin et Mount Cameroon de Buea est détenteur de la Coupe nationale. De nouveaux défis interpellent d’ores et déjà ces trois ambassadeurs en coupes africaines de clubs. Les trois représentants camerounais en 2003 sur la scène africaine ont des atouts qui donnent à espérer. Leur dénominateur commun semble être leur bonne santé financière. Canon sportif de Yaoundé devrait profiter de ses partenariats avec l’équipe belge de Lokeren et du Pari mutuel urbain camerounais (Pmuc). Cotonsport de Garoua, équipe corporative bénéficie des avantages que lui offre la Sodecoton dont l’équipe dépend. Quant à Mount Cameroon, l’homme d’affaires Calvin Foinding y trône à merveille. Ce ne saurait être les seuls arguments. Chaque équipe mériterait de renforcer son effectif pour pouvoir faire rêver les Camerounais.
Les Lions Indomptables de leur côté ont de belles chances de se racheter. En juin prochain se joue à Paris la Coupe des confédérations qui regroupe tous les champions continentaux. Une occasion pour l’équipe fanion du Cameroun de refaire et de reparcourir son histoire. Mais comment y croire fermement si à 6 mois de l’événement les Lions Indomptables sont toujours sans aucun plan de préparation. Avec la reconduction de Winfried Schäfer on a cru percevoir la continuité du travail entamé avant la Can malienne. Le sélectionneur national semble avoir toutes les peines du monde pour sortir son calendrier. A la base, un conflit larvé entre le directeur technique national (Dtn) Robert Corfou et le sélectionneur national Winfried Schäfer entretient le cafouillis.
En dehors de cette guerre hégémonique pour le contrôle de l’équipe nationale du football entre les deux expatriés, de gros nuages semblent brouiller la visibilité entre la Fédération camerounaise de football (Fécafoot) et le régisseur des Lions Indomptables, Sport-Plus. Depuis mars 2001, cette société française n’a réussi qu’à faire venir 3 sociétés à capitaux français au chevet de l’équipe nationale de football : Orange, Pmuc et la société anonyme des Brasseries du Cameroun (Sabc).
Une autre Zone d’ombre au sein des Lions Indomptables reste incontestablement le black out total au niveau des matches amicaux. Depuis la dernière Coupe du monde, l’équipe nationale de football a connu 3 stages, sans un moindre match amical de haut niveau. Inter contact marketing (Icm) qui en a la charge et la Fécafoot s’accusent mutuellement, sans résoudre le problème.
A la vérité, le Cameroun ne peut reconquérir sa place dans le monde du football que s’il réussit à résoudre tous les différends qui y constituent aujourd’hui un grand obstacle à son éclosion. C’est entre autres l’organisation des compétitions nationales dignes qui tiennent dans le temps ; l’assainissement de l’équipe nationale et sa remise en scelle. Car ce n’est que quand le Cameroun redeviendra compétitif qu’il va attirer de nouveau les regards vers lui. En ce moment, les Lions Indomptables pourront alors se revendre cher pour le bonheur et la fierté du peuple camerounais, si souvent privé des victoires de son équipe au profit d’un régime passé maître dans l’art de la récupération politique du football pour lequel il n’a que du mépris.
Noé Ndjebet Massoussi